établissements de transfusion sanguine
Question de :
M. Michel Liebgott
Moselle (10e circonscription) - Socialiste
M. Michel Liebgott interroge M. le ministre de la santé et de la protection sociale sur l'avenir du Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies. Lors de la discussion du projet de loi sur la simplification du droit, un amendement modifiant le statut du Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies (LFB) a été adopté. Ce laboratoire a été alors transformé en société anonyme à capitaux détenus majoritairement par l'État ou ses établissements publics. Les amicales de donneurs de sang bénévoles, base de la politique française de don du sang depuis ses origines se sont inquiétées de cette évolution et ont dénoncé tout particulièrement la grave altération de l'image altruiste de la transfusion. En effet, il y a une source flagrante de contradiction avec le caractère de non-profit d'une organisation se devant d'être animée par le seul intérêt du malade et le respect du désintéressement. C'est pourquoi, au travers de leurs unions départementales, les amicales de donneurs de sang se sont émues de cette situation et ont exprimé leur refus légitime de toute mercantilisation du don du sang. C'est pourquoi, il lui demande quelles sont les garanties que le Gouvernement peut aujourd'hui donner pour que cela soit effectif et que nous évitions les dérives constatées dans certains pays.
Réponse publiée le 7 décembre 2004
La transformation du laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies (LFB), de groupement d'intérêt public en société anonyme à capitaux majoritairement détenus par l'État ou ses établissements publics, ne conduit ni au démantèlement du dispositif en vigueur de sécurité des médicaments dérivés du sang (MDS), ni à la mise en cause des principes éthiques sur lesquels il se fonde. Les principes d'anonymat, de bénévolat, de gratuité du don forment le socle de la doctrine française en matière d'éthique de prélèvement de produits du corps humain. Les associations de donneurs de sang en France y sont particulièrement attachées. Ces principes sont également affirmés dans la directive européenne 2002/98/CE du 27 janvier 2003. Dans l'un de ses considérants, la directive fait en outre la liaison entre ces principes éthiques et les objectifs de sécurisation des dons. Il ne peut donc être question de remettre en question les valeurs de générosité personnelle qui constituent l'horizon éthique de la transfusion sanguine en Europe et que la France a contribué à faire prévaloir dans les discussions avec ses partenaires. Le dispositif institutionnel de sécurité français est fondé sur le respect de ces valeurs et sur les enseignements tirés du drame du sang contaminé. L'évolution du statut du LFB n'a pas pour but de modifier l'architecture de ce dispositif qui repose sur la séparation des activités transfusionnelles et des activités de production des MDS et sur un double monopole ; la production des produits sanguins labiles (PSL) par un opérateur unique, l'établissement français du sang (EFS) et le fractionnement du plasma collecté par l'EFS par un seul opérateur : le LFB. Ce système permet, par la séparation des acteurs EFS-LFB, un double contrôle interne de la qualité des produits, gage de transparence. Il permet en outre de garantir, grâce au double monopole, une traçabilité maximale des PSL et l'unité de la politique des pouvoirs publics en matière de sécurité sanitaire. La relation organique entre le LFB et l'EFS est donc partie intégrante de ce dispositif national de sécurité qui permet à nos concitoyens de disposer de médicaments dûment tracés et contrôlés. Il n'est pas envisageable de la remettre en question dans un contexte international de pénurie relative du plasma « éthique » et en l'absence d'une régulation européenne intégrée des PSL. La priorité du ministère de la santé est que les besoins des malades en médicaments dérivés du sang soignés dans les établissements de santé nationaux soient satisfaits. La pérennisation du LFB n'a de justification et le dispositif de sécurisation français des produits issus du sang n'a de sens que si l'établissement obéit à cet objectif d'approvisionnement national prioritaire. Et bien évidemment, dans cet objectif de réponse la plus large possible aux besoins nationaux, il n'est pas question pour les pouvoirs publics de voir disparaître la gamme des médicaments orphelins, qui constitue une vraie spécificité du LFB. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, l'activité du LFB doit donc demeurer sous le contrôle des pouvoirs publics. Le projet d'évolution du statut du LFB en société anonyme à capitaux publics majoritaires relève d'un choix pragmatique qui prend acte du fait que, si le LFB détient un monopole d'approvisionnement en matière première, il n'a pas en revanche le monopole de l'approvisionnement des établissements de santé en NMS. Les médicaments fabriqués par le LFB sont, en effet, conformément aux règles qui régissent le marché des médicaments, en concurrence sur le territoire national avec ceux des laboratoires étrangers qui ont obtenu une autorisation de mise sur le marché. Le statut de société anonyme a ainsi pour but de permettre au LFB, en drainant des capitaux extérieurs, d'acquérir la surface financière lui permettant d'affronter la concurrence dans les meilleures conditions en perfectionnant sa gamme de MDS et en développant la recherche sur les recombinants de substitution (produits de biotechnologie). Pour défendre ses positions, dans un secteur très capitalistique, le LFB est en effet contraint d'augmenter ses dépenses de recherche et développement, et de mettre en oeuvre une stratégie de partenariats européens avec, en particulier, le secteur non profit. En accompagnant le développement du LFB, l'enjeu est bien, pour l'État, de donner à l'entreprise les moyens d'assurer, prioritairement, la pérennité de l'approvisionnement des établissements de santé nationaux en médicaments répondant aux exigences éthiques et aux normes de sécurité françaises, et, secondairement, de promouvoir la qualité de la production française auprès de nos partenaires européens. Le statut de société anonyme à capitaux publics majoritaires permettra de concilier le nécessaire contrôle de l'État sur une production de médicaments stratégique en terme de santé publique et les contraintes de gestion imposées par la concurrence. Ce statut, mieux que celui d'Établissement public industriel et commercial, donnera au LFB la souplesse indispensable pour lui permettre de maintenir ses positions sur le marché français et mener à bien ses efforts de développement sur le marché européen.
Auteur : M. Michel Liebgott
Type de question : Question écrite
Rubrique : Sang et organes humains
Ministère interrogé : santé
Ministère répondant : solidarités, santé et famille
Dates :
Question publiée le 9 novembre 2004
Réponse publiée le 7 décembre 2004