Question écrite n° 24788 :
réglementation

12e Législature

Question de : M. François Cornut-Gentille
Haute-Marne (2e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. François Cornut-Gentille attire l'attention M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire sur les conditions d'intégration dans la fonction publique. Par un arrêt rendu le 9 septembre 2003, la cour de justice des Communautés européennes a affirmé qu'un ressortissant communautaire souhaitant intégrer la fonction publique hospitalière française ne peut se voir imposer un concours d'admission de l'école nationale de la santé publique s'il atteste d'une formation équivalente obtenue dans un autre État membre. Cette décision va à l'encontre du statut des directeurs hospitaliers qui réserve l'accès à l'emploi en question aux personnes ayant suivi avec succès la formation de l'ENSP. Elle peut être à l'origine d'une remise en cause d'un certain nombre de dispositions statutaires concernant certains emplois de la fonction publique hospitalière, de la fonction publique de l'État et de la fonction publique territoriale. Aussi, il lui demande d'indiquer l'analyse faite par son administration des conséquences juridiques pour les différentes fonctions publiques de l'arrêt de la CJCE du 9 septembre 2003.

Réponse publiée le 13 janvier 2004

L'arrêt rendu le 9 septembre 2003 par la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) est issu d'un contentieux visant Mme Burbaud. Ressortissante d'origine portugaise ayant acquis aujourd'hui la nationalité française, celle-ci est diplômée de l'École nationale de la santé publique portugaise. En 1993, le ministère des affaires sociales, de la santé et de la ville lui a refusé l'accès direct à un emploi de directeur d'hôpital au motif qu'elle devait se présenter au concours correspondant, débouchant sur une scolarité à l'École nationale de la santé publique (ENSP) de Rennes. Dans le cadre du contentieux qui en est issu, la Cour administrative d'appel de Douai a saisi la CJCE d'une double question préjudicielle : la formation à l'ENSP est-elle assimilable à un « diplôme » au sens de la directive 89/48 du 21 décembre 1988 ? En cas de réponse positive à cette première question, l'intégration dans la fonction publique peut-elle être subordonnée à un concours ? Partant du principe de l'ouverture aux ressortissants communautaires des emplois de directeurs d'hôpital, la CJCE considère que les directives relatives aux professions réglementées sont susceptibles de s'appliquer, même si ces emplois relèvent de la fonction publique. Malgré l'absence de « diplôme » requis spécialement par le droit national pour accéder à ce corps, et en dépit de l'existence d'un tour extérieur, la Cour estime que les emplois de directeur d'hôpital représentent une « profession réglementée » au sens communautaire pour un double motif, d'une part, l'ENSP disposerait d'un monopole d'accès à cette « profession » ; d'autre part, la formation qui y est dispensée, ainsi que les épreuves qui la ponctuent, seraient assimilables à un « diplôme » au sens des directives communautaires. Dès lors, la CJCE vérifie si le concours d'accès à l'ENSP est conforme au droit communautaire. Constatant qu'il conduit à sélectionner des personnes appelées à être formées ensuite à l'ENSP, elle refuse qu'un candidat déjà qualifié soit soumis à la formation à l'ENSP et à l'examen de fin de scolarité. S'agissant du concours proprement dit, elle considère qu'il ne permet pas à ce type de candidats de faire valoir leur qualification puisque ce concours s'adresse à des candidats non qualifiés. Contredisant sur ce point le Conseil d'État, la CJCE interdit donc de soumettre Mme Burbaud à ce concours, qualifié d'entrave disproportionnée à la liberté de circulation des travailleurs. L'arrêt de la CJCE pose la question du devenir des écoles d'application de la fonction publique, qui reposent sur une sélection suivie d'une formation professionnalisée, modèle différent de celui proposé par l'avocat général dans cette affaire. Les suites à donner à cette décision appellent ainsi une étude approfondie. En effet, l'arrêt de la CJCE a été rendu en réponse à une question préjudicielle et il faudra tenir compte de la décision de la Cour administrative d'appel de Douai, voire du Conseil d'État en cassation. Par ailleurs, la CJCE s'est fondée sur l'état du droit applicable au moment des faits, en 1993, alors que le statut des directeurs d'hôpital a été modifié par un décret du 13 mars 2000. Le Gouvernement travaille donc à expertiser les effets exacts de cette décision pour procéder à l'adaptation du droit national.

Données clés

Auteur : M. François Cornut-Gentille

Type de question : Question écrite

Rubrique : Fonctionnaires et agents publics

Ministère interrogé : fonction publique, réforme de l'Etat et aménagement du territoire

Ministère répondant : fonction publique, réforme de l'Etat et aménagement du territoire

Dates :
Question publiée le 15 septembre 2003
Réponse publiée le 13 janvier 2004

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