statistiques
Question de :
M. Pierre Morel-A-L'Huissier
Lozère (2e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Pierre Morel-A-L'Huissier attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur le classement mondial « 2006 Index of Economic Freedom ». Cet indice de liberté économique, créé il y a dix ans sous le patronage de l'économiste Milton Friedman, est publié conjointement, chaque année, pat Heritage Foundation et le Wall Street Journal. Selon cette analyse, réalisée auprès de 161 pays, sur la base d'un certain nombre de critères (politique monétaire, politique commerciale, intervention du Gouvernement, salaires et prix, investissements étrangers, etc.), la France figure en 44e position, alors qu'elle était en 38e l'an passé. Elle est classée 24e dans l'Europe des 25, devant la Grèce, mais derrière les nouveaux pays de l'Est. En tête de l'Europe et avant les États-Unis, on retrouve l'Irlande (3), le Luxembourg (4) et la Grande-Bretagne (5). Si l'on peut toujours remettre en cause la valeur scientifique de ce classement, il affiche une tendance. Selon les auteurs de ce rapport, le marché du travail français est surréglementé avec une intrusion excessive de l'État qui freine son économie. Ils mettent également en exergue la violation du pacte de stabilité et de croissance de l'Union européenne, « pour la troisième année consécutive ». En conséquence, il souhaiterait connaître l'avis du Gouvernement en la matière.
Réponse publiée le 18 avril 2006
La liberté économique est une condition de la croissance. Le rapport Index of Economic Freedom suggère qu'il existe une corrélation entre la liberté économique et la croissance à long terme. Cependant, l'abaissement des réglementations ne signifie pas toujours plus de croissance. C'est notamment le cas des réglementations protégeant la santé des employés, la sécurité des consommateurs ou l'environnement, que l'indice considère comme systématiquement contraire à la croissance. L'expérience prouve que ce n'est pas vrai : une certaine forme de sécurité pour les salariés et les consommateurs est importante également pour stimuler la productivité, ou pour stimuler la consommation. L'importance à accorder à la publication de cet indice ne doit donc être que relative. Aussi critiquable que soit la portée de cet indicateur, il convient d'attirer l'attention sur le fait que, depuis 2002, le score et le classement de la France n'ont cessé de s'améliorer. Alors qu'en 2002 la France se situait à la 61e place, elle occupe la 54e en 2003, la 47e en 2004, la 44e en 2005 et en 2006. Le classement de 2006 est ainsi loin d'être mauvais au regard des classements antérieurs. Si les critères qualitatifs recueillis par les enquêtes du type de celle réalisée pour l'Index of Economic Freedom ne peuvent complètement guider l'action publique, ils soulignent cependant des faiblesses que le Gouvernement s'attache à éliminer. Le rapport met en avant le caractère « surréglementé » du marché du travail français. La politique actuelle du Gouvernement va précisément dans le sens de l'assouplissement de la réglementation du marché du travail. Les dispositions les plus contraignantes de la loi de modernisation sociale, et notamment celles sur les licenciements, ont été supprimées. Les lois de janvier 2003 et janvier 2005 ont largement permis de limiter les contraintes qu'avait imposées la mise en place de la réduction du temps de travail : le recours aux heures supplémentaires a été facilité. Le rapport considère également que la France n'a pas respecté le pacte de stabilité et de croissance en 2002, 2003 et 2004. Ce non-respect devrait prendre fin dès 2005 puisque le projet de loi de finances prévoit un déficit public de 3 %. En 2006, celui-ci devrait même se réduire à 2,9 %. L'effort de consolidation de nos finances publiques devrait se poursuivre les prochaines années. Le rapport Pébereau et la Conférence nationale des finances publiques ont en effet été l'occasion d'une large appropriation par l'ensemble de acteurs (État, collectivités locales et sécurité sociale, partenaires sociaux) de la nécessité de maîtriser les comptes public, s'appuyant en particulier sur une maîtrise stricte de la dépense publique. Une des critiques fortes adressées par le rapport à la France est le caractère trop intrusif de l'État français dans l'économie. Pourtant, le Gouvernement est parvenu à améliorer le score de la France de deux points cette année pour la catégorie « intervention de l'État dans l'économie », notamment grâce aux privatisations. In fine, la stagnation de la France dans le classement général en 2006 provient principalement de la détérioration de son score en ce qui concerne la réglementation portant sur les flux de capitaux et les investissements étrangers. La France a en effet durci sa législation en décembre 2005 de façon à pouvoir empêcher les entreprises stratégiques françaises d'être sous contrôle étranger non communautaire. Ce changement justifié du point de vue des intérêts nationaux est injustement interprété par le rapport comme une entrave à la liberté économique alors qu'il ne s'agit que de mettre la France au standard européen. En tout état de cause, si les indicateurs de ce type, malgré leur fragilité, doivent être suivis, c'est parce qu'ils sont vraisemblablement surveillés par les investisseurs étrangers. Néanmoins, ils ne peuvent remplacer les indicateurs de performance concernant les investissements étrangers en tant que tels. Or, fin 2003, la France concentrait sur son territoire 5,3 % des investissements mondiaux, au cinquième rang des principales destinations de l'investissement direct étranger, derrière les États-Unis, le Royaume-Uni, l'Allemagne et la Chine.
Auteur : M. Pierre Morel-A-L'Huissier
Type de question : Question écrite
Rubrique : Relations internationales
Ministère interrogé : économie
Ministère répondant : économie
Dates :
Question publiée le 7 février 2006
Réponse publiée le 18 avril 2006