Question écrite n° 16699 :
détenus

12e Législature

Question de : Mme Bérengère Poletti
Ardennes (1re circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

Mme Bérengère Poletti attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les difficultés rencontrées par les personnels de surveillance des établissements pénitentiaires. Il semblerait que le nombre d'agressions dont ils sont les victimes ne cesse d'augmenter, et que ces dernières soient le fait de détenus ne paraissant pas jouir de toutes leurs facultés mentales, sans pour autant bénéficier d'une prise en charge par les services médico-psychiatriques. Elle lui demande donc s'il envisage la prise en charge de ce type de détenus dans des établissements spécialisés pour qu'ils disposent de traitements adaptés et s'il est prévu un dispositif de contrainte de soins médicaux.

Réponse publiée le 15 décembre 2003

Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire qu'il porte une grande attention aux difficultés rencontrées par les personnels de l'administration pénitentiaire qui subissent des agressions de la part de personnes détenues souffrant de troubles mentaux. En effet, le nombre des agressions de personnels pénitentiaires par des personnes détenues est en augmentation, étant passé de 278 en 1998 à 538 en 2002 puis, au 30 octobre 2003, à 368 agressions. Au regard des personnels victimes, ces situations sont pleinement prises en compte par la direction de l'administration pénitentiaire. Bien qu'il n'entre pas dans le domaine de compétence des personnels pénitentiaires d'attribuer certaines agressions à d'éventuels problèmes de santé mentale, nombre d'agressions sont néanmoins perçues par ces personnels comme liées à des troubles mentaux. S'agissant de l'accès à l'offre de soins psychiatriques au bénéfice des personnes détenues, le garde des sceaux, ministre de la justice précise à l'honorable parlementaire que le décret n° 86-602 du 14 mars 1986 a confié la charge de tels soins en milieu pénitentiaire au service public hospitalier ; la loi n° 94-43 du 18 janvier 1994 ayant ensuite transféré au service public hospitalier l'ensemble de la prise en charge sanitaire des personnes détenues. Actuellement, les personnes souffrant de troubles mentaux mais ne nécessitant pas une hospitalisation sont prises en charge par les services médico-psychologiques régionaux en soins ambulatoires de jour au sein de 26 établissements pénitentiaires, et par les services hospitaliers de psychiatrie de proximité au sein des autres établissements pénitentiaires. Dans ces derniers, l'offre de soins est encore insuffisante. En ce qui concerne la prise en charge des patients détenus nécessitant une hospitalisation, deux situations sont à distinguer : lorsque la personne détenue dont le comportement compromet l'ordre public et la sécurité des personnes, ne consent pas aux soins, elle est hospitalisée d'office dans un établissement de santé en application des article D. 398 du code de procédure pénale et L. 342 du code de la santé publique. Dans le cas de malades présentant pour autrui un danger tel qu'ils nécessitent des protocoles thérapeutiques intensifs adaptés et des mesures de sûreté particulières, les hospitalisations sont assurées par des établissements de santé habilités dans une unité spécialement organisée à cet effet, conformément à l'arrêté du 14 octobre 1986 relatif au règlement intérieur type des unités pour malades difficiles ; lorsque la personne détenue consent aux soins, elle est hospitalisée dans un service médico-psychologique régional (SMPR), c'est-à-dire au sein d'un service public hospitalier situé dans l'enceinte d'un établissement pénitentiaire. D'une manière générale, ce dispositif sanitaire a considérablement amélioré l'accès à l'offre de soins aux personnes détenues. Néanmoins, il se révèle insuffisant en matière de prise en charge des troubles mentaux compte tenu de l'ampleur des besoins. De ce fait, la loi de programmation et d'orientation pour la justice du 9 septembre 2002 a créé des unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA) pour accueillir en établissements de santé l'ensemble des hospitalisations pour troubles mentaux de personnes détenues, qu'elles soient consentantes ou non. Ainsi, les UHSA auront vocation à prendre en charge l'ensemble des hospitalisations des personnes détenues nécessitant des soins psychiatriques : hospitalisation avec consentement, hospitalisation d'office et, désormais, hospitalisation sur la demande d'un tiers. Cet élargissement des critères d'hospitalisation va constituer une amélioration notable de l'accès à l'offre de soins, notamment pour les personnes détenues nécessitant d'être hospitalisées pour troubles mentaux et non consentantes, mais qui pour autant ne compromettent pas la sécurité des personnes et l'ordre public. De tels malades détenus pourront donc être pris en charge dans les nouvelles UHSA selon les indications d'hospitalisation sur la demande d'un tiers, telles qu'elles sont en vigueur en milieu libre. Quant aux malades nécessitant une hospitalisation et qui sont consentants, lesquels relèvent aujourd'hui d'une prise en charge en SMPR, ils seront de la même façon orientés vers les UHSA. S'agissant de la prise en charge sanitaire des personnes détenues souffrant de troubles mentaux mais ne nécessitant pas d'hospitalisation, elle se poursuivra selon le dispositif suivant : les SMPR n'assurant plus d'hospitalisation complète seront recentrés sur l'offre de soins ambulatoires. Pour l'instant ils continuent d'accueillir en hospitalisation consentie les personnes détenues souffrant de troubles mentaux ; dans les établissements pénitentiaires n'accueillant pas un SMPR, les secteurs de psychiatrie de rattachement poursuivront leur mission actuelle. Dans l'attente de l'ouverture des UHSA, il y a lieu de préciser que la direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins au ministère de la santé, de la famille et des personnes handicapées a pris des mesures en vue notamment de diversifier et intensifier l'offre de soins psychiatriques ambulatoires et à temps partiel en milieu pénitentiaire. En ce qui concerne les soins sous contrainte, jusqu'à la mise en place de ces nouvelles unités hospitalières, ils sont prodigués selon le dispositif précité, c'est-à-dire soit au sein du secteur hospitalier de psychiatrie de rattachement, soit en unité pour malades difficiles, et ce exclusivement dans le cadre de l'hospitalisation d'office.

Données clés

Auteur : Mme Bérengère Poletti

Type de question : Question écrite

Rubrique : Système pénitentiaire

Ministère interrogé : justice

Ministère répondant : justice

Dates :
Question publiée le 14 avril 2003
Réponse publiée le 15 décembre 2003

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