DOM : Guyane
Question de :
Mme Martine Aurillac
Paris (3e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
Mme Martine Aurillac appelle l'attention de M. le ministre de l'outre-mer sur les conséquences de l'exploitation de l'or en Guyane. La Guyane, terre d'Amérique du Sud, constitue une des zones les plus riches du monde en matière de biodiversité, et notamment en ce qui concerne des espèces animales et végétales rares. Malheureusement, des dégâts considérables sont causés à ce patrimoine naturel, en particulier, par les orpailleurs - le plus souvent venus du Brésil, presque tous en situation irrégulière - utilisant d'importantes quantités de mercure pour extraire l'or qui se trouve dans le lit des rivières guyanaises et qui, par leurs rejets dans l'eau, causent de graves maladies dont sont victimes les populations locales. Certes, des actions de lutte contre les installations d'orpaillage clandestin ont été entreprises depuis le début de l'année 2003, avec l'aide notamment d'escadron de gendarmes mobiles, entièrement dédié à cette lutte avec le concours des moyens aériens des forces armées guyanaises. La loi du 29 mars 2003 (LOPSI) a modifié l'article 140 du code minier pour permettre, à la demande du procureur, la destruction des matériels saisis utilisés par les orpailleurs clandestins. Mais la végétation et le relief rendent difficile l'accès à certaines de ces zones. Or l'utilisation du mercure cause des dégâts importants tant sur le plan de la santé que sur le plan environnemental. Aussi, elle lui demande quels moyens sont mis en oeuvre pour lutter efficacement contre ces clandestins qui ont recours à l'utilisation du mercure pour extraire de l'or et quels sont les résultats de ces efforts mis en place depuis plusieurs années.
Réponse publiée le 18 juillet 2006
La Guyane, qui par sa production aurifère situe la France approximativement au 50e rang mondial, est confrontée de manière persistante au phénomène de l'orpaillage clandestin que, depuis de nombreuses années, l'État s'emploie à combattre. Les résultats obtenus après un renforcement considérable des moyens engagés, sont conséquents et encourageants. La prise en compte rapide du problème de l'orpaillage clandestin : à la suite d'un rapport remis en décembre 2000 au ministère de l'outre-mer par la commission parlementaire présidée par la députée de Guyane Madame Taubira, un comité interministériel s'est réuni pour la première fois en janvier 2001. A cette même date, un escadron de gendarmerie mobile a été spécialement mis à la disposition du préfet de Guyane pour lutter contre l'orpaillage clandestin et sécuriser la région de Maripasoula ; il s'ajoutait alors aux trois escadrons déjà présents dans le département. La mise en place d'un dispositif normatif plus adapt : La loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice a modifié l'article 140 du code minier qui permet, sur directive du procureur de la République, de détruire les matériels saisis utilisés par les orpailleurs irréguliers et les aménagements illégalement installés sur le domaine de l'État. Cette pratique est désormais systématique et permet de neutraliser entièrement un site illicite. En outre, sur le fondement d'un arrêté préfectoral ordonnant la remise en état du domaine public, les constructions illégales constatées sont à présent détruites par les services de gendarmerie. Par ailleurs, la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure a prorogé (art. 141 et 142), pour le département de la Guyane, les mesures dérogatoires édictées en 1998 pour cinq ans, qui privent d'effet suspensif les recours formés contre les arrêtés préfectoraux de reconduite à la frontière. L'article 143 de cette même loi a étendu la possibilité d'effectuer des contrôles d'identité sur le fondement de l'article 78-2 du code de procédure pénale de part et d'autre de la RN2, sur le territoire de la commune de Régina, zone de passage des clandestins en provenance du Brésil. Enfin, par arrêté préfectoral, l'utilisation du mercure pour l'exploitation aurifère est interdite dans l'ensemble du département de la Guyane depuis le 1er janvier 2006. La poursuite des actions de coopération régionale. La coopération avec les pays frontaliers est nécessaire pour freiner en amont l'immigration illégale et faciliter ensuite les reconduites à la frontière. Le ministère de l'outre-mer mène en conséquence une politique active en vue de signer des accords de réadmission avec les États environnants. Un tel accord a été signé avec le Brésil le 28 mai 1996 et est entré