Question écrite n° 53006 :
politique de l'eau

12e Législature

Question de : M. Jean-Pierre Dupont
Corrèze (3e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Jean-Pierre Dupont appelle l'attention de M. le ministre de l'écologie et du développement durable sur les préoccupations du syndicat de défense des moulins et cours d'eau. Les moulins, particulièrement présents dans le département de la Corrèze, constituent un patrimoine architectural exceptionnel et une richesse historique et écologique qui méritent d'être préservés. Or, les propriétaires de moulins sont aujourd'hui confrontés à d'importantes difficultés liées aux formalités administratives à accomplir et aux contraintes qui leur sont imposées. En effet, pour vendre leur électricité à EDF, ils doivent justifier de leur autorisation de « droit d'eau » par une attestation de la direction départementale de l'équipement (DDE) qui peut être longue obtenir. Ils se plaignent également des contraintes de mise en conformité des barrages afin de permettre la libre circulation des poissons. Autant d'entraves qui découragent aujourd'hui les propriétaires de moulins d'exploiter leurs barrages. Aussi, il lui demande quelles mesures il envisage de proposer, dans le cadre de la préparation du projet de loi sur l'eau, en faveur de la défense des moulins et cours d'eau.

Réponse publiée le 29 mars 2005

Le ministre de l'écologie et du développement durable a pris connaissance, avec intérêt, de la question concernant les préoccupations du syndicat de défense des moulins et cours d'eau. S'agissant des formalités administratives, l'utilisation de l'énergie hydraulique pour produire de l'électricité est soumise à la réglementation introduite par la loi du 16 octobre 1919 qui assujettit les installations de production d'énergie hydraulique à concession ou autorisation en fonction de la puissance maximale de la chute. Les installations soumises au régime de l'autorisation relèvent également des dispositions du titre premier du livre II du code de l'environnement, relatif à l'eau et aux milieux aquatiques. Les installations disposant d'un droit « fondé en titre » et celles autorisées avant la publication de la loi du 16 octobre 1919, dont la puissance maximale est inférieure à 150 kW, peuvent être exploitées conformément à leur titre d'origine, sans modification ou limitation de durée autre que celles apportées à la demande de leur exploitant ou de l'État pour répondre aux obligations liées à l'intérêt général définies par le code de l'environnement. De nombreux moulins entrent dans ces dernières catégories et peuvent bénéficier de ces dispositions dont la remise en cause n'est pas envisagée. Ainsi, un propriétaire d'une chute d'eau de moins de 150 kW, en état de fonctionner et n'ayant pas fait l'objet de travaux de modification depuis sa création, peut obtenir une autorisation de remise en service de sa chute si cette exploitation n'est pas incompatible avec les intérêts généraux protégés par le code de l'environnement. Les problèmes de procédures longues et complexes qui semblent entraver la remise en service de certains ouvrages sont liés bien souvent à leur ancienneté et à l'absence de titre formel d'autorisation datant d'avant 1919 ou de documents permettant de définir la consistance du droit d'eau (caractéristiques de hauteur de chute, de débit et de puissance). Sur ce point le ministère de l'écologie et du développement durable est favorable à une gestion pragmatique qui facilite cette remise en service par reconnaissance du caractère autorisé avant la législation de 1919 dès lors que suffisamment d'éléments concrets permettent d'en prouver l'existence effective avant 1919, que l'installation n'a pas été détruite et que les caractéristiques de hauteur de chute, de débit et de puissance d'origine peuvent être connues et ne sont pas augmentées. La réponse à ces demandes ne peut cependant être traitée qu'au cas par cas, et il appartient toujours au service de police de l'eau de juger de la nécessité d'une procédure d'autorisation nouvelle en fonction des impacts potentiels des installations sur les milieux au regard de la situation actuelle. En revanche, lorsque des modifications des ouvrages et de la consistance du droit