Question écrite n° 45154 :
perspectives

12e Législature

Question de : M. Michel Bouvard
Savoie (3e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Michel Bouvard attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la révision souhaitable de l'accord de Rome du 26 novembre 1993 régissant la coopération transfrontalière entre les collectivités locales. Cet accord, conclu conformément aux dispositions prévues dans la convention cadre de Madrid, ne correspond plus aux besoins et notamment à la nécessité de porter de manière conjointe des projets intégrés de développement. Il souhaite donc connaître la manière dont le Gouvernement entend prendre en compte cette préoccupation.

Réponse publiée le 4 juillet 2006

L'État encourage le développement de la coopération décentralisée transfrontalière, notamment par des modifications successives du droit interne. Les dernières modifications législatives sont contenues dans les dispositions de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales et qui comprend deux nouvelles mesures pour faciliter davantage la coopération décentralisée transfrontalière. La première mesure permet aux collectivités territoriales françaises de créer avec des collectivités territoriales étrangères des « districts européens », ayant la personnalité juridique et l'autonomie financière, sur la base de la législation relative aux syndicats mixtes ouverts. Le district européen vient s'ajouter aux organismes de droit français qui peuvent comprendre des collectivités territoriales de pays membres de l'Union européenne : groupements d'intérêt public et sociétés d'économie mixte locales. L'autre mesure de la loi du 13 août 2004 concerne la suppression du décret en conseil d'État pour autoriser l'adhésion des collectivités territoriales françaises à des organismes de droit étranger afin de simplifier et d'accélérer les procédures d'adhésion. Depuis le 1er janvier 2005, cette autorisation est donnée par un arrêté du préfet de région territorialement compétent. Pour ce qui concerne les collectivités territoriales françaises, il convient de rappeler que, dans le cadre de la coopération transfrontalière, elles peuvent adhérer à un organisme public de droit étranger ou participer au capital d'une personne morale de droit étranger dans la limite de 50 % du capital ou des charges de ces organismes, comme l'autorisent les dispositions de l'article L. 1115-4 du code général des collectivités territoriales. Ces dispositions ouvrent donc de larges perspectives pour permettre aux collectivités territoriales françaises et italiennes de créer des organismes de coopération transfrontalière de droit public ou privé italien ayant la personnalité juridique et l'autonomie financière. C'est le cas actuellement de la Conférence des Alpes franco-italiennes (CARI), dont le siège est à Turin, qui réunit six départements français frontaliers et trois provinces italiennes. Par ailleurs, comme le souligne l'honorable parlementaire, la France et l'Italie ont conclu à Rome, le 26 novembre 1993 un accord concernant la coopération transfrontalière entre collectivités territoriales et ont également adhéré à la convention-cadre européenne du conseil de l'Europe sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales du 21 mai 1980, dite « Convention de Madrid ». Ce cadre juridique permet aux collectivités territoriales françaises et italiennes de conclure des conventions qui peuvent avoir pour objet la réalisation ou la gestion d'équipements publics comme, par exemple, la maison franco-italienne du Mont-Cenis qui est gérée en commun par la commune de Lanslebourg-Mont-Cenis (Savoie), la communauté de communes Haute-Maurienne Vanoise (Savoie) et la communauté de montagne de la basse vallée de Suse (Piémont). Ces conventions peuvent également avoir pour objet la création d'organismes de coopération ayant ou non la personnalité juridique. Les organismes de coopération franco-italiens sans personnalité juridique sont nombreux : la commission de travail des Alpes occidentales (COTRAO), qui réunit depuis 1982 les régions Provence-Alpes Côte d'Azur, Rhône-Alpes, Ligurie, Piémont, Val d'Aoste, et trois cantons suisses : Genève, Vaud, Valais, la conférence transfrontalière Mont-Blanc, créée en 1991 entre le syndicat intercommunal « espace nature Mont-Blanc » (Haute-Savoie), la région du Val d'Aoste et le canton suisse du Valais, le groupement des îles de la Méditerranée occidentale (IMEDOC), créé en 1995 entre la collectivité territoriale de Corse, la région autonome de Sardaigne et la communauté autonome des Baléares, la conférence des trois provinces créée en 1997 entre le département des Alpes-Maritimes et les provinces de Cuneo et d'Imperia, le dispositif de coopération des « hautes vallées » créé en 2000 qui réunit des groupements de communes des Hautes-Alpes et de Savoie et des communautés de montagnes italiennes. Pour ce qui concerne la création d'organismes de coopération transfrontalière ayant la personnalité juridique, nous avons interrogé les autorités italiennes en mars 2005 afin qu'elles nous fassent connaître si le droit italien permet aux collectivités territoriales d'adhérer à des districts européens, le protocole additionnel n° 1 à la convention de Madrid pouvant servir de cadre juridique à cet effet lorsque l'Italie l'aura ratifié. Le protocole additionnel n° 1, ouvert à la signature le 9 novembre 1995, est, en effet, applicable pour la France depuis le 5 janvier 2000 mais il n'a pas encore été ratifié par l'Italie qui l'a signé le 5 décembre 2000. Les autorités italiennes ont répondu que les collectivités territoriales italiennes ne peuvent pas adhérer à des organismes de droit public français en l'absence de dispositions constitutionnelles de cette nature. Elles ont indiqué, par ailleurs, que cette question sera réexaminée à l'occasion de l'examen par le Parlement du projet de loi autorisant l'adhésion de l'Italie au protocole n° 1. J'ai donc demandé récemment à notre ambassade à Rome d'interroger les autorités italiennes à ce propos, mais la procédure n'a pas évolué dans l'attente des élections législatives qui ont eu lieu en Italie au mois d'avril 2006. Par conséquent, notre ambassade à Rome suivra attentivement le déroulement de cette procédure dans les mois à venir. Il est utile de préciser, par ailleurs, qu'un cadre juridique pourra également être fourni par le règlement de la Commission européenne relatif à l'institution d'un « groupement européen de coopération territoriale » (GECT), instrument de coopération au niveau communautaire destiné à surmonter les obstacles entravant la coopération transfrontalière, transnationale et interrégionale, qui devrait entrer prochainement en vigueur. Cet instrument communautaire devrait permettre de résoudre les problèmes juridiques qui subsistent pour la création d'organismes de coopération ayant la personnalité juridique compte tenu de la disparité des droits nationaux. Pour toutes ces raisons, il ne me semble pas utile de conclure, pour l'instant, un nouvel accord avec l'Italie destiné à remplacer l'accord du 26 novembre 1993 tant que le droit interne italien n'aura pas évolué.

Données clés

Auteur : M. Michel Bouvard

Type de question : Question écrite

Rubrique : Traités et conventions

Ministère interrogé : affaires étrangères

Ministère répondant : affaires étrangères

Dates :
Question publiée le 3 août 2004
Réponse publiée le 4 juillet 2006

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