Question écrite n° 73701 :
orphelins

12e Législature

Question de : M. Éric Raoult
Seine-Saint-Denis (12e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Éric Raoult attire l'attention de M. le Premier ministre sur l'application du décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004. En effet, son prédécesseur avait pris position dans un courrier en date du 2 septembre 2003 adressé aux présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat. Dans cette lettre, M. Jean-Pierre Raffarin indiquait « qu'une indemnisation d'un montant identique » serait mise en place « afin de ne pas susciter de sentiment d'injustice » avec « une réponse conforme aux exigences de la justice et aux voeux des intéressés ». Le décret du 27 juillet 2004 visait à réparer l'injustice faite aux orphelins des victimes de la barbarie nazie, en leur accordant une indemnisation identique à celle dont ont bénéficié les orphelins victimes des mesures raciales, aux termes du décret du 13 juillet 2000. Malheureusement, il semblerait qu'un certain nombre de dossiers aient été rejetés par les services de l'ODAC de Caen, sous le prétexte qu'ils n'entraient pas dans le « périmètre » du décret. Un décret peut raisonnablement s'élargir quand cela est justifié. Ce fut le cas pour le décret précédent : il a été étendu à tous les orphelins « raciaux » (par le Sénat, le 28 décembre 2001), puis à certains orphelins, hors périmètre, par décision du Premier ministre en date du 11 février 2002. Il serait donc souhaitable d'assurer l'examen favorable de certains cas d'orphelins refusés, entrant dans les situations suivantes : ceux des déportés décédés après leur retour en France des suites incontestables du martyre enduré dans les camps de la mort ou d'extermination nazis ; ceux des résistants « morts au combat », un tri inacceptable est fait aujourd'hui, semble-t-il, selon la façon dont ils ont été massacrés par l'ennemi (or, tous les hommes et toutes les femmes, engagés dans la Résistance, morts glorieusement pour chasser l'occupant et rétablir notre République sont tous « morts au combat » et « morts pour la France ». Tous leurs orphelins doivent donc pouvoir bénéficier du décret. Il est à noter que diverses personnalités, comme Mme Simone Veil ou M. Philippe de Chartre, y étaient favorables). Enfin, il conviendrait d'ajouter à cette liste de dossiers ceux des massacrés sans arrestation préalable. Les associations d'orphelins de déportés, fusillés ou tués de France, militants de la mémoire UNODEF réclament également que puisse être établie une parité totale entre les deux décrets, celui de 2000 et de 2004, grâce à un accord sur les points suivants : d'une part, la prise en compte des orphelins décédés depuis 2000. Leurs ayants droit devraient percevoir le capital (leur exclusion sous prétexte que leurs parents n'aient pas été victimes des persécutions raciales ne serait pas compréhensible) ; d'autre part, la rétroactivité pour la rente depuis 2000. Les explications officielles qui prétendent que l'égalité ne peut exister que si les orphelins perçoivent 48 mensualités de moins que les orphelins bénéficiaires du premier décret sont peu admissibles ; enfin, il serait normal aussi que les prestations prévues par le décret de 2004 ne soient pas amputées par l'inflation sur quatre années. Les associations souhaiteraient non une indexation mais un réajustement ponctuel, tenant compte des indices officiels de hausse des prix de 2000 à 2004. Toutes ces revendications des associations apparaissent comme fondées et justifiées, il lui demande quelles initiatives il compte prendre pour y apporter une issue favorable. - Question transmise à M. le ministre délégué aux anciens combattants.

