médecine légale
Question de :
M. Dominique Tian
Bouches-du-Rhône (2e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Dominique Tian attire l'attention de M. le ministre de la santé et des solidarités sur le rapport rendu le 4 mai dernier par la mission conjointe de l'inspection générale des affaires sociales (IGAS) et l'inspection générale des services judiciaires (IGSJ) sur la médecine légale et qui se prononce en faveur d'un nouveau cadre législatif et réglementaire réorganisant son fonctionnement et son financement. Saisis en décembre 2004, les inspecteurs des services judiciaires et des affaires sociales constatent après leur enquête que la médecine légale reste une activité « mal identifiée, faiblement structurée et peu évaluée », avec une « organisation et un financement disparates ». L'activité de médecine légale est quantitativement importante entre 8 000 et 8 500 autopsies, 11 000 levées de corps et près de 400 000 actes de médecine légale du vivant. La dépense engendrée par cette activité, qui a avoisiné 80 millions d'euros en 2004, est également non négligeable. Les auteurs du rapport précisent qu'elle correspond à plus de 25 % du montant total des frais de justice en matière pénale. Le financement est assuré essentiellement par le budget du ministère de la justice. La mission a constaté que « cette activité essentielle au bon fonctionnement de la justice dépend actuellement largement des initiatives et du dynamisme des acteurs locaux en l'absence de tout encadrement national ». Pour mettre fin à la grande « disparité des pratiques » qu'elle a constatée, la mission préconise de donner un cadre législatif et réglementaire à cette activité. Elle rappelle que la partie législative du code de santé publique ne mentionne ni la « médecine légale », ni le « médecin légiste ». « La médecine légale ne figure pas au nombre des missions des établissements de santé ou du service public hospitalier », ajoute-t-elle. Les auteurs constatent que « des circulaires peu structurantes et mal articulées entre elles se sont succédé depuis quelques années ». Les prescriptions des circulaires « n'ont guère été mises en oeuvre » et elles ont contribué « au morcellement de la médecine légale » et à la confusion sur son champ d'intervention. La mission relève une grande inégalité d'implantation des structures assurant la médecine légale du vivant et les levées de corps. Cette situation « place les parquets et les services de police et de gendarmerie dans une situation difficile en dehors des grandes agglomérations ». « Le potentiel de formation en médecine légale est menacé par le triplement en deux ans du nombre de CHRU ne comportant plus à leur effectif hospitalo-universitaire de praticien de médecine légale ». Pour améliorer l'organisation, la mission propose de faire des établissements publics hospitaliers en capacité d'assurer des prestations couvrant l'ensemble du champ de la médecine légale des « centres de référence ». Ces hôpitaux centres de référence pourraient constituer un « service de médecine légale » et seraient chargés d'animer « un réseau d'établissement de proximité comportant chacun une unité médico judiciaire ». Cette unité médico judiciaire se chargerait des levées de corps et de la médecine légale du vivant. « Les médecins libéraux qui assurent aujourd'hui une large part de l'activité médico-légale, seraient associés à chacun de ces niveaux ». Le rapport préconise que cette organisation soit conçue par les agences régionales de l'hospitalisation (ARH) en liaison avec les autorités judiciaires locales et prenne la forme d'un schéma régional d'organisation de la médecine légale. « Le réseau régional étant constitué, des conventions seraient signées entre les juridictions et les établissements sur la base d'une convention-typeélaborée conjointement par les ministères de la justice et de la santé ». Pour « stabiliser le potentiel de formation », la mission préconise d'inscrire au nombre des priorités du ministère de la santé, l'objectif d'avoir au moins un enseignement de médecine légale par CHU. L'augmentation régulière des dépenses de médecine légale ces dernières années est liée à des facteurs « faiblement maîtrisables », constate la mission qui cite notamment l'augmentation du nombre d'affaires traitées par les tribunaux en matière de délinquance, le développement des moyens de preuve scientifique et l'attention accrue portée aux victimes. La mission préconise de modifier les sources et l'organisation du financement. Elle estime qu'un financement essentiellement basé sur les frais de justice n'est ni suffisant, ni satisfaisant. Elle constate que « l'insuffisance des tarifs fixés par le code de procédure pénal est manifeste notamment pour les autopsies ». Et « globalement l'équilibre budgétaire n'est pas assuré ». Le rapport évalue de 12 à 13 millions le montant des frais de justice perçu par les structures de médecine légale en 2004 alors que leurs dépenses de fonctionnement se sont élevées à 16,4 millions. Pour mettre en place un « financement juste, transparent et pérenne de la médecine légale », la mission propose de réexaminer les tarifs dus au titre des frais de justice (notamment pour les autopsies). Mais surtout, elle propose de créer « une contribution de l'assurance maladie pour les examens médico-légaux des victimes ». Elle considère en effet que cette activité comporte une « forte dimension de soin » et qu'elle « pourrait, à ce titre, être inscrite au nombre des missions d'intérêt général des hôpitaux ». Elle propose que la totalité des financements (assurance maladie et justice) soit versée par les ARH aux hôpitaux sous la forme d'une dotation globale. Cette dotation serait « calculée sur la base de l'activité de l'année antérieure avec ajustement en fin d'exercice ». Chaque établissement aurait notamment la charge de rémunérer les médecins libéraux participant au réseau. Le paiement des prestations assurées en dehors du réseau pourrait être centralisé au niveau du ministère de la justice de façon à « mettre fin à la procédure actuelle qui est complexe, lente, coûteuse et inadaptée ». La mission propose enfin de restaurer un conseil supérieur de la médecine légale « pour faciliter une harmonisation des pratiques tant judiciaires que médicales ». Il lui demande donc de bien vouloir lui indiquer les suites qu'il entend donner à ces propositions.
Auteur : M. Dominique Tian
Type de question : Question écrite
Rubrique : Justice
Ministère interrogé : santé et solidarités
Ministère répondant : santé, jeunesse et sports
Date :
Question publiée le 9 mai 2006