en vigueur le 24 août 2001, après son approbation par le Parlement brésilien. Son application ne soulève pas de problèmes particuliers. Pour le Surinam, l'accord a été signé le 30 novembre 2004 à Paris. Il a pour objet principal de permettre que les ressortissants du Guyana soient reconduits à la frontière de leur pays par les autorités surinamiennes, reprenant ainsi leur coopération avec les autorités françaises, interrompue en janvier 2001. La réadmission des Surinamiens s'effectue sans difficultés notables et le principe de l'installation d'une antenne consulaire du Surinam à Saint-Laurent-du-Maroni est acquis (le Surinam dispose déjà d'une représentation à Cayenne). Par ailleurs, un accord de coopération policière pourrait également suivre avec notamment la création d'un service commun à Saint-Laurent-du-Maroni. En ce qui concerne enfin le Guyana, les négociations, entamées en juillet 2001, sont toujours en cours car les autorités guyaniennes refusent à ce stade de réadmettre certains de leurs ressortissants démunis de documents d'identité. Lorsque la nationalité sera présumée, le texte du projet d'accord prévoit la délivrance d'un laissez-passer consulaire par les autorités guyaniennes, contre remboursement. La signature de cet accord exige donc en préalable l'ouverture d'un consulat du Guyana à Cayenne. Afin d'aboutir rapidement, plusieurs initiatives ont été entreprises par la partie française pour la création de ce consulat avec notamment la mise à disposition d'un local par la mairie de Cayenne et la prise en charge des frais de fonctionnement par le ministère de l'outre-mer. La signature définitive est donc attendue rapidement. Le renforcement des moyens humains et logistiques spécifiques : L'escadron de gendarmerie mobile déployé depuis janvier 2001 en Guyane a été pérennisé au conseil de sécurité intérieur (CSI) d'août 2002. De plus, depuis le 9 avril 2004, sur instruction du président de la République lors du CSI du 9 mars 2004, un deuxième escadron est venu renforcer le dispositif mis à la disposition du préfet de la Guyane. Deux escadrons de gendarmerie mobile, soit 150 militaires, sont donc spécialement affectés aux opérations de lutte contre l'orpaillage illicite en forêt. Par ailleurs, un commissariat de la police aux frontières (PAF) vient d'être créé à Saint-Georges-de-l'Oyapock. Actuellement à l'effectif de 24 policiers, ce commissariat va être progressivement porté à 60 fonctionnaires pour 2008. Enfin, depuis 2003, le ministère de l'outre-mer met en place un budget spécifique de plus de 150 000 euros pour permettre au préfet de la Guyane d'engager les moyens aériens nécessaires à cette lutte et assurer le transport des forces de l'ordre en forêt profonde. Ainsi, lorsque les Puma des armées ne peuvent apporter leur concours, ce budget permet la location d'hélicoptères civils. Les résultats obtenus, les opérations « Anaconda » : Le ministère de l'outre-mer conduit une stratégie de lutte contre les filières clandestines qui vise non seulement les sites clandestins installés en forêt mais l'ensemble du système économique parallèle qui les soutient (approvisionnement en matériels divers, filières d'immigration, etc.). Par ailleurs, le préfet de la Guyane et le procureur de la République près le TGI de Cayenne, en totale collaboration, mettent en oeuvre des opérations de contrôle de sites dénommées « Anaconda » en associant l'ensemble des administrations concernées de l'État (justice, gendarmerie, police aux frontières, mais aussi direction régionale de l'industrie de la recherche et de l'environnement, direction régionale de l'environnement, douanes, services fiscaux ou direction de l'agriculture et de la forêt). Depuis 2001, le nombre des opérations « Anaconda » et les résultats obtenus n'ont cessé de progresser. Ainsi, de 17 en 2001, le nombre de ces opérations est passé à 107 pour l'année 2005. Ci-après, un tableau récapitulatif des principaux résultats obtenus ces dernières années.
2003 | 2004 | 2005 | |
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Nombre d'opérations | 37 | 73 | 107 |
ESI interpellés (1) | 1 085 | 1 605 | 1 252 (2) |
Or saisi (en kg) | 8,6 | 9,09 | 12,70 |
Mercure saisi (en kg) | 63 | 98,4 | 63,46 |
(1) ESI : étrangers en situation irrégulière. | |||
(2) dont 1 222 de nationalité brésilienne. |
Auteur : Mme Martine Aurillac
Type de question : Question écrite
Rubrique : Outre-mer
Ministère interrogé : outre-mer
Ministère répondant : outre-mer
Dates :
Question publiée le 14 février 2006
Réponse publiée le 18 juillet 2006