peines de travail d'intérêt général
Question de :
M. Jean-Michel Bertrand
Ain (1re circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Jean-Michel Bertrand appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la nécessité d'assouplir les modalités de mise en oeuvre des peines de travail d'intérêt général (TIG), afin qu'elles soient prononcées et réalisées de façon beaucoup plus systématique. Il constate que le TIG est une peine particulièrement bien adaptée aux mineurs, dans la mesure où ces derniers ont besoin de repères et d'une sanction-réparation concrète qui ne laisse aucune place au sentiment d'impunité. En revanche, il est regrettable que la peine de travail d'intérêt général ait été aussi fortement encadrée par le législateur pour être prononcée par les tribunaux. Le TIG perd de facto de son efficience, victime du carcan dans lequel il est enfermé : le condamné doit être présent à l'audience, doit accepter la peine afin qu'elle ne soit pas assimilée à du travail forcé, doit être physiquement apte à son exécution (à titre de comparaison, est-ce que l'on demande aux accusés condamnés à une peine de prison ferme s'ils souffrent de claustrophobie pour pouvoir purger leur peine ?). Il précise également que le TIG ne prendra toute sa dimension de sanction éducative qu'à partir du moment où le juge des enfants privilégiera la réparation sur les lieux où le délit a été commis. En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui faire connaître les mesures qu'il entend prendre dans les mois à venir afin de remédier à cette situation.
Réponse publiée le 13 janvier 2003
Le garde des sceaux fait savoir à l'honorable parlementaire que les exigences résultant des articles 131-8 et 132-54 du code pénal relatives à la mise en oeuvre de la peine de travail d'intérêt général, qui prévoient qu'elle ne peut être prononcée contre le prévenu qui la refuse ou qui n'est pas présent à l'audience, lui paraissent en l'état justifiées, d'une part, afin de ne pas enfreindre l'article 4 de la Convention européenne des droits de l'homme, aux termes duquel « nul ne peut être astreint à accomplir un travail forcé ou obligatoire » et, d'autre part, dans un souci de pragmatisme puisque si une personne refuse d'accomplir un travail d'intérêt général l'exécution de cette peine est alors vouée à l'échec. Au demeurant, cette condition n'empêche pas que cette peine soit fréquemment prononcée, le nombre de condamnations à un travail d'intérêt général ayant été en 2001 de 8 667 en tant que peine alternative et de 8 991 lorsqu'elle a été prononcée dans le cadre d'un sursis. Par ailleurs, il convient de préciser qu'en application de l'article 132-57 du code pénal une juridiction qui a prononcé à l'encontre d'un prévenu, même hors sa présence, une condamnation comportant un emprisonnement ferme de six mois au plus peut, lorsque cette condamnation n'est plus susceptible de faire l'objet d'une voie de recours par le condamné, ordonner la conversion de cette peine en sursis avec obligation d'accomplir un travail d'intérêt général. Par ailleurs, cette peine constituant l'exécution d'un travail, l'article 131-23 du code pénal prévoit qu'elle est soumise aux prescriptions législatives et réglementaires relatives au travail de nuit, à l'hygiène, à la sécurité ainsi qu'au travail des femmes et des jeunes travailleurs. En tout état de cause, si cette peine apparaît particulièrement adaptée à certains mineurs, le travail d'intérêt général pouvant en effet être prononcé à l'encontre des mineurs de seize à dix-huit ans, il convient de préciser que l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante prévoit par ailleurs la possibilité pour le procureur de la République ou la juridiction de jugement de prononcer à l'encontre du mineur une mesure de réparation, l'accord du mineur n'étant pas nécessaire lorsque cette mesure est prononcée par la juridiction. En outre, la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice a institué en ce qui concerne les mineurs de dix à dix-huit ans la possibilité pour le tribunal pour enfants et la cour d'assises des mineurs de prononcer des sanctions éducatives, l'une de ces mesures consistant en l'accomplissement d'une mesure de réparation dont le non-respect peut de manière nouvelle être sanctionnée par le placement du mineur. Une autre de ces mesures consiste dans le suivi d'un stage de formation civique qui a pour objet de rappeler au mineur les obligations résultant de la loi. En dernier lieu, il convient de souligner que M. Jean-Luc Warsmann, député, a été chargé le 18 novembre 2002 de conduire une réflexion sur les modalités d'exécution des courtes peines et sur les alternatives à l'incarcération, son rapport et ses propositions devant être remis avant la fin du mois d'avril 2003.
Auteur : M. Jean-Michel Bertrand
Type de question : Question écrite
Rubrique : Droit pénal
Ministère interrogé : justice
Ministère répondant : justice
Dates :
Question publiée le 28 octobre 2002
Réponse publiée le 13 janvier 2003