Question écrite n° 57594 :
mer et littoral

12e Législature
Question signalée le 23 mai 2006

Question de : M. Jérôme Bignon
Somme (3e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Jérôme Bignon attire l'attention de M. le secrétaire d'État aux transports et à la mer sur l'éventail de sanctions dont disposent les tribunaux pour condamner les pollueurs des mers. La loi du 3 mai 2001 a doublé le maximum des peines d'emprisonnement et multiplié le maximum des peines d'amende par 2,5 pour l'ensemble des bâtiments de commerce européens ou fréquentant les ports français et de 4 pour les navires représentant une bonne partie de la flotte de pêche et les navires de plaisance les plus importants. Le renforcement de ces sanctions pénales a bien évidemment un effet dissuasif important. Mais l'objectif de neutralisation des « voyous des mers » n'en est pas pour autant totalement atteint. En réalité, seul l'emprisonnement, résultant d'infractions graves, aurait pour effet de mettre hors d'état de nuire le responsable pénal, à raison de son fait personnel (en principe le capitaine du navire). Le propriétaire ou l'exploitant quant à eux peuvent, après avoir payé une amende, reprendre leur activité sans aucune condition. Une diversification des sanctions par l'instauration de la suspension de licence, voire le retrait définitif ou encore la création d'une licence à points du type « permis de conduire » pourrait contribuer à responsabiliser le personnel navigant. En conséquence, il lui demande si le Gouvernement serait susceptible de prendre une initiative dans cette direction, qui permettrait d'améliorer l'éventail des sanctions à la disposition des juridictions et surtout de renforcer l'efficacité de la dissuasion. Par ailleurs, l'objectif de prévention pourrait également être mieux atteint si les ports français étaient tous équipés de dispositifs permettant aux bateaux d'évacuer leurs résidus : la « traçabilité » de ces évacuations régulières serait ainsi assurée. Il lui demande, en conséquence, de dresser un état des lieux de ces équipements et des perspectives d'évolution.

Réponse publiée le 30 mai 2006

À la suite des pollutions accidentelles causées par les naufrages des pétroliers Erika (1999) et Prestige (2002), la capacité de l'État à lutter contre les rejets illicites en mer a été nettement renforcée. La loi n° 2001-380 du 3 mai 2001 relative à la répression des rejets polluants des navires a ainsi augmenté fortement les sanctions par rapport à la loi du 5 juillet 1983 réprimant la pollution des mers par les hydrocarbures, le maximum encouru pour la première catégorie d'amende ayant été porté finalement par loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 (dite « Loi Perben II ») à 1 million d'euros et à dix ans d'emprisonnement. Cette loi a également élargi le champ des responsabilités. Outre celle du capitaine du navire, la responsabilité pénale du propriétaire, de l'exploitant ou de toute autre personne exerçant un contrôle dans la gestion ou la marche du navire peut être recherchée. La même loi a aussi créé les tribunaux du littoral maritime spécialisés qui se voient reconnaître une compétence exclusive pour le jugement des affaires de pollution volontaire. Ces juridictions spécialisées ont vu leur compétence étendue aux zones économiques et à la zone de protection écologique. Par ailleurs, la loi n° 2003-346 du 15 avril 2003 relative à la création d'une zone de protection écologique a permis d'instituer une telle zone en Méditerranée par le décret n° 2004-33 du 8 janvier 2004 et d'exercer une action répressive au-delà de la mer territoriale à l'encontre d'auteurs d'actes illicites. Ce dispositif a montré sa pleine efficacité (60 procédures ont ainsi été engagées depuis 2001 par les tribunaux français, en comparaison des 8 procédures engagées entre 1996 et 2000). De même, le montant des amendes prononcées s'élève à 12 M EUR depuis 2001 contre 360 K EUR entre 1996 et 2000. Le nombre d'infractions constatées est passé de 44 en 2000 à 21 en 2005, conséquence de l'efficacité de l'action engagée. Toutefois, l'application de ces dispositions aux infractions constatées en haute mer reste encadrée par les principes généraux qui président au droit international de la mer. Ainsi, la condamnation à des peines d'emprisonnement est impossible au regard de la convention des Nations unies sur le droit de la mer adoptée, le 10 décembre 1982, à Montego Bay, entrée en vigueur le 16 novembre 1994 et dont l'article 230 restreint le champ des sanctions possibles aux seules peines pécuniaires. Se trouve ainsi écartée la possibilité de condamner à des peines d'emprisonnement les capitaines de navires étrangers pour des infractions commises hors des eaux territoriales, ce qui correspond à la plupart des cas de pollutions détectées et dont l'origine a été identifiée. Face à cette situation de droit, la France a été particulièrement active pour faire évoluer la réglementation communautaire, et reste très vigilante quant au respect des dispositions prévues par la directive n° 2005/35/CE qui prévoit des sanctions désormais harmonisées, dans le respect du droit international, entre les pays membres de l'Union. Cette réglementation va dans le sens de l'harmonisation des sanctions et d'une interprétation commune des Etats Européens de la convention Marpol laquelle, auparavant, était interprétée et sanctionnée différemment par la législation pénale de chaque Etat membre. En ce qui concerne la proposition « d'un permis à points » appliquée aux brevets délivrés aux officiers susceptibles d'exercer des fonctions de commandement, le régime des brevets relève de l'OMI (organisation maritime internationale) et ne prévoit pas de modulation. Il n'est donc pas envisageable d'introduire un tel dispositif. En ce qui concerne l'état des lieux des équipements portuaires de réception pour les déchets d'exploitation des navires et les résidus de cargaison, tous les ports autonomes sont dotés d'installations permettant le stockage de ces produits y compris les hydrocarbures, ainsi que tous les ports dont le trafic est d'importance significative. La quasi-totalité des ports français est ainsi désormais équipée.

Données clés

Auteur : M. Jérôme Bignon

Type de question : Question écrite

Rubrique : Déchets, pollution et nuisances

Ministère interrogé : transports et mer

Ministère répondant : transports, équipement, tourisme et mer

Signalement : Question signalée au Gouvernement le 23 mai 2006

Dates :
Question publiée le 15 février 2005
Réponse publiée le 30 mai 2006

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