politique pénale
Question de :
M. Armand Jung
Bas-Rhin (1re circonscription) - Socialiste
M. Armand Jung appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur l'interprétation de la loi du 6 juillet 2005 portant « diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la justice ». Au niveau européen, la décision cadre du 22 juillet 2003 oblige les États membres à prendre des mesures nécessaires afin d'établir un régime de responsabilité pénale des personnes impliquées dans la corruption. Dans ce contexte, la loi du 6 juillet 2005 prévoit un dispositif, afin de se conformer au droit communautaire, en ce qui concerne la corruption active et passive, notamment dans le secteur privé. L'article 3, notamment, transpose en droit interne la décision cadre du Conseil de l'Union européenne du 22 juillet 2003 relative à la lutte contre la corruption dans le secteur privé. Il y a lieu de s'interroger sur la possibilité ou non de commissionner un professionnel qui conseille ou prescrit la vente d'un produit ou d'un service à sa clientèle sans que celle-ci soit informée ou ait connaissance de l'existence d'un quelconque commissionnement. Pour les commerçants ayant un produit à commercialiser et dans la mesure où un client normalement informé a conscience que le vendeur touche une commission, il peut paraître normal qu'aucune sanction ne soit encourue. En revanche, dans le domaine du conseil et en présence d'un prestataire de services rémunéré par son client afin de lui apporter aide et assistance, n'est-il pas manifestement contraire à la mission et aux obligations déontologiques de ces professionnels de toucher, directement ou indirectement, une commission, pour prescrire ou conseiller le choix d'un fournisseur, surtout si ce commissionnement n'est pas connu du client ? En effet, le texte de loi ne vise pas le respect de la déontologie et des obligations professionnelles. En conséquence, il souhaite connaître son avis et lui demande si tout conseil n'a pas une obligation d'impartialité et de désintéressement, tout particulièrement s'il exerce une profession libérale, comme le stipule la déontologie. - Question transmise à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
Réponse publiée le 17 octobre 2006
Le garde des sceaux, ministre de la justice, est en mesure de fournir à l'honorable parlementaire les éléments suivants : la loi n° 2005-750 du 4 juillet 2005 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la justice a créé une infraction générale de corruption dans le secteur privé. Cette nouvelle incrimination vise tout particulièrement à garantir la transparence et la loyauté dans l'exécution des obligations légales, contractuelles ou professionnelles entre personnes privées. Ainsi, le nouvel article 445-1 du code pénal sanctionne le fait de proposer une contrepartie à une personne privée afin qu'elle accomplisse ou s'abstienne d'accomplir un acte de son activité ou de sa fonction, en violation de ces obligations. Les notions d'obligations légales, contractuelles ou professionnelles recouvrent l'ensemble des règles régissant l'exercice d'une profession. Ainsi, les obligations légales concernent les dispositions applicables aux professions réglementées (avocats, commerçants...), les obligations contractuelles sont en particulier constituées pour les salariés des clauses de loyauté, de non-concurrence ou de confidentialité figurant dans leur contrat de travail et les obligations professionnelles peuvent recouvrir notamment les règles déontologiques prévues dans de nombreuses professions. Dans l'hypothèse évoquée, le fait pour un fournisseur de verser une commission à un professionnel du conseil afin que ce dernier oriente le choix d'une entreprise en faveur dudit fournisseur pourrait constituer un acte de corruption dès lors qu'en fournissant un conseil orienté par la perception d'une commission, le professionnel viole une obligation contractuelle de loyauté envers son client auquel l'intéressement perçu n'est pas révélé. Le fournisseur se rendrait ainsi coupable d'une corruption active et le prestataire de conseil d'une corruption passive, respectivement prévues et réprimées aux articles 445-1 et 445-2 du code pénal.
Auteur : M. Armand Jung
Type de question : Question écrite
Rubrique : Droit pénal
Ministère interrogé : économie
Ministère répondant : justice
Signalement : Question signalée au Gouvernement le 10 octobre 2006
Dates :
Question publiée le 18 avril 2006
Réponse publiée le 17 octobre 2006