mort
Question de :
M. Éric Jalton
Guadeloupe (1re circonscription) - Députés n'appartenant à aucun groupe
M. Éric Jalton appelle la bienveillante attention de Mme la ministre de l'outre-mer sur les difficultés existant en matière de rapatriement des dépouilles mortuaires des ultramarins morts en France, mais désireux d'être inhumés dans leur région d'origine. Depuis quelques mois, les énergies se mobilisent autour du thème de la continuité territoriale entre les départements d'outre-mer (DOM) et la France hexagonale. Les enjeux sont cruciaux. En effet, la distance séparant les départements d'outre-mer et la France métropolitaine induisent des surcoûts de transport notables, aussi bien pour le déplacement des hommes que des marchandises. D'un point de vue strictement économique, les implications sont importantes puisqu'elles se concrétisent par un renchérissement des importations et une grande difficulté pour les exportateurs des DOM à atteindre un certain niveau de compétitivité sur les marchés à l'exportation. Sur le plan humain, c'est essentiellement la problématique de la formation qui est au coeur du débat. Un certain nombre de mesures dont les bourses d'État et le passeport mobilité permettent actuellement aux jeunes de poursuivre leur formation dans l'Hexagone ou dans une autre collectivité territoriale. Toutefois, un autre aspect humain est pour l'heure totalement occulté : il s'agit de l'importance des frais occasionnés par les opérations de rapatriement des dépouilles mortuaires de la France hexagonale vers les DOM ou en sens contraire. Assurer de façon continue l'égalité de tous à la naissance et face à la mort devrait pourtant constituer une ambition démocratique forte, mais force est de constater que ce n'est pas le cas. Les populations potentiellement concernées par ce problème sont importantes : il s'agit des 800 000 personnes originaires des DOM qui résident de manière continue ou occasionnelle dans l'Hexagone. S'il est évident qu'une part non négligeable de cette population est native de France métropolitaine, les personnes originaires d'outre-mer de la première et de la deuxième génération peuvent légitimement aspirer à être inhumées dans leur département d'origine. De même, plusieurs milliers d'individus originaires des DOM se rendent en métropole pour des motivations diverses (poursuite d'études, vacances, soins médicaux,...). En cas de disparition subite, leurs proches se retrouvent dans une situation particulièrement délicate, car les dépenses afférentes à un rapatriement de la dépouille n'avaient pas été anticipées. Si le prix d'un aller-retour entre Paris et Pointe-à-Pitre ou Fort-de-France peut avoisiner 650 euros en période creuse, le transport d'une dépouille mortuaire entre ces mêmes villes dépasse allègrement 3 800 euros, soit un rapport de un à six environ, auxquels s'ajoutent les frais d'obsèques sur place et ce, quelle que soit la saison. La situation est encore plus dramatique en Guadeloupe compte tenu de sa nature archipélagique. Du fait de la double insularité de ce département, une dépouille mortuaire provenant de l'Hexagone doit d'abord transiter par l'île principale avant d'être expédiée vers la dépendance d'origine du défunt, augmentant du même coup les frais de transport du corps. En Guyane, c'est l'enclavement qui est source d'augmentation du coût du transport à la charge des familles. Actuellement, en prévision du décès d'un de leurs proches, il n'est pas rare que des familles épargnent des sommes conséquentes pour prévoir le transfert du corps de leur défunt. Mais dans le cas de la disparition subite d'un proche en déplacement en métropole, les familles, prises de court, connaissent de grandes difficultés à affronter la froideur et la réalité des coûts de transport. Compte tenu du poids de la tradition et du respect dû aux morts dans les sociétés ultramarines, c'est souvent l'accomplissement des dernières volontés du défunt qui prévaut et donc le retour dans la région d'origine du corps de la personne décédée. Les ultimes souhaits des disparus peuvent donc placer dans un profond désarroi financier les familles confrontées à une situation de deuil toujours délicate à vivre. Lorsque, pour des raisons financières, l'inhumation a lieu sur le territoire métropolitain, les familles résidant dans les DOM doivent faire face à l'absence de lieu de recueillement et de souvenir pour commencer le deuil de l'être cher. L'existence de cet obstacle financier n'est plus tolérable en ce début de XXIe siècle parce qu'il va à l'encontre du principe de liberté des funérailles énoncé dans la loi de 1887. En effet, dans ce cas, le lieu d'inhumation n'est plus choisi mais dicté par des préoccupations économiques pour les familles touchées par la disparition d'un de leurs proches. Après la crise dramatique de cet été, et alors que nos compatriotes s'interrogent sur le respect dû aux disparus, il devient impérieux que les débats sur la continuité territoriale prennent en compte les conditions actuelles du rapatriement des dépouilles mortuaires vers l'outre-mer. Il est urgent que des mesures allant dans le sens de la réduction des frais de transfert de corps soient envisagées au niveau des pouvoirs publics. C'est la raison pour laquelle il lui demande de lui communiquer les dispositions qu'elle compte prendre pour faire face à cette situation.
Réponse publiée le 2 mars 2004
Le rapatriement des dépouilles mortuaires des ultramarins décédés en métropole évoqué par l'honorable parlementaire est en effet un problème douloureux pour les familles, en particulier lorsque le décès est subit et imprévisible. Il convient de faire la distinction entre cette réalité et celle concernant le rapatriement des dépouilles d'ultramarins venus en déplacement momentané en métropole et décédés sur place. Cette situation est de même nature que celle que peut avoir à connaître toute personne partant en vacances, que son lieu de destination soit sur le sol national ou à l'étranger. Il existe en ce cas des dispositifs assuranciels permettant de couvrir ce « risque » et prévoyant notamment la prise en charge du rapatriement de la dépouille mortuaire. Il appartient en ce cas à chacun de prendre ses dispositions personnelles pour couvrir ce risque possible. D'une manière générale, le rapatriement des dépouilles mortuaires est toujours difficile et financièrement d'un coût élevé, compte tenu de son caractère d'urgence et des mesures réglementaires, notamment sanitaires, qui doivent être alors respectées, et ce que ce soit en métropole ou outre-mer et davantage encore entre la métropole et l'outre-mer. La mise en place au niveau national d'un dispositif d'aide au rapatriement des dépouilles mortuaires ne saurait par ailleurs s'envisager uniquement au seul profit des ultramarins, sans porter atteinte au principe d'égalité. C'est pourquoi, il apparaît que le recours individuel préventif aux dispositifs de garantie décès développés par les compagnies d'assurance constitue le moyen de prévention pour tout un chacun le plus efficace, que l'on soit en métropole ou outre-mer. Il est à noter la décision récente prise par le conseil général de Mayotte, qui a inscrit à son budget 2004 une ligne provisionnelle à fin de remboursement aux familles des frais de rapatriement à Mayotte des corps de personnes de nationalité française ou en situation régulière de séjour décédées suite à une évacuation sanitaire à la Réunion ou en métropole.
Auteur : M. Éric Jalton
Type de question : Question écrite
Rubrique : Outre-mer
Ministère interrogé : outre-mer
Ministère répondant : outre-mer
Dates :
Question publiée le 17 novembre 2003
Réponse publiée le 2 mars 2004