Question écrite n° 5161 :
maladie de Creutzfeldt-Jakob

12e Législature

Question de : M. Rudy Salles
Alpes-Maritimes (3e circonscription) - Union pour la Démocratie Française

M. Rudy Salles attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur un problème relatif à la lenteur des services judiciaires concernant l'affaire dite « des hormones de croissance ayant entraîné la maladie de Creutzfeldt-Jakob ». En effet, pour remédier à un déficit de croissance, plus de 2 000 enfants ont été traités par des injections d'hormones de croissance humaines fabriquées à partir d'hypophyses humaines entre 1973 et 1988. A cause de ce traitement, 87 enfants ont été contaminés par l'agent de la maladie de Creutzfeldt-Jakob. A ce jour, 83 sont déjà décédés, 9 ont développé la maladie et sont condamnés et près d'un millier sont susceptibles de développer la maladie. Dès 1991, une première plainte est déposée et l'instruction débute au tribunal de grande instance de Paris. Plus de onze ans après, l'instruction n'est toujours pas close, semble-t-il, faute de moyens. Pendant ce temps, les familles vivent une situation très difficile, ne pouvant faire le deuil du drame qu'elles ont vécu et qu'elles continuent à vivre. C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir l'informer sur le déroulement de cette affaire et surtout sur les délais restant à courir avant qu'une décision soit enfin rendue. Il insiste enfin sur la nécessité d'apporter une réponse rapide à cette douloureuse question qui ne peut rester ainsi sans réponse en raison du manque de moyens des services chargés de cette instruction. Enfin, il lui demande s'il ne serait pas possible de créer un « pôle santé » au sein des services judiciaires, à l'instar de ce qui existe pour les « affaires financières », qui serait amené à examiner et à traiter des affaires de santé, de plus en plus nombreuses au sein des juridictions françaises. Dans le cas où ce pôle pourrait être créé, il lui demande de bien vouloir lui indiquer les délais d'installation d'un tel service.

Réponse publiée le 23 décembre 2002

Le garde des sceaux, ministre de la justice, entend apporter à l'honorable parlementaire les éléments de réponse suivants. La contamination d'enfants, au cours des années 1980, par la maladie de Creutzfeld-Jacob suite aux traitements qui leur ont été administrés par injection d'hormones de croissance extractives, constitue à la fois un drame humain pour de nombreuses familles et l'un des dossiers majeurs de santé publique dont la justice ait eu à connaître ces dernières années. Il convient de rappeler que ce dossier d'information judiciaire, ouvert au tribunal de grande instance de Paris le 24 décembre 1991, revêt une dimension nationale et concerne, depuis 1997, l'ensemble des victimes répertoriées par le centre de référence de la maladie. Cette procédure présente un caractère exceptionnel à plusieurs égards. Tout d'abord par l'ampleur des mesures d'instruction ordonnées par le magistrat saisi, destinées à déterminer pour chacune des victimes l'origine précise de la contamination par la maladie de Creutzfeld-Jacob, son lien de causalité avec le traitement hormonal reçu, la nature et la provenance de l'hormone en cause et à en évaluer les conséquences. Ensuite, par la complexité intrinsèque du dossier, qui suppose de nombreux actes d'enquête et d'expertise afin de rechercher des responsabilités éventuelles aux divers stades du processus, depuis le prélèvement d'hypophyses, en France et à l'étranger, jusqu'à la distribution et à la prescription des hormones. C'est ainsi qu'à ce jour plusieurs personnes, à différents niveaux, ont été mises en examen sous les qualifications de blessures ou homicides involontaires, voire même d'empoisonnement pour certains faits. La particularité de ce dossier tient également aux développements procéduraux auxquels a conduit la procédure initiale, notamment relatifs à des infractions économiques ou financières ou se rapportant à la disparition de certains éléments de preuve. En outre, ce dossier a déjà donné lieu à des débats juridiques et a en particulier permis, le 17 septembre dernier, à la chambre de l'instruction de Paris de se prononcer sur des requêtes en nullité formulées par les parties et notamment de procéder à l'annulation partielle d'une mise en examen. En conséquence, la durée de ce dossier doit être appréciée au regard de ces différents facteurs, étant précisé qu'un second juge d'instruction est désormais adjoint au magistrat instructeur initial. Enfin, le garde des sceaux tient à souligner l'intérêt qu'il porte à la mise en place effective des juridictions spécialisées en matière sanitaire, appelées « pôles de santé publique », qui ont été créées par la loi relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. En particulier, les magistrats du parquet et de l'instruction des deux juridictions désignées, Paris et Marseille, seront prochainement secondés d'assistants spécialisés, fonctionnaires issus des ministères chargés de la santé et de l'agriculture. En effet, il paraît essentiel que la justice pénale, saisie de dossiers complexes relatifs à la sécurité sanitaire ou à la sécurité alimentaire, soit dotée des moyens humains, matériels et techniques pour mener à bien ces procédures.

Données clés

Auteur : M. Rudy Salles

Type de question : Question écrite

Rubrique : Santé

Ministère interrogé : justice

Ministère répondant : justice

Dates :
Question publiée le 21 octobre 2002
Réponse publiée le 23 décembre 2002

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