Question écrite n° 60805 :
mutuelles

12e Législature

Question de : M. William Dumas
Gard (5e circonscription) - Socialiste

M. William Dumas souhaite attirer l'attention de M. le ministre de la fonction publique et de la réforme de l'État sur l'engagement des mutuelles de fonctionnaires depuis près de soixante ans, dans l'organisation de garanties solidaires pour l'ensemble des agents publics en complément de leurs droits statutaires. Á ces garanties, se sont ajoutés des services, notamment les « prestations sociales interministérielles » dont la gestion a été confiée à ces mêmes mutuelles par des conventions passées entre les services de l'État et les organismes mutualistes de la fonction publique. Cette position des mutuelles de fonctionnaires est par ailleurs confortée par le bénéfice d'une délégation de gestion du régime obligatoire d'assurance maladie accordée par la loi dite « MORICE » du 9 avril 1947. Les garanties solidaires mises en place par les mutuelles de fonctionnaires sont aujourd'hui gravement menacées, tant par l'évolution future des risques et des caractéristiques démographiques de la fonction publique, que par la faiblesse de l'action sociale des employeurs publics. Depuis plus de deux ans la mutualité fonction publique a démontré que la participation des employeurs privés à la protection sociale complémentaire de leurs salariés est devenue bien plus importante que celle des employeurs publics. En effet depuis 1989, la loi impose dans les entreprises de plus de 50 salariés une négociation annuelle sur la prise en charge de la prévoyance complémentaire des salariés ; de même la loi prévoit une déductibilité fiscale des cotisations acquittées dans le cadre d'un accord collectif. Selon un rapport publié par le cabinet Bernard Brunhes Consultants, les entreprises participent ainsi à près de 60 % au coût de la couverture santé de leurs salariés et à 75 % de la prévoyance des risques longs. Le contraste est saisissant avec la fonction publique d'État, hospitalière ou territoriale où aucune obligation de négocier n'est prévue. De même, les fonctionnaires ne peuvent déduire leurs cotisations mutualistes santé et prévoyance en raison du caractère facultatif de leurs couvertures complémentaires. Les fonctionnaires supportent donc seuls le financement de leur protection sociale complémentaire, ce qui conduit nombre d'entre eux à renoncer à se protéger en raison de l'augmentation du coût des couvertures. Selon le rapport du cabinet Bernard Brunhes Consultants, la part de l'action sociale de l'État à destination des mutuelles de fonctionnaires s'élève en moyenne à 5 % du montant des cotisations versées par les agents et cette part ne cesse d'être diminuée et remise en cause. Cette situation crée une profonde iniquité fiscale et sociale pour les agents des trois fonctions publiques qui ne peuvent plus organiser de façon durable et satisfaisante, à travers leurs mutuelles, la couverture de leurs besoins sociaux. C'est pourquoi, il lui demande quelles mesures il entend prendre pour assurer le rétablissement de l'égalité entre les agents de la fonction publique et les salariés du privé devant la protection sociale complémentaire et quand compte-t-il ouvrir des négociations avec les fonctionnaires, leurs représentants syndicaux et leurs mutuelles sur une participation active de leurs employeurs au financement de la protection sociale complémentaire.

Réponse publiée le 15 novembre 2005

D'après une étude du cabinet Bernard Brunhes Consultant, le niveau de protection sociale des salariés du secteur privé serait, sur certains aspects, plus protecteur que celui applicable aux agents du secteur public. Les mutuelles considèrent, en s'appuyant sur ce rapport, que leur régime est menacé, les fonctionnaires devant supporter seuls, contrairement aux salariés du secteur privé, le financement de leur protection sociale complémentaire. Il faut cependant préciser que cette étude ne porte que sur quelques grandes entreprises du secteur privé (une quarantaine au total). Par ailleurs, les mutuelles estiment que les aides qui leur sont accordées par l'État sont insuffisantes et que des incertitudes juridiques pèsent sur leur partenariat avec celui-ci, eu égard à des contentieux européens. Face à ce constat, celles-ci souhaitent redéfinir un nouvel équilibre entre les responsabilités incombant à l'État employeur et leur place qui se traduirait par une augmentation de la participation de l'État dans la prise en charge de la protection sociale complémentaire des fonctionnaires. À cette fin, les mutuelles de fonctionnaires demandent que des négociations soient ouvertes sur le sujet, en liaison avec les organisations syndicales. En ce qui concerne le secteur public, aucune disposition dans le statut général des fonctionnaires ne prévoit que l'État participe à la protection sociale complémentaire de ses agents. L'article 20 du titre Ier de ce statut énumère limitativement les éléments de rémunération susceptibles d'être versés aux fonctionnaires. Les fonctionnaires bénéficient dans ce cadre d'éléments de rémunérations spécifiques, indemnité de résidence et supplément familial. L'État employeur participe toutefois à la protection complémentaire à travers les aides qu'il apporte aux mutuelles, telles que les subventions directes, les mises à disposition de personnels et de locaux. Le fondement juridique de ces aides se situe à l'article R. 523-2 de l'ancien code de la mutualité et dans un arrêté du 19 septembre 1962. L'article R. 523-2 précité prévoit que « l'État peut accorder aux mutuelles constituées entre les fonctionnaires, agents et employés de l'État et les établissements publics nationaux des subventions destinées notamment à développer leur action sociale et, dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la mutualité et du ministre chargé des finances, à participer à la couverture des risques sociaux assurés par ces mutuelles ». L'arrêté du 19 septembre 1962 prévoit notamment que les mutuelles des agents de l'État et des établissements nationaux peuvent recevoir une subvention dont le maximum est de 25 % des cotisations, sans pouvoir excéder le tiers des charges entraînées par le service des prestations. Ces crédits sont prélevés sur les chapitres 33-92 (action sociale) des différents ministères. D'après le rapport Brunhes Consultants, ces aides s'élèveraient à 5 % en moyenne du montant des cotisations. Ce chiffre qui tient compte des aides indirectes apportées par l'État au fonctionnement des mutuelles au travers notamment des mises à disposition de personnels et de locaux, doit faire l'objet d'une vérification. Le cadre de mise en oeuvre de la complémentaire santé des fonctionnaires nécessite d'être examiné sur le plan juridique. La Commission européenne a demandé en juillet 2005 à la France de revoir le dispositif juridique dans lequel exercent les mutuelles et les conditions dans lesquelles elles peuvent recevoir des subventions. Suite à un recours d'une mutuelle, et de façon indépendante à l'action de la Commission européenne, le Conseil d'État a en septembre 2005 remis en cause l'arrêté du 19 septembre 1962 qui permet aux ministères d'apporter des aides aux mutuelles de fonctionnaires. Dans ce cadre, afin d'avoir une connaissance précise de l'existant, le Gouvernement a souhaité tout d'abord disposer d'un état exhaustif des moyens que l'État consacre aux mutuelles de la fonction publique. À cet effet, une enquête a été effectuée auprès de chaque département ministériel. Une mission d'audit a été ensuite confiée conjointement à l'inspection générale des finances et l'inspection générale des affaires sociales pour examiner la situation de ces mutuelles et proposer des solutions. Enfin les propositions seront soumises à concertation des partenaires sociaux avant la fin de l'année, de façon à pouvoir mettre en oeuvre un nouveau cadre juridique courant 2006.

Données clés

Auteur : M. William Dumas

Type de question : Question écrite

Rubrique : Économie sociale

Ministère interrogé : fonction publique

Ministère répondant : fonction publique

Dates :
Question publiée le 22 mars 2005
Réponse publiée le 15 novembre 2005

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