Question écrite n° 2920 :
mariage

12e Législature

Question de : M. Jean-Yves Hugon
Indre (1re circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Jean-Yves Hugon appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les difficultés que rencontrent les maires dans l'exercice de leur office ministériel à propos du mariage de certains étrangers. L'article 9 de la loi n° 81-973 du 29 octobre 1981 a abrogé les dispositions de l'article 13 de la loi du 2 novembre 1945 relatives aux conditions exigées pour le mariage de certains étrangers. En effet ces textes font obligation au maire, en sa qualité d'officier d'état civil, de procéder au mariage de personnes remplissant des conditions formelles pour ce faire, même si elles se trouvent en situation irrégulière au regard des lois sur l'immigration. Ces dispositions procèdent des conventions ratifiées par la France, notamment aux articles 12 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, qui consacrent le caractère fondamental de la liberté du mariage et l'interdiction d'y porter atteinte en se fondant sur l'origine nationale des intéressés. De ce fait, le maire, prononçant le mariage, régularise la situation de l'étranger en lui conférant la nationalité française. Il en va de même lorsqu'il apparaît que des réseaux ont pour objectif l'acquisition de la nationalité française. Le maire ne dispose d'aucun pouvoir d'appréciation. Il lui demande si le Gouvernement envisage la révision des textes de références pour assainir ces pratiques et s'il serait possible de donner des directives aux procureurs de la République pour entreprendre à la demande des maires des investigations dont le résultat leur donnerait l'assurance de la régularité républicaine au mariage.

Réponse publiée le 16 décembre 2002

Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que la question des mariages dits de complaisance doit être envisagée au regard du respect du double principe de la liberté du mariage et de la sauvegarde de l'ordre public. En effet, le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 93-325 du 13 août 1993 a retenu la valeur constitutionnelle de la liberté du mariage, composante de la liberté individuelle, figurant parmi les libertés et droits fondamentaux reconnus à tous ceux qui résident sur le territoire de la République. Si le respect de ce principe fondamental s'oppose à ce que la célébration du mariage soit conditionnée par la régularité du séjour du futur conjoint sur le territoire français, pour autant il ne fait pas obstacle à ce que soient prises des mesures pour lutter contre les mariages simulés ayant pour seul objet l'obtention d'un droit de séjour ou l'acquisition de la nationalité française. A cet égard, il convient d'observer que le mariage n'a pas d'effet de plein droit. L'acquisition de la nationalité française est subordonnée, aux termes de l'alinéa 1er de l'article 21-2 du code civil, à la souscription d'une déclaration après écoulement d'un délai d'un an à compter de l'union et à la condition qu'à cette date la communauté de vie n'ait pas cessé entre les époux. Par ailleurs, dans le cadre de la constitution du dossier de mariage, l'officier d'état civil dispose d'un certain droit de contrôle et de vérification. A ce titre, l'officier d'état civil appelé à célébrer un mariage doit s'assurer que les conditions de fond et de forme posées par la loi sont remplies en examinant avec soin les pièces qui lui sont remises. Dans cette perspective, la loi n° 93-1417 du 30 décembre 1993 portant diverses dispositions relatives à la maîtrise de l'immigration de laquelle résulte notamment l'article 175-2 du code civil instaure un mécanisme de contrôle préventif destiné à donner à l'officier de l'état civil et à l'autorité judiciaire les moyens de prévenir les mariages de complaisance. Lorsqu'il existe des présomptions sérieuses sur l'existence ou la validité du consentement des époux qui ne se prêteraient à la cérémonie du mariage que dans un but étranger à l'union matrimoniale, l'officier d'état civil dispose, en effet, de la faculté de saisir le procureur de la République lequel peut surseoir à la célébration du mariage pendant un délai maximum d'un mois aux fins d'enquête. Il est vrai qu'en raison de la diversité et de la complexité des situations l'enquête à laquelle il est procédé par le procureur de la République ne permet pas toujours de démontrer l'absence d'intention matrimoniale des futurs conjoints. C'est pourquoi, dans le cadre plus général de la lutte contre la fraude tant en matière d'état civil que d'accès à la nationalité française, un renforcement du dispositif applicable aux mariages simulés, en particulier s'agissant des mariages célébrés à l'étranger, fera l'objet d'un examen interministériel dans le souci de mieux concilier la liberté matrimoniale et la sauvegarde de l'ordre public.

Données clés

Auteur : M. Jean-Yves Hugon

Type de question : Question écrite

Rubrique : Famille

Ministère interrogé : justice

Ministère répondant : justice

Dates :
Question publiée le 16 septembre 2002
Réponse publiée le 16 décembre 2002

partager