Réponse publiée le 15 novembre 2005

Comme le sait l'honorable parlementaire, le décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004 instituant une aide financière en reconnaissance des souffrances endurées par les orphelins dont les parents ont été victimes d'actes de barbarie durant la Seconde Guerre mondiale, a été publié au Journal officiel de la République française du 29 juillet 2004. Les orphelins des déportés résistants et politiques morts en déportation et des personnes arrêtées et exécutées, tels les fusillés, dans les conditions définies aux articles L. 274 et L. 290 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, bénéficieront ainsi d'une prestation d'un montant équivalent à celui fixé par le décret n° 2000-657 du 13 juillet 2000 instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites. Le ministre délégué aux anciens combattants tient à confirmer que les orphelins des personnes massacrées comme à Oradour-sur-Glane, Tulle, Vassieux-en-Vercors, Maillé ou dans d'autres villages martyrs bénéficient des dispositions du décret du 27 juillet 2004. Cette mesure marque l'aboutissement d'une démarche engagée dès le mois de mai 2002, à la demande du Président de la République. Le 2 septembre 2003, le Premier ministre, prenant connaissance des conclusions du rapport élaboré, à la demande du ministre délégué aux anciens combattants, par M. Philippe Dechartre, ancien résistant, ancien ministre du Général de Gaulle et de Georges Pompidou, avait annoncé la décision de principe du Gouvernement. Le travail de clarification visant à définir le périmètre des ressortissants éligibles à cette mesure a été soumis à l'avis du Conseil d'État. Il présente donc les meilleures garanties de solidité juridique. Ce décret, publié dans les délais annoncés, répond aux attentes exprimées par les parlementaires de tous les groupes de l'Assemblée nationale et du Sénat ainsi que par les associations du monde combattant et celles des victimes des persécutions nazies consultées par M. Dechartre. Pour ce qui est de l'application de ce texte de façon rétroactive au 13 juillet 2000, celle-ci conduirait, dans les faits, à créer une inégalité au détriment des orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites. En effet, l'application du principe de rétroactivité conduirait à verser à ceux des bénéficiaires qui choisiraient le versement de l'indemnité viagère un rappel de quatre années de rente en une seule fois d'un montant quasiment équivalent au montant du capital. Cette démarche reviendrait donc à octroyer le cumul de la rente et du capital aux orphelins relevant du décret du 27 juillet 2004, alors que les orphelins des victimes de la Shoah ont dû choisir entre l'une ou l'autre. Une telle procédure aurait donc bien pour effet de créer une inégalité, là où la démarche du Gouvernement vise à faire prévaloir l'équité entre les orphelins des victimes d'actes de barbarie au cours de la Seconde Guerre mondiale. La solution retenue est donc la seule à même de garantir une parfaite égalité entre les bénéficiaires des décrets précités. Si les modalités financières de ces deux indemnisations sont identiques, les dates d'entrée en jouissance ne peuvent donc être similaires aux motifs, d'une part, qu'il y aurait bien création d'une nouvelle inégalité entre les bénéficiaires des deux textes, et, d'autre part, qu'en droit français il n'existe pas de dispositions rétroactives des textes nouveaux, conformément aux dispositions de l'article 2 du code civil. Il n'est pas davantage possible, pour la même raison, de faire bénéficier des dispositions du décret du 27 juillet 2004 les orphelins de déportés décédés entre le 13 juillet 2000 et le 27 juillet 2004. S'agissant des orphelins de résistants morts au combat, il est certain que l'action et le courage de tous les volontaires qui se sont engagés dans les combats douloureux et glorieux de la Résistance pour sauver l'honneur de la France appellent une reconnaissance particulière à laquelle le ministre délégué aux anciens combattants attache la plus haute importance. Cependant, par une décision dont le caractère symbolique doit être souligné, il s'agissait essentiellement de reconnaître le caractère spécifique des souffrances endurées par les victimes d'actes de barbarie commis durant l'Occupation. C'est pourquoi les dispositions arrêtées par le décret du 27 juillet 2004 devaient nécessairement se limiter à prendre en compte des violences qui, excédant le cadre d'un état de belligérance se caractérisant par des affrontements armés, relevaient de la plus extrême inhumanité et frappaient des personnes dans l'incapacité de se défendre. Par ailleurs, il convient de préciser que la situation des orphelins de déportés décédés peu après leur retour des camps des suites des mauvais traitements subis, sera étudiée en fonction des circonstances spécifiques du décès. S'agissant du montant des indemnisations versées, que ce soit sous la forme du capital ou de la rente viagère, celui-ci est identique, que l'indemnisation ait été attribuée au titre du décret du 13 juillet 2000 pour les orphelins des persécutions antisémites, ou du décret précité du 27 juillet 2004 pour les orphelins des victimes d'actes de barbarie. Aucune mesure de revalorisation de cette dernière prestation n'est envisagée. En tout état de cause, le ministre est parfaitement conscient de l'étendue du drame vécu par les orphelins de guerre quels qu'ils soient et par tous ceux qui ont souffert des conséquences du second conflit mondial. Il souhaite préciser à ce sujet que les orphelins de guerre sont ressortissants de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC) et peuvent bénéficier, à ce titre, de l'assistance de cet établissement public, dispensée notamment sous la forme d'aides ou de secours en cas de maladie, absence de ressources ou difficultés momentanées. Il apparaît ainsi que le Gouvernement s'attache à faire prévaloir l'équité, dans le respect scrupuleux des situations spécifiques des différentes catégories de victimes de la Seconde Guerre mondiale.

Données clés

Auteur : M. Éric Raoult

Type de question : Question écrite

Rubrique : Anciens combattants et victimes de guerre

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : anciens combattants

Dates :
Question publiée le 20 septembre 2005
Réponse publiée le 15 novembre 2005

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