sécurité des biens et des personnes
Question de :
M. Michel Lefait
Pas-de-Calais (8e circonscription) - Socialiste
M. Michel Lefait appelle l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, sur les vives inquiétudes exprimées par de nombreuses associations et syndicats, nombre d'enseignants, d'éducateurs spécialisés et d'élus locaux en ce qui concerne le projet de loi sur la prévention de la délinquance. En effet, la restauration de l'autorité de l'État induit une politique active de prévention, qui s'attaque aux racines de la délinquance et non seulement à ses effets. Une politique de fermeté, mise en oeuvre avec une approche compréhensive est ainsi plus que nécessaire. Il ne faut pas laisser à la dérive nos jeunes en difficulté, qui ont besoin de repères et de règles. Or le projet de loi relatif à la prévention de la délinquance ne semble pas apporter une réponse adéquate à ce problème. Il soulève plus d'inquiétudes qu'il ne donne de solutions responsables et efficaces en accord avec notre conception de la République. Nombre de dispositions peuvent être interprétées comme des atteintes à nos libertés fondamentales. Certes la disposition contestée sur « le repérage précoce des troubles psychiques » à fins de lutte contre une délinquance à venir a disparu du projet mais pourrait être réintroduite dans un autre projet de loi. Par ailleurs, le transfert des compétences de l'État sur le maire, qui n'est ni policier ni juge n'emporte pas l'adhésion des intéressés tous partis confondus ; les maires sont prêts à coordonner une politique locale de prévention de la délinquance mais non à sanctionner les jeunes en personne. En outre, les éducateurs spécialisés font part de leurs préoccupations quant à la suppression de la confidentialité des confidences qu'ils recueillent avec l'élargissement de la notion de secret partagé. Cela briserait toute relation de confiance entre éducateurs et jeunes en difficulté et hypothèque toute réussite d'une politique de prévention. C'est ainsi qu'une fronde contre le projet s'est progressivement mise en place avec de nombreuses manifestations et des pétitions d'horizons différents, dont l'une a réuni plus de 200 000 signataires. Il lui demande en conséquence de répondre aux vives inquiétudes des maires et des acteurs de la prévention de la délinquance en prenant toutes les mesures nécessaires à cette fin.
Réponse publiée le 26 septembre 2006
L'honorable parlementaire estime que la restauration de l'autorité de l'État induit une politique active de prévention qui s'attaque aux racines de la délinquance, et non seulement à ses effets. Il considère qu'il ne faut pas laisser à la dérive nos jeunes en difficulté, qui ont besoin de repères et de règles. C'est précisément dans cet esprit qu'a été élaboré le projet de loi relatif à la prévention de la délinquance, lequel exprime autant une méthode nouvelle, fondée sur une coordination locale des acteurs autour du maire, que des objectifs nouveaux, adaptés aux réalités de la délinquance. Prioritairement dirigée vers les mineurs, cette politique se fonde sur un pilier central qui est l'éducation. Le repérage et l'appropriation des limites constituent en effet une pédagogie nécessaire à la construction de soi et à l'apprentissage de la vie sociale, et cette action éducative permet d'expliquer le caractère nécessaire de la sanction, afin qu'elle soit admise et ne conduise pas à des comportements réitératifs. La protection des personnes les plus vulnérables est un corollaire immédiat de cette politique. Si l'Etat détermine les orientations nationales de la prévention, il ne peut pourtant être seul à porter un projet de cette ampleur, et il est nécessaire de développer une capillarité des compétences. Les politiques publiques de prévention, dont le succès dépend directement de la proximité des personnes et de la coordination des acteurs, n'ont en effet jamais bien fonctionné dans notre pays, faute de responsable pour coordonner les dispositifs locaux. Le maire est naturellement le mieux placé pour remplir cette mission. En juillet 2002, il a déjà acquis une place nouvelle, en tant que président du conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance, et il est aujourd'hui prévu de généraliser ces structures dans les villes de plus de 10 000 habitants. Pour autant, l'État n'abandonne en rien ses prérogatives, dans la mesure où chaque préfet élabore un plan départemental de prévention de la délinquance et reste responsable de l'application des politiques nationales, tels que le financement des projets relevant de la « politique de la ville ». Par ailleurs, le fait que les responsabilités du maire soient juridiquement consacrées ne fait de lui ni un policier ni un magistrat. Elles lui permettent précisément d'agir en amont de la police et de la justice pour prévenir la délinquance de façon efficace, mais non coercitive, et c'est pour cette raison que le maire doit être le président du conseil pour les droits et devoirs des familles. Cette nouvelle instance, qui généralise des pratiques locales, a vocation à être le lieu de coordination des dispositifs existants, tout en fournissant une occasion de dialogue aux familles intéressées et en étant une instance de proposition pour le maire. Ce dernier pourra ainsi, pour certaines atteintes aux règles régissant la vie sociale, comme les troubles de voisinage, le défaut de surveillance ou d'assiduité scolaire, proposer une mesure d'accompagnement parental ou demander au directeur de la caisse d'allocations familiales, de mettre en place des mesures d'aide et de conseil, toujours dans l'intérêt de l'enfant et de la famille. Le maire sera également en capacité d'effectuer des rappels à l'ordre, pour des faits certes mineurs mais qui ne doivent pour autant pas rester sans réponse ; il s'agit, là encore, d'intervenir en amont de la sanction pénale. Le projet de loi relatif à la prévention de la délinquance permettra enfin la mise en oeuvre du partage d'informations entre les acteurs sociaux et les professionnels de santé, dans le respect du secret professionnel. De nombreuses initiatives locales existent dans ce domaine, qui ont parfois donné lieu à des chartes de confidentialité ; la consécration législative est apportée par le projet de loi. Et, par respect du principe de la confidentialité de l'information, c'est par l'intermédiaire d'un coordonnateur social que le maire, autorité administrative générale, recevra des informations sur des situations particulièrement graves, indispensables à l'exercice de ses compétences.
Auteur : M. Michel Lefait
Type de question : Question écrite
Rubrique : Sécurité publique
Ministère interrogé : intérieur et aménagement du territoire
Ministère répondant : intérieur et aménagement du territoire
Dates :
Question publiée le 11 juillet 2006
Réponse publiée le 26 septembre 2006