élargissement
Question de :
Mme Chantal Robin-Rodrigo
Hautes-Pyrénées (2e circonscription) - Députés n'appartenant à aucun groupe
Mme Chantal Robin-Rodrigo appelle tout particulièrement l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur les relations entre la Turquie et l'Union européenne. Un espoir nouveau est né dans ce pays depuis l'adoption par le parlement turc, le 3 août dernier, d'une série de lois visant à améliorer la situation politique intérieure. Toutefois, Ankara a encore un long chemin à parcourir avant de pouvoir intégrer l'Union européenne. Les sondages effectués dans ce pays indiquant que plus des deux tiers de la population turque souhaitent entrer dans l'Europe, celle-ci demeurerait une utopie pour la plupart des Turcs. Malgré l'enthousiasme généré par les récents développements, un doute subsisterait en Turquie sur la sincérité de l'Union européenne envers elle. En effet, aux yeux des Turcs, le vote de leur Parlement a renvoyé la balle dans son camp, et ils attendent désormais de Bruxelles un signe sans ambiguïté (en l'occurrence l'annonce d'une date précise pour l'ouverture des négociations d'adhésion) que leurs efforts ne sont pas passés inaperçus. Toutefois, si les mesures adoptées par la Turquie afin de la ramener dans les standards démocratiques qui sont les fondements mêmes de l'Union européenne sont particulièrement louables, il n'en demeure pas moins vrai que la Turquie n'a toujours pas donné des marques de bonne volonté sur des dossiers de fonds particulièrement importants (les droits de l'homme, l'influence des militaires sur la vie du pays, les importantes difficultés économiques et financières rencontrées par la Turquie depuis quelques années et la question de l'immigration clandestine vers l'Europe) et, bien entendu, sur le règlement rapide d'un lourd dossier contentieux international, à savoir la « question chypriote ». II est évident que si la Turquie s'engageait rapidement dans un règlement négocié et équitable de ce dernier point, cela constituerait une preuve particulièrement remarquable de sa volonté de s'intégrer à l'Union européenne le plus rapidement possible, et sans arrière-pensées douteuses comme nous pouvons encore le suspecter actuellement. Or, par le passé, la Turquie a eu la propension à rouler l'Union européenne sur cette question, et il semblerait que l'approche d'échéances électorales en Turquie n'inciterait pas les politiciens de ce pays à faire pression sur M. Rauf Denktash, chef de la communauté chypriote turque, pour obtenir un règlement rapide de ce dossier. Pourtant, au stade auquel nous sommes arrivés, il serait absolument inacceptable pour l'Union européenne de continuer plus avant toute discussion avec la Turquie sans qu'une avancée décisive sur le dossier chypriote n'ait été très vite enregistrée. Mais il est vrai que l'Union européenne a toujours brillé par son immobilisme et sa couardise politique dans ce dossier alors qu'elle a depuis longtemps les moyens de pression nécessaires pour lui permettre de « taper du poing sur la table » et d'enfin contraindre Ankara à un règlement équitable de ce contentieux. Cette question l'inquiète particulièrement car l'inertie et le non-engagement actuel de la France dans cette ligne politique, ceci dans le contexte très proche de l'adhésion de Chypre à l'Union européenne et alors que sa position prééminente au sein de l'Union européenne lui donne la possibilité de faire évoluer considérablement les positions diplomatiques et politiques de cette dernière, pourrait avoir rapidement de très fâcheuses conséquences sur nos relations anciennes, cordiales et fructueuses avec la Grèce et Chypre. Or notre pays a tout intérêt à les entretenir avec la plus grande attention, sous peine de voir son influence diminuer considérablement en Méditerranée orientale. Elle lui demande, donc, si la France entend dans les plus brefs délais et de façon claire et ferme, affirmer, proposer et faire en sorte que soit adopté, tant par la Commission de Bruxelles que par ses partenaires européens, le fait que la poursuite de la négociation d'adhésion de la Turquie à l'Union européenne et l'attribution de toute nouvelle assistance économique et financière à ce pays ne soient désormais subordonnées qu'au règlement rapide, équitable et définitif de la « question chypriote ».
Réponse publiée le 21 octobre 2002
L'Union européenne et la France en particulier sont particulièrement attachées aux progrès de la Turquie dans le domaine du respect des droits de l'Homme. Les réformes législatives adoptées par le Parlement turc le 3 août dernier, mais également lors des votes des 7 février et 25 mars de cette année, constituent un progrès significatif de la Turquie sur la voie démocratique. Cet important programme va dans le sens des engagements pris lors de la conclusion, en février 2001, du partenariat pour l'adhésion entre la Turquie et l'Union européenne. Il est à ce titre encourageant. L'abolition de la peine de mort répond également à l'un des engagements des Etats membres du Conseil de l'Europe, auquel la Turquie entend dorénavant accorder une plus grande importance dans son système judiciaire. Cet ensemble de réformes doit être à présent effectivement mis en oeuvre. Pour ce qui est de la réponse de l'Union européenne à la Turquie, le Conseil européen de Copenhague en décembre prochain pourra, après la publication officielle du rapport de progrès de la Commission européenne, disposer de tous les éléments pertinents pour mesurer la progression de la Turquie vers le respect des critères politiques de Copenhague, qui sont un préalable à l'ouverture de négociations d'adhésion. En ce qui concerne le règlement de la question chypriote, la France encourage les chefs des deux communautés à rechercher rapidement un règlement politique global, juste et durable. Elle souhaite que la Turquie participe activement à la recherche de cette solution, en usant de son influence auprès du chef de la communauté des Chypriotes turcs. Il convient d'encourager sans relâche le travail du secrétaire général des Nations unies et de son envoyé spécial, M. de Soto, sur ce dossier. Conformément aux conclusions du Conseil européen d'Helsinki en décembre 1999, la décision du Conseil relative à l'adhésion de Chypre à l'Union européenne sera prise sans que le règlement politique de la question chypriote « constitue une condition préalable ». Pour arrêter sa décision, le Conseil européen tiendra compte de tous les « éléments pertinents » au terme des négociations d'adhésion, qui sont désormais entrées dans leur phase décisive.
Auteur : Mme Chantal Robin-Rodrigo
Type de question : Question écrite
Rubrique : Union européenne
Ministère interrogé : affaires étrangères
Ministère répondant : affaires étrangères
Dates :
Question publiée le 26 août 2002
Réponse publiée le 21 octobre 2002