Question écrite n° 39209 :
peines

12e Législature

Question de : Mme Martine Lignières-Cassou
Pyrénées-Atlantiques (1re circonscription) - Socialiste

Mme Martine Lignières-Cassou souhaite attirer l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le traitement pénal de la petite délinquance. Les peines de prison ferme pour des délits mineurs semblent de plus en plus fréquentes et le nombre de détenus dans les prisons françaises est en explosion. L'augmentation du nombre de récidivistes laisse penser que la politique pénale actuelle du Gouvernement qui consiste à renforcer le système pénitencier ne soit pas la solution la mieux adaptée au traitement de la délinquance. La lecture du livre de Dominique Simonnot sur la Justice en France est à ce titre particulièrement intéressante pour mesurer l'inefficacité des peines de prison ferme prononcées à l'encontre des multi-récidivistes qui perçoivent désormais la prison comme une étape ordinaire dans leur parcours criminel. La prison n'est pas vécue comme un espace de réinsertion dans la société mais simplement comme une mise à l'écart temporaire censée protéger la société, quand bien même les conséquences sont bien plus néfastes à moyen et long terme. Elle lui demande en conséquence de lui préciser la nature des peines de substitution dont dispose la justice, la proportion de condamnés en bénéficiant, et les résultats obtenus en la matière. Elle lui demande également de lui présenter l'analyse du Gouvernement face à l'augmentation continue du nombre de détenus en parallèle avec l'augmentation de 10 % pour le premier trimestre 2004 des crimes et délits contre les personnes.

Réponse publiée le 7 mars 2006

Le garde des sceaux, ministre de la justice, a l'honneur de faire connaître à l'honorable parlementaire qu'il ne partage pas son analyse sur le traitement judiciaire des délinquants récidivistes. Il lui semble, en effet, que si la délinquance a baissé de manière importante ces trois dernières années, il reste aujourd'hui un noyau dur de délinquants d'habitude pour lesquels la loi n'était pas suffisamment dissuasive. En conséquence, la loi du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions pénales rend les sanctions plus dissuasives pour les récidivistes. À cet effet, le nombre de sursis avec mise à l'épreuve pouvant être prononcé cumulativement est limité, la circonstance aggravante de récidive peut être relevée directement par le tribunal, les peines d'emprisonnement prononcées à l'égard des récidivistes peuvent être assorties du mandat de dépôt quelle que soit la peine prononcée. Toutefois, cette plus forte répression à l'égard des récidivistes ne fait pas obstacle au développement des peines de substitution pour les autres condamnés. Les éléments statistiques indiquent d'ailleurs que la part des emprisonnements fermes dans les condamnations connaît une baisse régulière depuis 2001 : elle était de 25,77 % en 2002, 24,31 % en 2003 et 21,33 % en 2004. Les chiffres de 2005 ne sont pas à ce jour disponibles. Des dispositions législatives récentes tendent à favoriser le développement des peines de substitution. Ainsi, la loi du 9 mars 2004, en assurant une mise à exécution plus rapide des peines de sursis avec mise à l'épreuve et de sursis assorti de l'exécution d'un travail d'intérêt général par la notification des obligations à l'audience et par la remise d'une convocation devant le service pénitentiaire d'insertion et de probation, incite au prononcé des peines alternatives à l'incarcération. Plus généralement, la mise en place des bureaux de l'exécution des peines, dans l'ensemble des juridictions au cours de l'année 2006, doit conduire à favoriser le prononcé de peines de substitution à l'audience correctionnelle en assurant une mise en oeuvre plus rapide de leur exécution. S'agissant du travail d'intérêt général, des instructions ont été données aux procureurs de la République de développer en concertation avec les juges de l'application des peines et les services pénitentiaires d'insertion et de probation un partenariat avec les collectivités locales, notamment dans le cadre des contrats locaux de sécurité et de prévention de la délinquance afin de diversifier les postes de travail d'intérêt général et de faciliter leur mise en oeuvre. Enfin, la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, en favorisant la discussion autour de la peine, vient au soutien du prononcé de peines de substitution. D'une manière générale, du travail d'intérêt général à la suspension du permis de conduire en passant par le sursis avec mise à l'épreuve, le stage de citoyenneté, ou la peine de jour-amende, les peines autres que l'emprisonnement qu'une juridiction pénale peut prononcer sont nombreuses et diversifiées, et permettent une réelle individualisation de la peine en fonction du délit commis et de la personnalité du condamné. En ce qui concerne le taux d'occupation des établissements pénitentiaires, le garde des sceaux fait savoir à l'honorable parlementaire que cette situation retient toute son attention. Il rappelle néanmoins que d'un point de vue juridique, l'article 707 du code de procédure pénale, issu de la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, pose le principe de l'aménagement des peines d'emprisonnement afin d'éviter une libération sans aucun suivi judiciaire. Parallèlement, l'amélioration des conditions d'incarcération passe par la construction de nouveaux établissements. Ainsi, la loi d'orientation et de programmation du 9 septembre 2002, établie pour les cinq années suivantes, a donné au ministère de la justice les moyens financiers qui lui faisaient défaut pour mettre en oeuvre une politique de construction de 7 000 places nouvelles et le remplacement de 4 000 autres. L'ouverture en 2007 des premiers établissements pénitentiaires de ce programme permettra d'améliorer les conditions de vie carcérale des personnes détenues.

Données clés

Auteur : Mme Martine Lignières-Cassou

Type de question : Question écrite

Rubrique : Droit pénal

Ministère interrogé : justice

Ministère répondant : justice

Dates :
Question publiée le 11 mai 2004
Réponse publiée le 7 mars 2006

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