Chine
Question de :
M. Hervé Mariton
Drôme (3e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Hervé Mariton appelle l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la situation des droits de l'homme en Chine, laquelle n'a pas beaucoup évolué depuis la répression sanglante de Tienanmen en 1989. Bien au contraire, la répression a continué aussi bien pour les minorités ethniques et religieuses (Tibet) que pour les « libres penseurs », journalistes et cyberdissidents politiques condamnés, emprisonnés tel que Yang Jianli, Zhang Shengqi ou Ouyang Yi, pour ne citer que les plus récents. D'autre part, les promesses de réformes annoncées par la Chine n'ont pas été suivies d'une réelle concrétisation comme d'ailleurs il sera rappelé lors de la prochaine session de la commission des droits de l'homme de l'ONU. La situation actuelle, plus que préoccupante, est par conséquent en totale contradiction avec les critères 2 et 4 du code de conduite de l'ONU. Dans un tel contexte, et après la visite du président chinois Hu Jintao en janvier dernier, l'initiative de la levée de l'embargo européen sur la vente d'armes à la Chine est-elle opportune ? Il convient donc de s'interroger sur une telle initiative alors que les conséquences sur la stabilité régionale, notamment dans le détroit de Taïwan, pourraient être des plus dramatiques si elle s'accompagnait, par exemple, d'une relance de la course aux armements de part et d'autre du détroit. Il convient aussi de préciser ce que serait la nature des matériels militaires vendus et la cohérence de ces ventes futures avec notre propre sécurité, au regard notamment de notre doctrine de dissuasion nucléaire. Il lui demande donc comment la France évalue les risques que comporterait une éventuelle levée d'embargo.
Réponse publiée le 15 février 2005
Dans le domaine des droits de l'homme, la situation en Chine est contrastée. Elle a cependant indéniablement progressé au cours des dix dernières années dans le domaine socio-économique et l'allègement des contrôles de l'administration dans la vie privée des citoyens s'est traduit par l'ouverture de réels espaces de liberté. En matière de droits politiques, l'inscription de la notion de respect des droits de l'homme dans la constitution chinoise en mars 2004 et l'annonce, renouvelée lors du sommet UE/Chine du 8 décembre, d'une ratification par la Chine du Pacte des Nations Unies sur les droits civils et politiques dans les meilleurs délais constituent des signaux encourageants. La France est vigilante sur la situation des droits de l'homme en Chine. Cette vigilance est exprimée au plus haut niveau lors des entretiens bilatéraux avec les autorités chinoises. Ce fut notamment le cas à l'occasion de la visite d'État du Président de la République en Chine, en octobre 2004. Le chef de l'État a indiqué que la France souhaitait voir les progrès économiques et sociaux enregistrés en Chine s'accompagner de progrès équivalents dans les domaines de l'État de droit et de la démocratie. Une liste de prisonniers de conscience en faveur desquels la France appelle à des mesures de clémence a été remise à la partie chinoise à l'occasion de cette visite. Parallèlement à ces interventions politiques, c'est dans un esprit volontairement constructif que la France entend contribuer de manière concrète à l'amélioration de la situation des droits de l'homme en Chine. Ainsi, nous conduisons une coopération juridique orientée notamment vers la formation de professionnels du droit (juges, procureurs, avocats), afin de renforcer la construction de l'État de droit et d'accompagner la réforme du système judiciaire chinois vers les standards internationalement reconnus. Dans ce contexte, le maintien de l'embargo européen sur les ventes d'armes à la Chine n'apparaît pas comme une mesure susceptible de faire progresser plus rapidement la question des droits de l'homme en Chine. L'embargo a été mis en place par l'Union européenne en 1989. Depuis cette date, les relations entre l'Union européenne et la Chine se sont approfondies, les échanges se sont multipliés dans tous les domaines, qu'ils soient politiques, économiques, financiers ou culturels. Cette évolution a, notamment, conduit l'Union européenne à reconnaître la Chine comme un partenaire stratégique. Dans ce contexte, la levée de l'embargo européen apparaît comme une mesure de nature politique qui symboliserait le nouvel état des relations qu'entretiennent désormais l'Union européenne et la Chine. Les embargos européens ne s'appliquent aujourd'hui qu'à de rares pays avec lesquels l'UE n'entretient que des relations minimales sans commune mesure avec le partenariat développé avec la Chine. Il s'agit donc d'un problème de cohérence. Prenant acte de ces évolutions, les chefs d'État et de gouvernement ont demandé en décembre 2003 aux ministres des affaires étrangères de l'Union d'étudier cette question et de parvenir à une solution qui soit conforme à la nature des liens que l'Union entretient désormais avec un partenaire majeur pour elle. Les discussions menées depuis lors ont montré que la quasi-totalité des États membres estiment que l'embargo est désormais une mesure dépassée. Les modalités de sa levée continuent d'être débattues entre partenaires européens. En tout état de cause, celle-ci n'impliquera pas de modifications majeures en matière de ventes d'armes à la Chine. Les régimes nationaux de contrôle des exportations, français en particulier, et le code de conduite européen sur les ventes d'armes continueront de s'appliquer et constitueront un cadre de nature à éviter tout dérapage. Ces dispositifs, tant nationaux qu'européens, permettent en effet de prendre en compte la préservation des équilibres stratégiques et les intérêts de sécurité de nos alliés. Dans ce contexte, les chefs d'État et de gouvernement de l'Union ont réaffirmé, lors du conseil européen du 17 décembre 2004, la volonté politique de l'Union européenne de travailler à la levée de l'embargo et invité la prochaine présidence à finaliser les discussions en cours en vue de permettre une décision sur cette question.
Auteur : M. Hervé Mariton
Type de question : Question écrite
Rubrique : Commerce extérieur
Ministère interrogé : affaires étrangères
Ministère répondant : affaires étrangères
Dates :
Question publiée le 27 avril 2004
Réponse publiée le 15 février 2005