peines de travail d'intérêt général
Question de :
M. Jean-Christophe Lagarde
Seine-Saint-Denis (5e circonscription) - Union pour la Démocratie Française
M. Jean-Christophe Lagarde appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les conditions d'utilisation du travail d'intérêt général (TIG) comme sanction alternative avec la peine d'emprisonnement. A l'heure où les conditions d'incarcération sont rendues très difficiles par suite d'une surcharge des effectifs, il lui demande si des dispositions peuvent être prises pour faciliter le choix d'une telle sanction qui peut avoir un triple avantage, pratique, utilitaire et éducatif, sans porter atteinte aux mesures prévues pour assurer la sécurité des personnes et des biens.
Réponse publiée le 29 décembre 2003
Le garde des sceaux, ministre de la justice, a l'honneur de faire connaître à l'honorable parlementaire qu'il partage son souci de voir se développer les peines de travail d'intérêt général qui, tout en présentant un caractère de sévérité, participent de la réinsertion du condamné par le travail et de la prévention de la récidive. Il convient tout d'abord de citer quelques éléments statistiques sur les peines de travail d'intérêt général. Qu'il soit prononcé seul à titre de peine principale ou associé à un sursis, le travail d'intérêt général a connu une baisse régulière depuis ces cinq dernières années : 23 541 peines de travail d'intérêt général étaient prononcées en 1996, 17 658 en 2001. Il a représenté 4,1 % de l'ensemble des condamnations prononcées en 2001. Au vu de ces données statistiques, le garde des sceaux entend insuffler une nouvelle dynamique au travail d'intérêt général sans toutefois remettre en question certaines exigences propres à cette peine. En effet, la Convention européenne des droits de l'homme, en son article 4, proscrit le travail forcé ou obligatoire. Dans ces conditions, la présence du prévenu à l'audience et son acquiescement à la peine prononcée est obligatoire conformément aux articles 131-8 et 132-54 du code pénal. De plus, comme cette peine constitue l'exécution d'un travail, l'article 131-23 du code pénal prévoit qu'elle est soumise aux prescriptions législatives et réglementaires relatives au travail de nuit, à l'hygiène, à la sécurité ainsi qu'au travail des femmes et des jeunes travailleurs. En dehors de ces dispositions non modifiables, la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice favorise le recours à cette peine en étendant à deux nouvelles infractions la possibilité de prononcer une peine de travail d'intérêt général. D'une part, l'article 24 modifie les articles 322-1, 322-2 et 322-3 du code pénal pour permettre de prononcer, en sus d'une peine d'amende, une peine de travail d'intérêt général à l'encontre de l'auteur d'inscriptions, de signes ou de dessins, sans autorisation préalable sur les façades, les véhicules, les voies publiques ou le mobilier urbain. D'autre part, l'article 45 modifie l'article 433-5 du code pénal en punissant d'une peine d'emprisonnement les peines encourues en cas d'outrages à une personne chargée d'une mission de service public lorsque les faits ont été commis à l'intérieur d'un établissement scolaire ou éducatif ou à ses abords et permet ainsi à la juridiction de jugement de prononcer, à titre d'alternative à l'emprisonnement, une peine de travail d'intérêt général. Afin également de diversifier les postes de travail d'intérêt général et de faciliter leur mise en oeuvre, des instructions ont été données aux procureurs de la République de développer en concertation avec les juges de l'application des peines et les services pénitentiaires d'insertion et de probation un partenariat avec les collectivités locales, notamment dans le cadre des contrats locaux de sécurité et de prévention de la délinquance. En dernier lieu, il convient de souligner que M. Jean-Luc Warsmann, député, chargé par le Premier ministre de conduire une réflexion sur les modalités d'exécution des courtes peines et sur les alternatives à l'incarcération, a proposé dans son rapport du 28 avril 2003 un programme national de relance du travail d'intérêt général. Dans le prolongement de ce rapport, le projet de loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, en cours de discussion devant le Parlement, a d'ores et déjà intégré un grand nombre de modifications législatives afin de favoriser le recours à la peine de travail d'intérêt général. Ce projet, adopté par l'Assemblée nationale en deuxième lecture le 27 novembre 2003, prévoit notamment de donner au juge d'application des peines le pouvoir de convertir une peine d'emprisonnement ferme en une peine d'emprisonnement assortie d'un sursis avec obligation d'effectuer un travail d'intérêt général, alors que cette faculté appartenait jusqu'ici au tribunal correctionnel, qui devait être ressaisi par requête. Ce transfert de compétence au profit du juge de l'application des peines, qui simplifierait la procédure de conversion, serait de nature à favoriser le prononcé du travail d'intérêt général, au cours de la phase post-sentencielle, en tant qu'alternative à l'emprisonnement. Le projet de loi contient en outre des dispositions tendant à crédibiliser la peine de travail d'intérêt général, afin de favoriser à la fois son prononcé et sa mise à exécution. A cet effet, il est prévu de transférer du tribunal correctionnel au juge de l'application des peines le pouvoir de révocation du sursis avec obligation d'effectuer un travail d'intérêt général en cas d'inexécution volontaire du travail par le condamné. Cette simplification de la procédure de révocation serait de nature à dissuader plus fortement les condamnés de se soustraire à l'exécution du travail, et à améliorer le taux d'exécution de cette peine. Une disposition supplémentaire du texte vise à renforcer la crédibilité du travail d'intérêt général prononcé en tant que peine principale, qui permettrait au tribunal prononçant une telle sanction de fixer simultanément la peine maximale encourue en cas de non-accomplissement du travail, et qui confierait au juge de l'application des peines la détermination ultérieure de cette peine en cas d'inexécution.
Auteur : M. Jean-Christophe Lagarde
Type de question : Question écrite
Rubrique : Droit pénal
Ministère interrogé : justice
Ministère répondant : justice
Dates :
Question publiée le 10 novembre 2003
Réponse publiée le 29 décembre 2003