Question écrite n° 1986 :
RMI

12e Législature

Question de : M. Léonce Deprez
Pas-de-Calais (4e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Léonce Deprez rappelle à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité qu'il avait, vainement, appelé l'attention de son prédécesseur par les questions écrites n°s 74905 et 74906 du 8 avril 2002 sur le rapport de la Cour des comptes (année 2001) déposé sur le bureau du Parlement le 30 janvier 2002. Ce rapport constatait, en des remarques accablantes l'inefficacité du volet insertion du RMI. Il exprime le souhait que, sous son autorité, soit mis en place un copilotage du volet insertion du RMI par l'Etat et les départements, avec un renforcement du contrôle sur l'exécution des conventions, sauf à ce que les rapports de la Cour des comptes restent sans suite concrète. - Question transmise à Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion.

Réponse publiée le 14 juillet 2003

Lors de sa création en 1988, le revenu minimum d'insertion devait représenter une rupture par rapport à la logique traditionnelle de l'assistance en luttant contre la pauvreté tout en entravant le processus d'exclusion et d'isolement des personnes en difficulté. Toutefois, ce dispositif s'est étendu malgré les effets d'une croissance économique qui aurait dû aboutir à une diminution du nombre des allocataires. En fait, dès les premières années de la décennie 1990, le nombre d'allocataires a doublé pour se stabiliser aujourd'hui autour d'un million. Après une progression rapide au tout début de la mise en place du revenu minimum d'insertion, le taux d'accès à l'emploi et à la formation ne s'est pas amélioré de façon significative. Seulement un allocataire sur deux bénéficie aujourd'hui du contrat d'insertion prévu par la loi. De plus, l'amélioration des mécanismes de cumul, dits d'intéressement, entre l'allocation et un revenu d'activité, restent trop complexes pour permettre aux allocataires de bénéficier d'une anticipation et d'une sécurité suffisantes. Au total, une trop faible part d'allocataires accède à l'emploi, et ceux qui bénéficient du revenu minimum d'insertion depuis plusieurs années demeurent trop nombreux. Cette situation est contraire à l'aspiration de la plus grande majorité d'entre eux. Le retour à l'emploi répond d'abord à la recherche d'une véritable autonomie personnelle ou familiale et à un légitime besoin d'utilité et de dignité sociales. Face aux limites du dispositif actuel, le Premier ministre a souhaité, dans son discours de politique générale en juillet dernier, que chaque bénéficiaire du RMI puisse se voir proposer un véritable contrat d'insertion. Le ministre des affaires sociales, du travail, et de la solidarité a présenté le 7 mai un projet de loi portant décentralisation en matière de RMI et créant un revenu minimum d'activité (RMA), qui a été examiné par le Sénat en première lecture le 26 mai dernier. La réforme vise, d'une part, à dynamiser le RMI sans remettre en cause son architecture globale : il reste un engagement réciproque entre le bénéficiaire, qui accède à une démarche d'insertion, et la collectivité, qui l'aide à retrouver son autonomie. D'autre part, le RMI reste une prestation de solidarité. Son montant et ses conditions d'attribution sont fixés au niveau national. L'instruction, la liquidation et le paiement des dossiers individuels continuent de s'appuyer sur l'ensemble des acteurs locaux : communes, services départementaux, associations, caisses d'allocations familiales (CAF), caisses de mutualité sociale agricole (CMSA). De plus, la réforme vise à porter remède aux insuffisances constatées en matière d'insertion, s'agissant de la gestion de situations individuelles, guidée par un impératif de proximité. C'est pourquoi le département disposera désormais du pilotage intégral du revenu minimum d'insertion. Cette orientation s'inscrit dans un long processus de décentralisation de l'action sociale qui a confié depuis vingt ans aux départements l'aide aux personnes en difficulté. Ce savoir-faire reconnu doit être aujourd'hui fortement valorisé. Le département sera le seul responsable pour décider l'admission, veiller aux conditions de versement de l'allocation et assurer l'insertion. La décentralisation du revenu minimum d'insertion s'inscrit d'autant plus dans cette continuité que l'insertion des allocataires relève déjà de la responsabilité des conseils généraux. Comme tout transfert de