Question écrite n° 17430 :
commerce international

12e Législature

Question de : M. Pascal Terrasse
Ardèche (1re circonscription) - Socialiste

M. Pascal Terrasse attire l'attention de M. le Premier ministre sur les négociations conduites par l'Union européenne dans le cadre de l'OMC devant conduire à la signature de l'accord général sur le commerce des services (AGCS). Ces négociations, qui ne font l'objet d'aucune information de la part du Gouvernement, sont pourtant de nature à modifier profondément l'organisation des services publics en France et pourraient remettre en cause la nature même de l'action publique dans notre pays. En effet, les règles que l'AGCS se propose de mettre en oeuvre concernent tous les niveaux de prise de décision, de l'Etat à la commune, et s'appliquent à l'ensemble des services aux personnes, qu'il s'agisse des services assumés par la sphère privée comme des services publics. Le calendrier établi à Doha prévoyait que l'Union européenne fasse une offre de libéralisation de ses services à la date du 31 mars 2003. Cette date a été repoussée. Pourtant, les décisions sont prises ou sur le point de l'être, dans la plus grande opacité et sans aucun contrôle démocratique. Pour satisfaire les appétits des entreprises européennes qui souhaitent gagner des parts de marché dans les secteurs de l'eau, des déchets, de la poste ou des transports, l'Europe serait-elle prête à sacrifier sa santé, son éducation, sa culture ? Les termes du mandat de négociation dont dispose le commissaire européen en charge du dossier, M. Pascal Lamy, ne sont connus ni des parlementaires, ni des citoyens français. Aussi, il lui demande de bien vouloir lui faire connaître les termes de ce mandat. Par ailleurs, la prochaine conférence de l'OMC se tiendra à Cancun, du 10 au 14 septembre 2003. Il est encore temps de refuser les termes de l'accord. A cette fin, il lui demande de saisir le Parlement de ce dossier, afin qu'aucune décision engageant la France dans l'AGCS ne soit prise sans que le Parlement n'ait valablement délibéré sur les termes de cet accord. - Question transmise à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Réponse publiée le 25 août 2003

De nouvelles négociations sur les services sont engagées depuis le premier janvier 2000 à l'Organisation mondiale du commerce et ont été incorporées dans la négociation globale du cycle du développement de Doha. Ces négociations ont été engagées sur la base de l'article XIX de l'accord général sur le commerce des services (AGCS) qui prescrit des séries de négociations successives, ayant notamment pour objectif de promouvoir les intérêts de tous les participants sur une base mutuelle, sans objectif final autre. Le Gouvernement s'est toujours attaché, et confirme son attachement à rendre ces négociations aussi transparentes que possible, par le dialogue et l'explication auprès des élus et des représentants de la société. Le ministre délégué au commerce extérieur a présidé à ce titre plusieurs réunions d'information sur ces négociations, ouvertes à toutes les organisations et structures intéressées où a été présentée et discutée de manière ouverte et critique la proposition d'offre soumise par la commission européenne. De manière séparée sur ce thème spécifique, ou dans le cadre général des négociations de Doha, plusieurs réunions et présentations ont également été organisées à l'Assemblée nationale, au Sénat et au Parlement européen. L'offre communautaire, conditionnelle à ce stade, a enfin été rendue publique par la commission le jour de son dépôt auprès des autres membres de l'OMC. Lors des précédentes négociations du cycle d'Uruguay qui ont amené pour l'essentiel la consolidation du droit alors existant, l'Union européenne a fait figurer dans son offre une disposition précisant que dans tous les Etats membres, les services considérés comme services publics sur le plan national ou local peuvent faire l'objet de monopoles publics ou de droits exclusifs réservés à des fournisseurs privés. L'offre de libéralisation de l'Union n'a comporté d'engagements que dans le secteur privé, concurrentiel et marchand à l'exclusion de l'ensemble du service public. Elle a en outre consolidé à l'OMC les dispositions déjà en vigueur au titre de notre droit et qui permettent à des prestataires de services originaires de pays tiers de s'installer ou d'exercer dans notre pays, sous certaines conditions très précises (exigences de qualification, de déontologie, par exemple ; limitations quantitatives dans le secteur de la santé, afin de préserver nos instruments de régulation de l'offre). L'AGCS n'exclut a priori aucun secteur. Alors que, dans un certain nombre de cas, des activités de services sont gérées tantôt par la puissance publique tantôt par des personnes privées, l'exclusion formelle des services publics nécessiterait un consensus, difficile à obtenir, sur le champ et la définition de ces services. C'est pourquoi la préservation des services publics repose fondamentalement sur le mécanisme de négociation par listes positives et limitations de L'AGCS reconduit pour les négociations en cours. Avec ce mécanisme, aucun membre ne peut se voir contraint à privatiser un service public contre son gré, ni à l'offrir à la concurrence. Les ouvertures réalisées correspondent à la volonté de libéraliser exprimée par un membre, qui conserve la possibilité de limiter le champ de l'ouverture selon une définition propre, de poser des limitations en termes d'accès au marché ou de traitement national. L'AGCS consacre également le droit des États à réglementer et à faire évoluer leur réglementation, dans le plein respect du choix de leurs politiques publiques. En conséquence, les offres consenties n'emportent aucun effet, ni direct ni indirect, de déréglementation ni de privatisation. La négociation en cours conduit la France à réaffirmer ces mêmes principes. L'Union européenne étant déjà très ouverte dans le domaine des services, la France n'est pas hostile à ce que la négociation couvre un large champ de secteurs. Pour autant, elle a veillé et veillera à ce que l'Union européenne n'offre pas la libéralisation de ses services publics tels qu'ils sont conçus et protégés dans l'Union, le degré de libéralisation atteint au plan interne ou communautaire constituant l'élément de référence à l'OMC et à ce que soient préservés les équilibres trouvés dans le cadre de l'AGCS. A cet égard, il convient de rappeler que les différentes directives communautaires relatives à différents services d'intérêt général, adoptées par le Conseil, fixent tout autant les conditions de concurrence entre opérateurs que les modalités de maintien du service universel dans les secteurs où existe une vocation ou une structure publiques.

Données clés

Auteur : M. Pascal Terrasse

Type de question : Question écrite

Rubrique : Relations internationales

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : économie

Dates :
Question publiée le 28 avril 2003
Réponse publiée le 25 août 2003

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