Question écrite n° 488 :
travailleurs frontaliers

12e Législature

Question de : Mme Marie-Jo Zimmermann
Moselle (3e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

Mme Marie-Jo Zimmermann attire l'attention de Mme la ministre déléguée aux affaires européennes sur le fait que sous la précédente législature, elle avait posé à son prédécesseur, une question écrite qui fut publiée au Journal officiel du 25 février 2002. Or, bien que le délai réglementaire de deux mois eût été écoulé, elle n'avait toujours pas obtenu de réponse à la fin de la législature. Elle lui renouvelle donc cette question qui évoquait le fait qu'il n'y a aucune garantie professionnelle au sein de l'Union européenne pour les élus locaux d'un pays qui sont travailleurs frontaliers dans un autre. C'est le cas par exemple de Français travailleurs frontaliers au Luxembourg et qui sont maires ou conseillers municipaux en France ; ils n'ont aucune des garanties protégeant soit les élus locaux français qui travaillent en France, soit les élus locaux luxembourgeois qui travaillent au Luxembourg. Certaines situations sont même encore plus paradoxales depuis que les nationaux d'un pays de l'Union européenne peuvent être élus dans un autre. C'est par exemple le cas réel d'un Luxembourgeois qui habite en France où il est conseiller municipal, tout en travaillant au Luxembourg. L'intéressé ne bénéficie d'aucune garantie professionnelle alors qu'il en aurait s'il exerçait son mandat local dans le même pays que là où il travaille (que ce soit au Luxembourg ou en France). Actuellement, les ressortissants européens peuvent être électeurs et élus dans un autre pays que celui dont ils ont la nationalité. Le prolongement logique de cette évolution devrait être l'instauration de garanties professionnelles transfrontalières pour les élus locaux dans l'exercice de leur mandat. Or, d'un pays européen à l'autre, aucune volonté ne se manifeste réellement pour prendre en compte ce problème. Pour sortir de l'immobilisme, elle souhaiterait savoir s'il ne pense pas que la France pourrait décider unilatéralement que les personnes qui travaillent en France et qui détiennent un mandat d'élu local dans un pays européen voisin bénéficient dans leurs activités professionnelles des mêmes garanties que les élus locaux français. L'exemple étant ainsi donné, des démarches afin d'obtenir la réciprocité pourraient ensuite être effectuées auprès des pays européens voisin.

