droit pénal
Question de :
M. Jean Gaubert
Côtes-d'Armor (2e circonscription) - Socialiste
M. Jean Gaubert souhaite attirer l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la pratique de la double peine, qui consiste à punir un délinquant étranger vivant en France d'une peine de prison puis d'une expulsion et d'une interdiction du territoire français. Outre l'isolement psychologique, familial et social relatif à l'expulsion, la double peine prend une tournure particulièrement dramatique lorsqu'elle envoie des personnes dans des pays où règnent la terreur et les persécutions. Depuis plusieurs années, cette situation mobilise nombre d'associations, de syndicats, de citoyens engagés dans la défense ou la dignité des personnes. A plusieurs reprises, la France a été condamnée par la Cour européenne de justice pour manquement au respect de la vie privée et familiale (art. 8 de la Convention européenne des droits de l'homme et de sauvegarde des libertés fondamentales). Il lui demande donc quelles mesures il compte prendre pour limiter les effets de la double peine.
Réponse publiée le 16 juin 2003
Le garde des sceaux a l'honneur de faire savoir à l'honorable parlementaire que les étrangers reconnus coupables de certaines infractions prévues et réprimées par le code pénal ou de certaines infractions aux dispositions de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative au droit des étrangers peuvent se voir infliger, à titre principal ou complémentaire, la peine d'interdiction définitive ou temporaire du territoire français, en application des dispositions de l'article 131-30 du code pénal. Le garde des sceaux a l'honneur de rappeler à l'honorable parlementaire que ni les dispositions de la Convention européenne des droits de l'homme, ni la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme ne proscrivent par principe une telle mesure. Par ailleurs, le garde des sceaux indique que la circulaire du 17 novembre 1999, qui avait entendu définir les orientations générales de politique pénale applicable en matière d'interdiction du territoire français dans les trois directions du respect du principe de nécessité et de proportionnalité de la peine d'interdiction du territoire français de l'information des étrangers sur la peine d'interdiction du territoire français et de l'harmonisation des pratiques en matière de traitement des requêtes en relèvement d'interdiction du territoire français, ne semble avoir atteint qu'imparfaitement ces objectifs. C'est pourquoi il a été mis en place, à la fin du mois de novembre 2002, un groupe de travail interministériel composé de représentants de la chancellerie et du ministère de l'intérieur, qui a procédé à de multiples auditions d'associations, d'avocats, de magistrats, de fonctionnaires de police et de représentants de la société civile sur la question dite de la « double peine ». Un rapport a été remis le 2 avril 2003 au ministre de l'intérieur qui propose un certain nombre de réformes législatives en matière d'interdiction du territoire français. Dans les prochaines semaines, le Gouvernement soumettra au Parlement le projet de loi tendant à réformer plusieurs dispositions de l'ordonnance du 2 novembre 1945 et du code pénal, tel qu'il a été présenté en conseil des ministres le 30 avril 2003. Ce texte, qui porte notamment sur la question de la peine d'interdiction du territoire français, tend à assurer une protection relative, voire quasi absolue, n'autorisant le prononcé de la peine d'interdiction du territoire français que dans des conditions restrictives dès lors qu'il s'agit d'étrangers ayant de solides attaches avec la France.
Auteur : M. Jean Gaubert
Type de question : Question écrite
Rubrique : Étrangers
Ministère interrogé : justice
Ministère répondant : justice
Dates :
Question publiée le 24 mars 2003
Réponse publiée le 16 juin 2003