immeubles insalubres
Question de :
M. Yves Jégo
Seine-et-Marne (3e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Yves Jego attire l'attention de M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement sur les difficultés pratiques d'application des dispositions de l'article 181 de la loi SRU du 13 décembre 2000 codifié à l'article L. 521-2 du code de la construction et de l'habitation. « Dans les locaux faisant l'objet d'un arrêté d'insalubrité ou de péril, le loyer en principal ou toute autre somme versée en contrepartie de l'occupation du logement cesse d'être dû à compter du premier jour du mois qui suit l'envoi de la notification de l'arrêté d'insalubrité ou de péril (...) ». Ainsi, par l'effet de cette disposition, dans les locaux qui ont fait l'objet d'un arrêté de péril ou d'insalubrité, les locataires ne payent plus leur loyer. Le législateur a voulu ainsi inciter les propriétaires bailleurs à remettre en état les immeubles insalubres. Cependant, en les privant ainsi de leurs revenus locatifs, il leur rend le financement plus difficile, alors qu'il s'agit bien souvent de copropriétés en difficulté. Tout en gardant à ce texte son but de réhabilitation des immeubles dégradés, ne serait-il pas efficace de prévoir une procédure simplifiée, telle qu'une ordonnance sur requête rendue par un tribunal, qui permettrait au syndic de copropriété de saisir les loyers pour les affecter au financement des travaux. Ainsi, le bailleur ne percevant plus les loyers serait incité à réaliser les travaux au plus vite, et les loyers seraient intégralement affectés aux travaux importants, permettant la réhabilitation de l'immeuble. Aussi, il souhaiterait savoir ce que le Gouvernement envisage de faire afin de résoudre cette difficulté.
Réponse publiée le 4 octobre 2005
L'entrée en vigueur de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000, relative à la solidarité et au renouvellement urbains, a profondément modifié les obligations du bailleur dont l'immeuble fait l'objet d'un arrêté d'insalubrité ou de péril. L'article L. 521-2 du code de la construction et de l'habitation prévoit, en effet, que le loyer ou toute redevance équivalente, à l'exception des charges, cesse d'être dus à compter du premier jour du mois qui suit la notification de l'arrêté d'insalubrité ou de péril ou son affichage. Ce dispositif s'inscrit dans le cadre d'une politique publique d'éradication de l'habitat indigne. Il est destiné à lutter contre les pratiques de propriétaires bailleurs indélicats qui louent des logements dont l'état nuit gravement à la santé ou à la sécurité des occupants, souvent des ménages en situation de grande fragilité sociale, économique voire sanitaire. Cet article du code de la construction et de l'habitation ne fait que consacrer au plan législatif une jurisprudence établie selon laquelle un locataire peut être exonéré du paiement du loyer lorsque le logement est devenu inhabitable, ou difficilement habitable, du fait de son état, et que le bailleur n'a lui-même pas respecté son obligation de délivrer un logement en bon état d'usage et de réparation ou de l'entretenir en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée. Cette exception pour inexécution était déjà reconnue par les tribunaux civils, pour qui un arrêté d'insalubrité ou de péril est analysé comme la perte de la chose louée. Les arrêtés d'insalubrité ou de péril sont des mesures de police prises pour assurer le respect de l'ordre public, dont font partie la salubrité et la sécurité publiques. Les mesures de police ne sont pas nécessairement prises après une procédure contradictoire. Cependant, en insalubrité et en péril, les arrêtés sont pris après des procédures formalisées, partiellement ou totalement contradictoires, au cours desquelles les propriétaires sont invités à faire connaître leurs observations ou à contester l'analyse des faits ou du risque. La loi précitée, a renforcé en matière d'insalubrité le principe du contradictoire : le préfet doit aviser les propriétaires au moins 30 jours à l'avance, délai qui était auparavant de 8 jours, de la tenue de la réunion la commission départementale compétente en matière d'environnement, de risques sanitaires ou technologiques dont l'avis fonde l'arrêté du préfet. Les propriétaires ont la faculté de produire leurs observations ainsi que d'être entendus par cette commission. La pratique administrative montre que les propriétaires, plus que les locataires, utilisent grandement cette faculté. Depuis l'institution de référé devant le juge administratif, procédure d'urgence, les propriétaires ont les moyens de droit de contester un arrêté d'insalubrité ou de péril qu'ils estimeraient infondé, par un « référé-suspension » ; si le juge suspend l'arrêté, les effets de droit en sont suspendus - dont le non-paiement des loyers - jusqu'au jugement au fond de la légalité de l'arrêté par le tribunal. Dans ces conditions, un propriétaire n'a pas à attendre des années de procédure pendant lesquelles il serait privé de loyers s'il a des motifs sérieux de contester le fondement de l'arrêté. Il faut toutefois souligner que l'annulation d'un arrêté d'insalubrité pour absence ou insuffisance d'éléments de fait est très rare. D'une part, la mise en oeuvre de ces mesures de police intervient après l'échec de mises en demeure préalables ou de procédures amiables. Dans le cadre du programme de lutte contre l'habitat indigne, des moyens humains et financiers ont été, en effet, spécialement dégagés pour faciliter le traitement amiable de l'habitat indigne et améliorer les conditions d'habitat. Dans ces conditions, les propriétaires de bonne foi ont toute possibilité de faire valoir leurs droits et de bénéficier d'aides publiques. De plus, dans le cas de présomption d'insalubrité, les propriétaires peuvent bénéficier d'aides majorées de l'ANAH pour entreprendre les travaux nécessaires. D'autre part, la menace de suspension des loyers s'est avérée être un outil de pression efficace vis-à-vis de propriétaires négligents ou défaillants, pour qu'ils réalisent les travaux. Enfin, en cas d'annulation d'un arrêté d'insalubrité ou de péril, le bailleur est en droit d'exiger de son locataire le paiement des loyers depuis le premier jour du mois qui suit la notification.
Auteur : M. Yves Jégo
Type de question : Question écrite
Rubrique : Urbanisme
Ministère interrogé : emploi, cohésion sociale et logement
Ministère répondant : emploi, cohésion sociale et logement
Dates :
Question publiée le 21 juin 2005
Réponse publiée le 4 octobre 2005