Question écrite n° 44359 :
lutte contre l'exclusion

12e Législature

Question de : M. Claude Goasguen
Paris (14e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Claude Goasguen attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur la lutte contre la prostitution. La loi du 18 mars 2003 a donné des moyens supplémentaires de lutte contre la prostitution. Il aimerait donc connaître le bilan quantitatif des effets de cette loi, et plus particulièrement à Paris, où la prostitution ne connaît pas vraiment de recul. Cette loi ayant également donné des objectifs qualitatifs de cette lutte contre la prostitution, il aimerait connaître les mesures d'accompagnement des prostituées, ainsi que les résultats de la politique de prévention.

Réponse publiée le 1er février 2005

La traite des êtres humains est un phénomène dégradant qui porte une atteinte inacceptable à la dignité humaine. L'implantation de plus en plus visible sur le territoire national de réseaux internationaux de traite des êtres humains liés à la criminalité organisée a conduit le législateur à prendre des dispositions importantes. Ainsi, la loi du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure (LSI) a introduit dans le code pénal de nouveaux articles renforçant les moyens de lutte contre la prostitution. L'article 32 de cette loi crée une nouvelle incrimination définie et réprimée par les articles 225-4-1 à 225-4-8 du code pénal qui décline des circonstances aggravantes propres à la victime, à l'auteur et aux modalités de réalisation de l'infraction. L'article 76 de cette même loi instaure la possibilité de délivrance d'une autorisation provisoire de séjour à l'étranger dans certains cas : dépôt de plainte à l'encontre d'une personne pour avoir été victime d'une infraction de traite des êtres humains ou de proxénétisme ; témoignage dans une procédure pour ces mêmes faits. Les conditions d'application de ces dispositions seront précisées par décret. La mesure la plus significative, par son aspect préventif et répressif, vient sans doute de l'article 50 de ce texte, qui fait du racolage un délit défini et réprimé par l'article 225-10-1 du code pénal. Ainsi d'avril à décembre 2003, 3 181 procédures de racolage ont été établies par les services de police et de gendarmerie sur l'ensemble du territoire national (dont 1 726 à Paris), soit 2 425 personnes se répartissant comme suit : 2 185 femmes (90,1 %) et 240 hommes (9,9 %) ; 16,25 % de ressortissants français et 83,75 % d'étrangers. Au premier semestre 2004, 2 438 procédures de racolage ont été établies par les mêmes services, dont 1 587 à Paris. En 2003, 140 prostituées ont obtenu une autorisation provisoire de séjour dans le cadre de ces nouvelles dispositions, leur coopération ayant permis le démantèlement d'un nombre significatif de réseaux : 265 étrangers et étrangères ont été visés par une décision de reconduite à la frontière en application de la loi du 18 mars 2003. À Paris, 1 732 personnes ont été interpellées pour des faits de racolage public en 2003 et 569 d'entre elles, dont 89 % d'origine étrangère et 0,1 % mineures, ont été déférées au parquet. Dans la capitale, pour les sept premiers mois de l'année 2004, 2 202 prostituées, dont 77,7 % d'origine étrangère et 6,6 % mineures, ont déjà fait l'objet d'une interpellation pour faits de racolage public. À titre de comparaison, en 2002, seules 217 procédures contraventionnelles avaient été établies pour racolage actif par les services de police. S'agissant de la lutte contre le proxénétisme, 88 procédures ont été réalisées depuis le début de l'année 2004 et ont donné lieu à 95 défèrements devant l'autorité judiciaire. En outre, depuis le mois d'avril 2004, les services de police se sont spécialement attachés à la lutte contre le racolage des prostituées mineures. Dès lors que ce délit est constitué, les mineures sont placées en garde à vue et non plus prises en compte en tant que « mineur en danger moral ». À titre d'illustration, les actions menées à Paris par l'unité de soutien aux investigations territoriales, créée à la mi-octobre 2003 et dépendant de la direction de la police urbaine de proximité, ont permis d'interpeller 114 mineures qui ont été mises à la disposition de la brigade de protection des mineurs. Parallèlement à ces interventions, des infractions ont été relevées à l'encontre de « clients » en compagnie de prostituées mineures. Ils ont été placés en garde à vue et déférés au parquet. L'ensemble des actions ainsi menées a conduit à une diminution de 58 %, par rapport à septembre 2003, de la présence des prostituées sur la voie publique, notamment sur les boulevards des Maréchaux. Par ailleurs, de janvier à juillet 2004, 378 arrêtés préfectoraux de reconduite à la frontière ont déjà été pris par le préfet de police à l'encontre de prostituées étrangères. Parmi celles-ci, 149 ont fait l'objet d'un éloignement. Si les actions conduites par les services de police dans le cadre de ces nouvelles dispositions législatives ont pour objectif de sanctionner les délits flagrants de racolage et de lutter contre le proxénétisme, il n'en demeure pas moins qu'elles s'accompagnent toujours d'une proposition d'assistance sociale et d'aide à la réinsertion aux prostituées interpellées qui le désirent. Les services de police travaillent de manière très étroite avec les différentes associations d'aide aux victimes de la prostitution, notamment pour la prise en charge des personnes qui souhaitent échapper à cette activité. Par ailleurs, l'office central pour la répression de la traite des êtres humains est engagé dans deux actions dans le cadre de programmes européens regroupés au sein d'un programme cadre unique « AGIS », qui s'adresse aux praticiens de la justice, aux services de la police et des douanes, aux services chargés de la prévention de la criminalité et aux services chargés de la lutte contre le trafic des êtres humains : la première action, en partenariat avec l'organisation internationale pour les migrations, a pour objectif la mise en place d'un réseau et d'une session de formation commune en faveur de représentants des forces de l'ordre, d'ONG et d'organisations internationales impliquées dans la lutte contre la traite des êtres humains dans les États membres de l'Union européenne, les pays candidats à l'accession et les États situés aux frontières de l'Union européenne après le processus d'élargissement ; la seconde, en partenariat avec l'association française ALC (Association lieu d'écoute, carrefour éducatif et social), a pour mission l'accueil sécurisé des victimes. Le projet prévoit le repérage, l'échange, la comparaison et l'évaluation d'expériences et de bonnes pratiques en matière de coopération multidisciplinaire pour la protection des victimes de la traite des êtres humains. Par ailleurs, l'article 52 de la LSI dispose qu'à compter de 2004 le Gouvernement déposera chaque année sur le bureau du Parlement un rapport faisant état de l'évolution de la situation démographique, sanitaire et sociale des personnes prostituées ainsi que des moyens dont disposent les associations et les organismes qui leur viennent en aide. En outre, le code de l'action sociale et des familles prévoit, dans chaque département, la création d'un service social ayant pour mission de rechercher et d'accueillir les personnes en danger de prostitution.

Données clés

Auteur : M. Claude Goasguen

Type de question : Question écrite

Rubrique : Politique sociale

Ministère interrogé : intérieur

Ministère répondant : intérieur

Dates :
Question publiée le 20 juillet 2004
Réponse publiée le 1er février 2005

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