Question écrite n° 8434 :
mer et littoral

12e Législature

Question de : M. François Liberti
Hérault (7e circonscription) - Député-e-s Communistes et Républicains

M. François Liberti appelle l'attention de M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer sur le naufrage du pétrolier-poubelle Prestige qui constitue une catastrophe majeure pour tous les gens qui vivent de la mer. Une nouvelle marée noire a commencé dont l'ampleur semble devoir être plus importante que celle de l'Erika. Déjà le bilan forcément provisoire est très lourd, sans compter la réaction chimique qui se joue à 3 500 m de fond. La catastrophe ne doit rien au hasard ; le pétrolier Prestige est le symbole des dérives du transport maritime : navire âgé construit en 1976, à simple coque, propriété d'une société grecque enregistrée au Libéria, battant pavillon de complaisance des Bahamas et affrété par la filiale d'un négociant russe basée en Suisse. A cette opacité qui règne sur les réels propriétaires et responsables du navire, il y a incontestablement un non-respect de la réglementation par la société de classification qui a signé un certificat de navigation au Prestige alors que les mesures adoptées par l'Union européenne sur proposition de Jean-Claude Gayssot, alors ministre des transports, prévoient qu'il soit éliminé ne satisfaisant pas aux normes internationales. Qu'en est-il de leur application ? Il y a quelques jours, M. le Président de la République a déclaré que, pour la France, les navires de plus de quinze ans transportant des matières dangereuses seraient contrôlés et interdits de navigation dans la bande des 200 000 miles dès lors que les constatations auront permis d'établir leur dangerosité (sous normes). Pour ce faire, il faut des moyens, humains et matériels. Le taux actuel des contrôles se situe à 9 %. De plus, en matière de prévention contre les catastrophes et les pollutions marines, les dysfonctionnements constatés dans le naufrage du Prestige renforcent ses inquiétudes sur la nature de votre réponse à sa question écrite pour la Méditerranée et les côtes du Languedoc-Roussillon. Dans la réponse, il était fait référence au protocole d'accord signé le 22 juillet 2002, intitulé le Lion Plan équivalent méditerranéen du Biscaye Plan avec l'Espagne pour le golfe de Gascogne. Le naufrage du Prestige et les conséquences qui en découlent ne sont pas faites pour nous rassurer. En cas d'incident majeur dans le golfe du Lion, il faut pas moins de dix heures au seul remorqueur de haute mer (le Mérou) basé à Toulon pour se rendre sur zone. C'est totalement inopérant pour les côtes languedociennes. La Méditerranée n'est pas l'océan : mer fermée, sans marée, une catastrophe du type Erika ou Prestige serait sans précédent en terme de dommages sur l'environnement et la vie économique du littoral et de la région. Aussi, dans l'intérêt de la sécurité pour le transport maritime et de la protection environnementale des côtes du Languedoc-Roussillon, il est urgent de donner de véritables moyens nécessaires au contrôle de sécurité maritime et de baser, pour la sécurité, un remorqueur de haute mer en stationnement permanent dans le port de Sète.

Réponse publiée le 2 juin 2003

Le Prestige, pétrolier construit en 1976, devait être éliminé en 2005 selon le calendrier adopté en mai 2001 à la suite du naufrage de l'Erika par l'Organisation maritime internationale, calendrier que reprend le règlement européen 417/2002 du 18 février 2002. Le Conseil des transports du 27 mars 2003 vient d'adopter une modification, qui entrera en vigueur à l'été 2003, à ce règlement 417/2002. Elle a pour but d'accélérer l'entrée en service des pétroliers à double coque, d'exiger que certains produits pétroliers soient transportés dans des pétroliers à double coque, et de renforcer les contrôles de la structure des pétroliers. Son extension à l'échelle mondiale a été demandée à l'Organisation maritime internationale (OMI). A la suite du naufrage du Prestige, la France, l'Espagne et le Portugal ont mis en oeuvre dans leur zone économique exclusive des mesures de recherche, d'identification et de contrôle (par radio, voire par une équipe d'évaluation) des pétroliers simple coque de plus de quinze ans transportant certains produits pétroliers particulièrement polluants. Ces mesures provisoires sont encore en vigueur, mais la France, l'Espagne, la Belgique, le Portugal, le Royaume-Uni et l'Irlande ont présenté à l'Organisation maritime internationale une demande pour désigner certains espaces maritimes (allant du Nord de la Grande-Bretagne au sud du Portugal, et couvrant la Manche) comme zone maritime particulièrement vulnérable, en application de l'article 211.6 de la Convention sur le droit de la mer. En Méditerranée, la France est le premier pays à avoir institué une zone de protection écologique, par la loi 2003-346 du 15 avril 2003, afin d'accroître la capacité d'action de l'Etat. Les pétroliers à simple coque de plus de 15 ans faisaient jusqu'à présent l'objet des mêmes contrôles que tous les autres navires : par le département technique de leur armateur, par leur société de classification, par leur Etat du pavillon (qui a la possibilité de déléguer ces contrôles à une société de classification) et par les Etats du port. C'est ce dernier type de contrôles que renforcera la directive 2001/106, adoptée à la suite de l'Erika et intégrée dans la réglementation française par l'arrêté du 7 mars 2003. En effet, jusqu'à présent, les inspecteurs de l'Etat du port étaient libres de choisir les points inspectés, et les exercices demandés à l'équipage : ces aspects seront dorénavant encadrés beaucoup plus strictement. Par ailleurs, le taux moyen de contrôle s'est nettement amélioré : s'il était de 9,6 % et 16,4 % respectivement sur les années 2001 et 2002, le taux de contrôle mensuel dépasse 30 % depuis novembre 2002, ce qui porte le taux glissant sur une année à 21,9 %. Ceci s'explique par le doublement du nombre d'inspecteurs depuis l'Erika, et par l'appel à des vacataires, anciens navigants de la marine marchande. Mais il convient de responsabiliser également les autres acteurs des contrôles : armateur, société de classification, Etat du pavillon. C'est à ce titre que la France a demandé et obtenu le renforcement des contrôles sur les sociétés de classification (directive 2001/105, intégrée dans la réglementation française par arrêté du 11 mars 2003). Elle soutient l'instauration par l'OMI d'un régime d'inspection des Etats du pavillon, la définition de critères techniques réalistes d'inspection des navires anciens, y compris pour les pétroliers à double coque, et l'instauration de sanctions pénales en cas de rejets illégaux causant une pollution marine, dont le texte est en cours de discussion au sein de l'Union européenne. Enfin, pour ce qui concerne la mise en place à Sète d'un remorqueur, les moyens franco-espagnols déjà présents dans cette zone maritime, décrits en réponse à la question écrite n° 926 du 29 juillet 2002 du parlementaire, sont en cohérence avec le niveau de risques engendré par son trafic maritime.

Données clés

Auteur : M. François Liberti

Type de question : Question écrite

Rubrique : Déchets, pollution et nuisances

Ministère interrogé : transports et mer

Ministère répondant : transports et mer

Dates :
Question publiée le 9 décembre 2002
Réponse publiée le 2 juin 2003

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