procédures
Question de :
M. Rudy Salles
Alpes-Maritimes (3e circonscription) - Union pour la Démocratie Française
M. Rudy Salles attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la proposition de création d'un statut de mise en cause. Dans un souci de protection des droits de la défense et de renforcement de la présomption d'innocence, et, pour compenser les prérogatives accrues de la police dans le cadre de leurs enquêtes, le Conseil national des barreaux (CNB) propose la création d'un statut de mise en cause. Sera mise en cause, selon le nouveau statut proposé par le CNB, toute personne suspectée au cours de l'enquête d'avoir commis une infraction. Le mis en cause pourra alors bénéficier des dispositions protectrices de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme. Ainsi, il pourra, d'une part, connaître avec exactitude la nature et le détail des accusations portées contre lui et, d'autre part, bénéficier du concours d'un avocat qui aura accès au dossier tout au long de l'enquête et, si nécessaire, l'assistera lors des interrogatoires. Il souhaiterait connaître la position de la chancellerie sur ce statut de mise en cause.
Réponse publiée le 8 mars 2005
Le garde des sceaux, ministre de la justice, a l'honneur d'indiquer à l'honorable parlementaire les observations qu'appelle de sa part la proposition du Conseil national des barreaux tenant à la création d'un statut du mis en cause lors de l'enquête de police judiciaire. Cette proposition a été formulée à l'occasion des débats relatifs à la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, qui a amélioré les moyens d'investigation au cours des enquêtes concernant des faits de criminalité ou de délinquance organisées, et elle a été présentée comme une contrepartie nécessaire de la réforme. Il n'est toutefois pas possible de donner aux personnes suspectées dans le cadre d'une enquête de police judiciaire des droits exactement équivalents à ceux accordées aux personnes mises en examen lors d'une instruction préparatoire, comme cela résulterait de la proposition du Conseil national des barreaux qui demande l'assistance permanente de la personne par un avocat ayant accès au dossier de la procédure. Cela reviendrait en effet à supprimer la distinction traditionnelle dans notre droit entre l'enquête et de l'instruction, en omettant au surplus le fait que la personne suspectée lors de l'enquête ne fait pas l'objet de poursuites pénales, et qu'elle ne sera peut être jamais poursuivie si l'enquête la met hors de cause. Il demeure qu'il est nécessaire que les personnes suspectées lors d'une enquête bénéficient de l'ensemble des droits exigés par les dispositions de la Convention européenne des droits de l'homme lorsqu'elles font l'objet d'une mesure privative de liberté, ce qui est le cas lorsqu'elles sont placées en garde à vue. Dans une telle hypothèse, en vertu des dispositions des articles 63-1 et 63-4 du code de procédure pénale, la personne a notamment le droit d'être informée de la nature de l'infraction sur laquelle porte l'enquête et de s'entretenir à plusieurs reprises, de façon confidentielle et pendant une durée de trente minutes, avec un avocat de son choix ou commis d'office, qui est précisément informé de la nature et de la date présumée de l'infraction. Ces entretiens, qui peuvent normalement avoir lieu dès le début de la garde à vue et lors de sa prolongation à l'issue d'un délai de vingt-quatre heures, sont différés à la quarante-huitième heure ou la soixante douzième heure de garde à vue pour certaines infractions de criminalité ou de délinquance organisée présentant une particulière gravité. Par ailleurs, la loi du 9 mars 2004 a renforcé les droits de la personne lorsque celle-ci, gardée à vue pour des faits de criminalité ou de délinquance organisées, a fait l'objet au cours d'une enquête des mesures d'investigations propres à ces infractions, comme une garde à vue de quatre jours, des perquisitions de nuit ou des interceptions de correspondances émises par la voie des télécommunications. Dans un tel cas, le nouvel article 706-105 du code de procédure pénale précise que, six mois après sa garde à vue, la personne peut interroger le procureur de la République sur les suites données à l'enquête la concernant. Si cette enquête doit se poursuivre, elle peut alors demander à ce que son avocat prenne connaissance du dossier de la procédure avant toute nouvelle audition. Cette possibilité pour l'avocat d'avoir accès au dossier de l'enquête paraît ainsi de nature à répondre à la demande du Conseil national des barreaux, sans remettre en cause la cohérence de notre procédure pénale.
Auteur : M. Rudy Salles
Type de question : Question écrite
Rubrique : Justice
Ministère interrogé : justice
Ministère répondant : justice
Dates :
Question publiée le 31 mars 2003
Réponse publiée le 8 mars 2005