Réponse publiée le 23 décembre 2002

L'honorable parlementaire appelle l'attention de Mme la ministre déléguée aux affaires européennes sur l'absence de garantie professionnelle au sein de l'Union européenne pour les élus locaux d'un Etat membre différent de celui dans lequel ils travaillent. Elle évoque, notamment, le cas de Français ou de Luxembourgeois, travailleurs frontaliers au Luxembourg, maires ou conseillers municipaux en France et qui, de ce fait, perdent les garanties protégeant soit les élus de municipalités françaises qui travaillent en France, soit les élus de municipalités luxembourgeoises qui travaillent au Luxembourg. Elle souhaite connaître les intentions de la France pour résoudre cette différence de traitement. Les garanties qu'évoque l'honorable parlementaire sont régies par le droit français et ne correspondent pas à une transposition ou une application de dispositions de droit communautaire. Premièrement, c'est la loi n° 92-108 du 3 février 1992 modifiée relative aux conditions d'exercice des mandats locaux qui a instauré plusieurs garanties au profit des salariés élus locaux pour exercer leur mandat sans compromettre le déroulement de leur activité professionnelle. Cette loi a ainsi prévu que le salarié élu local, quelle que soit l'activité ou la taille de l'entreprise qui l'emploie, peut s'absenter de son poste de travail pour se rendre aux séances plénières du conseil et au réunions des commissions dont il est membre ainsi qu'aux réunions des assemblées délibérantes où il a été désigné pour représenter le conseil. L'employeur ne peut s'opposer à l'absence du salarié et doit lui laisser le temps nécessaire à l'exercice de son mandat. La durée des absences est assimilée à une période de travail effectif pour la détermination des droits à congés payés ainsi que des droits liés à l'ancienneté résultant des dispositions législatives, réglementaires et conventionnelles. Elle n'est pas rémunérée par l'employeur mais peut donner lieu, sur justification, à indemnisation par la collectivité territoriale. Deuxièmement, l'article 66 de la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 a modifié l'article L. 2123-3 du code général des collectivités territoriales devenu l'article L. 2123-2 en ce qui concerne le crédit d'heures. Ce crédit d'heures, qui ne se confond pas avec les autorisations d'absences, est ouvert à certains élus locaux en raison de l'importance de leur mandat et de la commune. Le crédit d'heures est un forfait accordé par trimestre à l'élu concerné. Sa durée varie suivant l'importance de son mandat et en fonction de la durée hebdomadaire légale du travail. Conformément aux dispositions de l'article L. 2123-3 du code général des collectivités territoriales, les pertes de revenus subies par les conseillers municipaux qui exercent une activité professionnelle ou non salariée et qui ne bénéficient pas d'indemnité de fonctions peuvent être compensées par la commune ou l'organisme qu'ils représentent. Troisièmement, l'élu local bénéficie de garanties à l'issue de son mandat tenant notamment au bénéfice d'une formation professionnelle. Le droit européen apporte en outre une protection pour les salariés qui exerceraient un mandat dans un pays autre que celui où ils travaillent. En effet, l'article 39-2 du Traité instituant la Communauté européenne abolit toute discrimination entre les travailleurs des Etats membres en ce qui concerne l'emploi, la rémunération et les conditions de travail. En outre, les travailleurs ayant la nationalité d'un Etat membre autre que celui dans lequel ils résident et travaillent, doivent bénéficier des dispositions de la loi interne s'ils exercent un mandat municipal dans les conditions visées à l'article 19-1 du traité. Dans le cas d'un mandat exercé en France, les dispositions visées par la loi interne portent sur l'emploi, la rémunération et les conditions de travail d'élus qui sont par ailleurs salariés d'entreprises : les élus doivent donc en bénéficier quel que soit leur nationalité. Ainsi un luxembourgeois, élu municipal en France et y travaillant, doit bénéficier de l'ensemble des droits garantis à un Français dans la même situation. Réciproquement, pour le cas où la loi luxembourgeoise confère certains droits aux élus de ce pays qui travaillent, ceux-ci doivent en bénéficier dans les mêmes conditions quelle que soit leur nationalité et quel que soit le lieu d'exercice de leur mandat. Les garanties mentionnées par l'Honorable Parlementaire étant régies par la loi française, elles ne peuvent s'imposer, selon le cas, qu'à des employeurs établis en France ou à des collectivités territoriales françaises. Le droit français ne saurait en effet régir les relations professionnelles entre un employeur établi à l'étranger et un de ses salariés, fut-il de nationalité française, ni les modalités d'indemnisation par des collectivités locales étrangères des heures auparavant consacrées à des activités professionnelles qui ont été transférées à l'exercice d'un mandat local. Il n'est dès lors pas exclu que, dans certains cas, un détenteur de mandat local en France travaillant à l'étranger, c'est-à-dire pour un employeur non soumis à la législation française, ne bénéficie pas intégralement des garanties qu'apporte ce droit. Parallèlement, un détenteur de mandat local à l'étranger travaillant en France pourrait ne bénéficier qu'en partie des garanties procurées par le droit français qui ne s'appliquerait pas à la collectivité locale dans laquelle il exerce son mandat. Pour autant, comme le souligne à juste titre l'Honorable Parlementaire, le droit français doit être exemplaire sur ces questions qui touchent à l'établissement d'une citoyenneté européenne. La ministre déléguée aux affaires européennes envisage donc d'entreprendre, avec les ministres chargés d'élaborer les législations pertinentes, une étude de l'application au cas par cas des dispositions mentionnées ci-dessus afin de s'assurer de l'adéquation de leur champ d'application et d'apporter les éventuelles améliorations qui apparaîtraient nécessaires.

Données clés

Auteur : Mme Marie-Jo Zimmermann

Type de question : Question écrite

Rubrique : Frontaliers

Ministère interrogé : affaires européennes

Ministère répondant : affaires européennes

Dates :
Question publiée le 15 juillet 2002
Réponse publiée le 23 décembre 2002

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