d'eau sont intervenues ou lorsque les ouvrages faisant partie de la chute, en particulier le barrage, sont partiellement ou totalement détruits, une autorisation nouvelle d'exploiter est à demander au titre des législations actuelles, y compris en cas de très faible puissance exploitée. Pour le moment, aucune disposition législative ne prévoit de remettre en cause la nécessité d'appliquer les procédures d'autorisation dès le premier kilowatt exploité, ce qui pourra faire l'objet cependant de débats ultérieurs. La loi du 23 février 2005 sur le développement des territoires ruraux comporte cependant des dispositions permettant d'encadrer les délais d'instruction des demandes d'autorisation en fixant un maximum de deux ans entre le dépôt du dossier et le moment où le préfet statue. S'agissant de la mise en conformité des ouvrages au titre de la libre circulation des poissons, notamment la disposition régissant ce point, inscrite à l'article L. 432-6 du code de l'environnement, également mentionnée par la loi « pêche », est très ancienne. Elle figurait déjà dans une loi de 1865 prévoyant le classement de certains cours d'eau dans la catégorie « soumise à échelles à poissons », afin de lutter contre la disparition de la ressource économique que constituaient les populations piscicoles, sans faire de distinction vis-à-vis des ouvrages et aménagements concernés. Les dispositions de l'article L. 432-6 ne s'appliquent que sur les cours d'eau et portions de cours d'eau classés au titre de cet article pour lesquels la liste des espèces migratrices a été publiée par arrêté ministériel. Pour les autres cours d'eau, la construction de tels dispositifs ne doit être envisagée que si l'étude ou la notice d'impact du projet montre la nécessité de migration des poissons entre les zones de frayères et les zones de croissance. Le projet de loi sur l'eau prévoit de confier aux préfets coordonnateurs de bassins la responsabilité de ce classement. Il prévoit également que la question des ouvrages peut être examinée dans le cadre d'un schéma d'aménagement et de gestion de l'eau (SAGE) et que les mesures de résorption de leur impact éventuel soient discutées et précisées à cette occasion, notamment dans le cadre du règlement du SAGE. Des consultations seront organisées à cette occasion. Le problème des dispositifs de franchissement et de leur financement pourra être traité dans ce cadre. La bonne gestion des ouvrages peut contribuer aux objectifs d'atteinte et de préservation du bon état écologique des milieux fixés par la directive cadre européenne sur l'eau, mais, comme elle n'est plus assurée dans de trop nombreux cas, les problèmes rencontrés dans la gestion des cours d'eau s'accroissent et engendrent souvent une augmentation des coûts d'entretien des cours d'eau supportée par les collectivités territoriales. Cette carence en gestion peut également perturber le bon fonctionnement des cours d'eau et la circulation des poissons migrateurs. Les dispositions formulées dans le projet de loi sur l'eau visent à remettre d'actualité les principes qui existaient dans les anciens règlements d'eau qui fixaient des règles de gestion pour les ouvrages, règles coordonnées sur un cours d'eau. Si ces mesures ne sont pas suffisantes pour atteindre les objectifs, notamment ceux de la directive cadre sur l'eau, il sera nécessaire de les compléter par des équipements sur les ouvrages. Les agences de l'eau pourront alors subventionner les investissements nécessaires. Par rapport à la réglementation actuelle, ces modifications permettent d'ouvrir un éventail de solutions plus larges pouvant être mieux adaptées aux considérations de terrain et aux configurations des ouvrages. Enfin, il est tout à fait possible de trouver des solutions qui permettent de satisfaire les exigences de l'article L. 432-6, sans porter atteinte au patrimoine bâti, qui d'ailleurs est parfois lui aussi classé. De nombreux exemples réussis existent.

Données clés

Auteur : M. Jean-Pierre Dupont

Type de question : Question écrite

Rubrique : Eau

Ministère interrogé : écologie

Ministère répondant : écologie

Dates :
Question publiée le 7 décembre 2004
Réponse publiée le 29 mars 2005

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