détenus
Question de :
M. François Cornut-Gentille
Haute-Marne (2e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. François Cornut-Gentille attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la toxicomanie en milieu carcéral. Selon un rapport de l'Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (OEDT), un détenu sur deux consomme de la drogue en prison. Cette étude européenne souligne l'ampleur d'un fléau qui touche l'ensemble des pays membres de l'Union. Aussi, il lui demande de préciser les mesures prises par le Gouvernement pour lutter contre la toxicomanie en milieu carcéral et aider les détenus toxicomanes à ne plus consommer de drogues.
Réponse publiée le 27 janvier 2004
Le garde des sceaux, ministre de la justice, confirme à l'honorable parlementaire qu'un nombre important de personnes détenues sont toxicomanes. Une étude réalisée en 1997 sur l'état de santé à l'entrée en prison faisait apparaître que 32 % des entrants déclaraient une utilisation prolongée et régulière d'au moins une drogue - produits illicites et médicaments - dans l'année précédant l'incarcération. La moitié d'entre eux consomme des opiacés. Un tiers des entrants déclare également une consommation excessive d'alcool. Cette étude est en cours de renouvellement afin d'actualiser ces données. Cette population fragile bénéficie d'une offre de soins qui s'organise, à partir des unités de consultation et de soins ambulatoires (UCSA) et à partir des services médico-psychologiques régionaux (SMPR) pour les vingt-six établissements qui en sont dotés. L'organisation et le fonctionnement de ces structures médicales relèvent des attributions du ministère de la santé depuis la loi du 18 janvier 1994. La note interministérielle santé-justice-mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie du 9 août 2001 coordonne le dispositif de prise en charge des personnes dépendantes d'un produit psychoactif sous son aspect sanitaire à l'échelon local. Elle fixe comme objectifs, dans chaque établissement pénitentiaire, le repérage systématique de situations d'abus ou de dépendances de produits psychoactifs, la proposition d'une prise en charge adaptée à chaque détenu, le renforcement de la prévention, la préparation à la sortie et la proposition de mesures d'aménagement de peines. En matière d'accompagnement, seize établissements dotés d'antennes toxicomanie, et quarante et un centres extérieurs spécialisés dans les soins aux toxicomanes (CSST) ont pour mission l'accompagnement, le suivi et la préparation à la sortie de ces détenus. Ils interviennent en milieu ouvert comme en milieu fermé. Le financement de cette prise en charge des personnes dépendantes est assuré sur des crédits interministériels déconcentrés, au regard des besoins identifiés dans chaque département, dans le cadre de conventions départementales d'objectifs (CDO). Ces CDO coordonnent l'action des services sanitaires et l'action des services judiciaires. Des conventions de prestations sont signées avec des opérateurs (associations, établissements hospitaliers). Les services pénitentiaires locaux (SPIP) sont présents et actifs dans ces dispositifs tant pour la prise en charge des personnes condamnées exécutant leur peine en milieu fermé ou en milieu ouvert que pour celle des personnes définitivement libérées. La direction de l'administration pénitentiaire est membre du comité de pilotage des CDO. Cette forte implication judiciaire et pénitentiaire a été soulignée dans le rapport d'évaluation du dispositif d'octobre 2002. S'agissant des traitements de substitution en milieu pénitentiaire, une enquête, réalisée du 3 au 7 décembre 2001 par le ministère de la santé, a mis en évidence une amélioration dans le recours à ces traitements. Elle se manifeste non seulement par la possibilité pour les personnes détenues de continuer le traitement de substitution entrepris avant l'incarcération, mais aussi par la possibilité d'initier ce traitement en détention. Seuls dix-neuf services médicaux en 2001 (contre 34 en 1999) ne pratiquent pas la substitution, et il s'agit à 90 % de petites maisons d'arrêt détenant moins de 100 personnes. Les interruptions de traitement de substitution ne concernent plus que 5,5 % des personnes sous substitution à leur entrée en prison sur la période de novembre à décembre 2001. Les progrès accomplis démontrent que, conformément à la réforme instituée par la loi du 18 janvier 1994 et dans le cadre des objectifs fixés par la note interministérielle du 9 août 2001, les établissements pénitentiaires se sont ouverts au dispositif général des soins. Une étape nouvelle a également été franchie avec la circulaire du 30 janvier 2002 relative à la primo-prescription de la méthadone en établissement de santé. Elle permet aux médecins des UCSA et des SMPR d'initialiser ce traitement en milieu pénitentiaire. L'enquête de décembre 2001 soulignait toutefois qu'une meilleure harmonisation des pratiques professionnelles était nécessaire. La rédaction d'un guide des bonnes pratiques de substitution en milieu carcéral, confiée par le ministère de la santé à deux membres de la commission nationale consultative des traitements de substitution, y répond. L'administration pénitentiaire s'est efforcée de faciliter cette étude au sein des établissements et va diffuser ce guide aux personnels pénitentiaires au cours du premier trimestre 2004.
Auteur : M. François Cornut-Gentille
Type de question : Question écrite
Rubrique : Système pénitentiaire
Ministère interrogé : justice
Ministère répondant : justice
Dates :
Question publiée le 27 octobre 2003
Réponse publiée le 27 janvier 2004