Question écrite n° 4799 :
code de procédure pénale

12e Législature

Question de : M. Claude Goasguen
Paris (14e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Claude Goasguen attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la mise en place des procédures de composition pénale. La loi du 9 septembre 2002 précise les conditions de mise en place de la composition pénale et en facilite l'utilisation. Cette mesure étant vivement réclamée par les magistrats et permettant d'accélérer les procédures sans atteinte aux droits des prévenus, il voudrait connaître les modalités d'application de cette nouvelle disposition ainsi que les moyens d'information qui ont été mis en place pour faire connaître cette procédure auprès de la magistrature, de la police, des avocats et des justiciables, l'information étant un élément indispensable d'une véritable pratique nouvelle pour nos traditions juridiques. Il demande quels sont les résultats qu'il convient d'espérer pour ces procédures novatrices. Dans le même ordre d'idées, il aimerait connaître les mesures prévues par la même loi pour développer l'ordonnance pénale, qui permettent elles aussi de sortir de procédures lourdes des contentieux qui peuvent être traitées dans les meilleures conditions de célérité et de justice.

Réponse publiée le 23 novembre 2004

Le garde des sceaux, ministre de la justice, a l'honneur de faire connaître à l'honorable parlementaire qu'il est, comme lui-même, convaincu de l'absolue nécessité de permettre le traitement d'une partie du contentieux pénal selon des procédures moins lourdes et moins complexes que les procédures habituelles, qui exigent notamment la tenue d'une audience devant le tribunal correctionnel, et ce afin de permettre des réponses pénales dans des conditions de célérité et de justice satisfaisantes pour l'ensemble des justiciables, qu'il s'agisse des délinquants ou de leurs victimes. C'est la raison pour laquelle la loi du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice, puis la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité ont successivement simplifié puis étendu et amélioré la procédure de composition pénale. Celle-ci est désormais applicable à l'ensemble des délits punis jusqu'à cinq ans d'emprisonnement, sauf quelques exceptions comme les homicides involontaires, et peut donner lieu à la proposition par le procureur de la République de plus de treize mesures différentes. Celles issues de la loi du 9 mars 2004, comme l'interdiction de séjourner dans certains lieux ou de rencontrer certaines personnes, dont la victime, ont été précisées par le décret n° 2004-1021 du 27 septembre 2004. Ce décret a par ailleurs clarifié les conditions d'habilitation et d'intervention des délégués du procureur de la République, dont le rôle dans la mise en oeuvre de la composition pénale est essentiel. Le succès de la composition pénale, pour laquelle les parquets ont été incités à l'utiliser à chaque fois qu'elle paraissait opportune par plusieurs circulaires, notamment en date du 8 novembre 2002 et du 14 mai 2004, n'est désormais pas contestable. Cette procédure est de plus en plus fréquemment utilisée par les juridictions : il y a en effet été recouru pour 1 511 affaires au cours de l'année 2001, 6 755 en 2002 et 14 788 en 2003. De 2002 à 2003, les compositions pénales réussies ont par ailleurs progressé de plus de 5 000 affaires. La volonté d'améliorer le traitement de la délinquance a également conduit à l'extension, par la loi du 9 septembre 2002, de la procédure de l'ordonnance pénale. Celle-ci n'était auparavant applicable qu'aux contraventions et aux délits prévus par le code de la route, notamment le délit de conduite sous l'empire d'un état alcoolique ou de conduite sans permis ou sans assurance créé par la loi du 9 mars 2004. Celle-ci a par ailleurs amélioré ces dispositions sur plusieurs points, notamment en permettant le recours à l'ordonnance pénale pour les délits en matière de transports terrestres et en permettant la notification des ordonnances par les délégués du procureur de la République. Comme l'indique la circulaire du 14 mai 2004 précitée, une telle notification permet en effet d'expliquer au condamné la nature de la peine prononcée et de l'inciter à ne pas faire opposition. En 2003, plus de 12 500 ordonnances pénales ont été prononcées. Enfin, la volonté d'assurer la célérité et l'efficacité de la justice a conduit à l'institution, par la loi du 9 mars 2004, de la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC), qui est entrée en vigueur le 1er octobre 2004. Cette procédure permet au procureur de la République de proposer une ou plusieurs peine ; jusqu'à un an d'emprisonnement à la personne qui reconnaît avoir commis les faits et qui est déférée ou convoquée devant lui. Si cette personne accepte la ou les peines proposées, celles-ci sont ensuite soumises à l'homologation du président du tribunal de grande instance. La CRPC constitue ainsi le prolongement de la procédure de composition pénale, tout en étant destinée à réprimer des faits plus graves, car elle permet le prononcé de véritables peines. Afin d'assurer le respect de la présomption d'innocence, des droits de la défense et des droits des victimes, cette procédure comporte de nombreuses garanties. Ainsi, la proposition de peine du procureur de la République et le recueil de l'acceptation de la personne - qui peut demander un délai de réflexion de dix jours - doivent impérativement se faire en présence d'un avocat. Les observations de ce dernier peuvent en pratique influencer la proposition du parquet, même si la loi ne prévoit pas, à la différence des systèmes anglo-saxons du plaider coupable, une négociation entre la défense et l'accusation sur la culpabilité et sur la peine, qui serait incompatible avec nos traditions juridiques. Par ailleurs, l'homologation par le président du tribunal fait l'objet d'une audience publique, au cours de laquelle l'avocat de la personne est également présent. La victime peut participer à cette audience en étant assistée par son avocat, afin d'obtenir immédiatement un jugement de condamnation sur ses intérêts civils. Le président ne doit pas se borner à constater l'accord libre et éclairé de l'intéressé, mais doit vérifier la culpabilité de celui-ci, la qualification des faits, et la proportionnalité des peines proposées, ce qui constitue également une importante différence avec les systèmes anglo-saxons. Enfin, en cas d'homologation, la personne dispose d'un droit d'appel. Comme la composition pénale et l'ordonnance pénale, la CRPC diversifie ainsi les modes de réponses pénales face aux actes de petite ou moyenne délinquance, tout en permettant de diminuer les délais de jugement et d'alléger les audiences correctionnelles, qui pourront être consacrées à des affaires plus complexes. Par ailleurs, elle est de nature à conduire au prononcé de peines mieux adaptées, plus efficaces et plus facilement exécutées parce qu'elles seront acceptées par l'auteur du délit. Plusieurs juridictions ont, dès le 1er octobre 2004, utilisé la CRPC dans le cadre du traitement en temps réel des procédures, et de nombreux accords entre les magistrats du siège et ceux du parquet, ainsi qu'avec les avocats, ont été passés ou sont en cours d'élaboration dans d'autres juridictions. Ces accords ont pour objet de déterminer les modalités pratiques d'application des nouvelles dispositions, qui ont été précisées par une circulaire du 2 septembre 2004, et de permettre leur mise en oeuvre dans les meilleures conditions.

Données clés

Auteur : M. Claude Goasguen

Type de question : Question écrite

Rubrique : Droit pénal

Ministère interrogé : justice

Ministère répondant : justice

Dates :
Question publiée le 21 octobre 2002
Réponse publiée le 23 novembre 2004

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