Turquie
Question de :
M. Gérard Voisin
Saône-et-Loire (1re circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Gérard Voisin interroge Mme la ministre déléguée aux affaires européennes sur la situation des droits de l'homme en Turquie. Une décision de la Cour européenne des droits de l'homme du 17 juillet 2001 condamne l'Etat d'Ankara pour avoir violé l'article 6 de la convention au vu des conditions dans lesquelles a été mené le procès de quatre anciens députés kurdes qui sont toujours emprisonnés aujourd'hui. Il lui demande de bien vouloir lui faire savoir si la France est intervenue auprès des autorités de ce pays pour appuyer l'application de la décision de la Cour européenne des droits de l'homme.
Réponse publiée le 19 août 2002
Mme Leyla Zana et deux autres députés, M. Hatip Dicle et M. Orhan Dogan, ont été condamnés en décembre 1994 à dix ans de prison pour complicité avec le PKK, alors qu'ils étaient députés du parti pro-kurde DEP, dans des circonscriptions du sud-est du pays. Dans son arrêt du 17 juillet 2001, la Cour européenne des droits de l'homme a, comme vous le rappelez, condamné la Turquie pour procès inéquitable sur la base de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme : la Cour de sûreté d'Ankara, où siégeait encore en 1994 un juge militaire, n'offrait pas toutes les garanties d'un tribunal impartial, et les délais de jugement étaient excessifs. Le DEP avait été également dissous : concernant cette dissolution, la cour a, le 11 juin 2002, condamné la Turquie pour violation de l'article du protocole numéro 1 de la Convention, qui garantit la libre expression de l'opinion du peuple sur le choix du corps législatif. La France souhaite que la Turquie exécute les arrêts de la cour. Conformément à l'article 46 de la Convention, cet arrêt a été transmis au Comité des ministres du Conseil de l'Europe qui en surveille l'exécution. Le 30 avril 2002, ce comité a ainsi « invité instamment les autorités turques, sans retard supplémentaire, à donner suite aux demandes réitérées du comité afin de remédier rapidement à la situation des requérants et afin de prendre les mesures nécessaires pour rouvrir les procédures incriminées par la cour ». Au sein de ce comité, la France est et restera particulièrement attentive au respect par la Turquie de ses engagements conventionnels. Par ailleurs, la Turquie s'est engagée à respecter les critères politiques définis lors du Conseil européen de Copenhague de 1993, qui invitait les pays candidats à se doter « d'institutions stables garantissant la démocratie, l'Etat de droit, les droits de l'homme, le respect des minorités et leur protection ». La Turquie a, le 3 octobre dernier, voté une importante réforme de la Constitution qui diminue notablement les limites constitutionnelles à la liberté d'expression (révision de l'article 26 de la constitution turque) et qui fixe de nouveaux cadres à l'exercice des libertés publiques en Turquie. Le 7 février et le 25 mars derniers, des réformes législatives importantes ont été votées concernant notamment les partis politiques et les associations. Dans les cas que vous évoquez, le Comité des ministres a, le 30 avril dernier, d'ailleurs également noté que « les autorités turques ont déjà pris certaines mesures générales pour prévenir de nouvelles violations semblables, avec notamment les réformes supprimant le juge militaire au sein des cours de sûreté de l'Etat et la nouvelle garantie constitutionnelle du droit au procès équitable ». Ces modifications constitutionnelles et législatives doivent être encouragées et poursuivies afin de rompre définitivement avec les habitudes du passé. Toutes ces réformes indiquent un changement des mentalités qui doit également se traduire sur le terrain, à travers des cas comme ceux que vous signalez. La France restera particulièrement vigilante sur ce point.
Auteur : M. Gérard Voisin
Type de question : Question écrite
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : affaires européennes
Ministère répondant : affaires européennes
Dates :
Question publiée le 15 juillet 2002
Réponse publiée le 19 août 2002