Constitution européenne
Question de :
Mme Marie-George Buffet
Seine-Saint-Denis (4e circonscription) - Député-e-s Communistes et Républicains
Question posée en séance, et publiée le 12 mai 2004
RATIFICATION DU PROJET DE CONSTITUTION EUROPÉENNE
M. le président. La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.Mme Marie-George Buffet. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Voilà onze mois que le projet de traité établissant une constitution pour l'Europe a été rendu public. Depuis des mois, nous demandons un grand débat populaire et un référendum sur ce texte fondamental qui propose de graver le libéralisme, le contenu du traité de Maastricht, dans le marbre constitutionnel. A l'approche des élections européennes, la démocratie y gagnerait, tant ce texte focalise à lui seul la problématique européenne.
On me répondra qu'il n'est pas définitif. Raison de plus pour ne pas le soustraire à la sagacité des électeurs et électrices qui auront à se prononcer le 13 juin sur les grandes orientations de l'Union.
Les Françaises et les Français doivent savoir que l'Europe de l'emploi et l'Europe sociale auxquelles ils aspirent sont incompatibles avec une constitution libérale qui consacre le règne des marchés financiers, la casse des systèmes de solidarité. La défense des services publics et des droits sociaux est incompatible avec la libre concurrence, érigée en dogme dès l'article 1-3. La démocratie est incompatible avec l'inscription dans la constitution d'un principe économique sans possibilité de retour en arrière.
Pour une Europe solidaire, il faut un autre traité, d'autres finalités humaines, sociales et démocratiques.
Pour permettre aux citoyennes et citoyens de faire un véritable choix en votant lors de ces élections, il faut mettre le traité constitutionnel au coeur du débat européen. Sa ratification ne peut relever à nos yeux que d'une grande consultation populaire. Il faut donner à nos concitoyens la possibilité de choisir. C'est un droit, c'est une question de démocratie. Une majorité d'entre eux demandent la tenue d'un référendum. De plus en plus de forces politiques, y compris de votre majorité, se rallient à cette idée.
Monsieur le Premier ministre, allez-vous produire l'effort d'information nécessaire sur ce projet de constitution ? Les Françaises et les Français seront-ils consultés par référendum ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Madame la députée, merci de poser cette question importante. Nous vivons en effet une période historique. L'Europe sort de la tragédie, " l'Europe de l'Est " n'existe plus, l'Europe vient de se définir un nouveau périmètre, une nouvelle géographie, c'est l'élargissement.
Nous avons souhaité depuis toujours que l'élargissement aille de pair avec un approfondissement institutionnel pour que l'Europe à vingt-cinq puisse fonctionner efficacement. Il nous faut donc un traité constitutionnel. Aujourd'hui, chère madame, ce traité n'est pas acquis car un certain nombre de principes fondamentaux auxquels tient la France ne sont pas encore inscrits.
Nous souhaitons qu'au Conseil européen du 18 juin, un accord se dégage sur des positions acceptables par tous, y compris, évidemment, par la France, notamment sur ce qui est pour nous un élément clé, la règle de la double majorité, la majorité des Etats certes, mais aussi la majorité des peuples, qui est le signe de la démocratie. Alors oui à un traité constitutionnel mais pas n'importe lequel !
Vous semblez considérer que le Conseil européen sera un succès et vous parlez de ratification. Je vous rappelle qu'il faut d'abord se mettre d'accord sur le traité européen. Une fois que nous aurons satisfaction, viendra le temps de la ratification. Il devra alors y avoir, au sein de la représentation nationale et dans l'ensemble du pays, un large débat, notamment pour savoir quel mode de ratification nous voulons pour la France. (" Un référendum ! " sur de nombreux bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. Maxime Gremetz. Par le peuple !
M. le Premier ministre. De toute façon, c'est le peuple qui décide, ...
M. Maxime Gremetz. Il est souverain !
M. le Premier ministre. ...soit directement par référendum, soit indirectement par la représentation nationale. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Mme Martine David. Ça, c'est un scoop !
M. le Premier ministre. Personne ici ne pourra nier que le peuple, en cette chambre, est rassemblé.
Les familles politiques se sont exprimées sur le mode de ratification souhaitable. Je suis heureux de constater que ma propre famille politique, l'UMP, a proposé récemment le référendum. (Applaudissements sur divers bancs.) Que chacun s'exprime, que les uns et les autres fassent connaître leur souhait, et, le moment venu, selon les lois de la République et conformément à nos institutions, le chef de l'Etat, Président de la République, tranchera. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Auteur : Mme Marie-George Buffet
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Union européenne
Ministère interrogé : Premier ministre
Ministère répondant : Premier ministre
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 12 mai 2004