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Question de :
M. François Rochebloine
Loire (3e circonscription) - Union pour la Démocratie Française
M. François Rochebloine attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la sévérité des sanctions pénales encourues en cas de téléchargement non autorisé d'oeuvres cinématographiques ou musicales par des utilisateurs d'Internet. Lorsque l'on connaît la facilité avec laquelle ces copies peuvent être effectuées et le nombre de jeunes ayant recours au téléchargement, l'importance des sanctions encourues peut surprendre. L'article 335-4 du code de la propriété intellectuelle prévoit en effet trois ans d'emprisonnement et 300 000 euros d'amende. Á titre de comparaison, l'article L. 311-3 du code pénal prévoit que le vol est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende. Le montant de l'amende encourue dans chaque cas laisse ainsi supposer qu'il est par exemple beaucoup moins grave d'être un voleur de voiture qu'un « voleur d'images » ou un « voleur de musique ». Il laisse surtout penser que la sanction est avant tout liée à l'ampleur des enjeux économiques, et non à la gravité de l'infraction commise. Ceci pose le problème de la cohérence des sanctions dans notre système répressif. Compte tenu de l'impact dans l'esprit collectif - et en particulier chez les jeunes - que peut avoir le risque de voir prononcer des sanctions aussi sévères pour téléchargements non-autorisés, il y a lieu de se demander s'il n'y aurait pas nécessité de faire preuve en la matière d'une plus grande mesure.
Réponse publiée le 28 septembre 2004
Le téléchargement illégal d'oeuvres cinématographiques ou musicales par les utilisateurs d'Internet constitue effectivement un délit passible des peines prévues à l'article L. 335-4 du code de la propriété intellectuelle. Cet article a été modifié par la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité en vue de renforcer la lutte contre la délinquance organisée. C'est dans ce but que la circonstance aggravante de bande organisée a été insérée dans le dispositif afin de réprimer plus sévèrement les activités relevant de réseaux constitués pour réaliser des profits financiers au détriment des entreprises et des auteurs. Par ailleurs, des orientations de politique pénale ont été diffusées à l'ensemble des procureurs généraux et des procureurs de la République, le 9 août 2004, afin de permettre un traitement différencié des infractions en fonction de leur gravité. Il est clair que le téléchargement non autorisé d'un film ou de quelques chansons ne peut faire l'objet du même traitement pénal que l'activité habituelle de piratage. C'est ainsi que les directives adressées aux parquets comprennent des mesures adaptées tant sur le plan des enquêtes que des poursuites. Dans les cas les plus graves, des peines complémentaires telle que la confiscation de tout ou partie des recettes procurées par le délit peuvent être requises. Dans les cas où le degré de gravité de l'infraction est moins marqué, les procureurs de la République peuvent par exemple éviter la mise en mouvement de l'action publique en proposant une mesure de composition pénale. Il convient également de rappeler que les peines d'emprisonnement et d'amende constituent uniquement des plafonds et que les juges du fond fixent le niveau de la peine infligée en fonction de chaque cas d'espèce. L'argument consistant à comparer le régime de protection de la propriété littéraire et artistique à celui applicable en matière de vol, en concluant à la modération relative des sanctions pénales dans ce dernier cas et à la pénalisation excessive dans la première hypothèse apparaît sérieusement contestable dans la mesure où le quantum de la peine d'emprisonnement est nettement supérieur pour le vol : 3 ans, 5 ans, 7 ans ou 10 ans d'emprisonnement pour les faits visés aux articles 311-3 et 311-4 du code pénal, au lieu de 3 ou 5 ans au titre de l'article 335-4 du code de la propriété intellectuelle. Il n'en demeure pas moins que la politique pénale ne peut ignorer le développement des activités illicites de contrefaçon et de piraterie.
Auteur : M. François Rochebloine
Type de question : Question écrite
Rubrique : Propriété intellectuelle
Ministère interrogé : justice
Ministère répondant : justice
Dates :
Question publiée le 20 juillet 2004
Réponse publiée le 28 septembre 2004