compétence, la décentralisation du revenu minimum d'insertion s'accompagne d'un transfert de ressources aux conseils généraux. Pour renforcer cette gestion de proximité et mobiliser davantage les départements, le projet de loi réforme l'organisation et le fonctionnement du pilotage local de l'insertion en mettant fin à l'enchevêtrement actuel des compétences de l'Etat et du département. La présidence du comité départemental d'insertion est confiée au président du conseil général, qui en désigne les membres et qui met en oeuvre le programme départemental d'insertion (PDI) arrêté par le conseil général. De même, le président du conseil général désigne les membres et le président des commissions locales d'insertion (CLI). Il fixe également leur nombre et leur découpage territorial. Au-delà de cette modification du pilotage départemental de l'insertion, le projet introduit l'obligation de mieux informer les allocataires sur leurs droits et leurs devoirs. Cette orientation est complétée par une modification du contrat d'insertion lui-même, afin qu'il puisse traduire l'implication effective de l'allocataire et de la collectivité : le contrat contient désormais des dispositions définissant de façon concrète le projet d'insertion ou le calendrier des démarches correspondantes. De plus, un référent unique pour chaque allocataire est garant de la cohérence du parcours d'insertion et de ses éventuelles réorientations. Cette réforme permettra désormais d'associer à la responsabilité, que conférera au département un cadre d'action caractérisé par un pilotage unique et global, la mobilisation des acteurs locaux, c'est-à-dire des communes, des services du conseil général, des caisses d'allocations familiales et des caisses de mutualité sociale agricole, de l'agence nationale pour l'emploi, (ANPE), ou des associations. La deuxième orientation générale de la réforme a pour but d'encourager le retour ou l'entrée dans l'activité. La réforme propose de mettre en place un dispositif destiné aux allocataires, dont la situation le permet, qui puisse constituer une véritable étape vers l'emploi durable. C'est pourquoi le revenu minimum d'insertion est complété par le revenu minimum d'activité (RMA). Par le RMA, l'action publique vise ainsi plus particulièrement les allocataires qui ne peuvent accéder à l'emploi dans les conditions ordinaires du marché du travail et pour lesquels un temps d'adaptation est nécessaire. C'est pourquoi le RMA sera accessible aux allocataires du revenu minimum d'insertion le percevant depuis au moins deux ans. Son champ d'application comprend les employeurs du secteur marchand, à l'exception des particuliers employeurs, et du secteur non marchand, à l'exception des services de l'Etat et du département. Il associe une allocation forfaitaire de RMI et un complément à la charge de l'employeur. Le revenu minimum d'activité répond ainsi à l'engagement du Président de la République : « grâce à l'institution d'un véritable revenu minimum d'activité, toute reprise d'activité s'accompagnera d'une hausse de revenus ». Dans ce cadre rénové, l'Etat recentre ses responsabilités en tenant compte à la fois des exigences de la libre administration des collectivités territoriales et de l'égalité de traitement des citoyens, mais en demeurant responsable du suivi des politiques conduites en matière d'allocation et d'insertion des bénéficiaires du revenu minimum d'insertion et du revenu minimum d'activité, non seulement pour en évaluer et en restituer les résultats, mais aussi pour faciliter les échanges des bonnes pratiques de terrain. Enfin, la réforme s'inspire aussi des expériences européennes en matière de gestion et d'activation des minima sociaux. Plus globalement, elle s'inscrit dans le cadre des recommandations européennes et de la mise en oeuvre du plan national pour l'emploi (PNAE), et plus particulièrement dans les objectifs retenus par le Conseil européen de Bruxelles en décembre 2002 dans la perspective du plan national d'action pour l'inclusion (PNAI) que la France transmettra à la Commission européenne d'ici juillet 2003.

Données clés

Auteur : M. Léonce Deprez

Type de question : Question écrite

Rubrique : Politique sociale

Ministère interrogé : affaires sociales, travail et solidarité

Ministère répondant : précarité et exclusion

Dates :
Question publiée le 26 août 2002
Réponse publiée le 14 juillet 2003

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