sécurité des biens et des personnes
Question de :
M. Manuel Valls
Essonne (1re circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 10 juin 2004
VIOLENCES URBAINES
M. le président. La parole est à M. Manuel Valls, pour le groupe socialiste.M. Manuel Valls. Monsieur le ministre délégué à l'intérieur, ma question est marquée du sceau de la tristesse, de la révolte et de l'incompréhension des citoyens de ma commune, Évry. Il y a quelques jours, alors que deux jeunes s'affrontaient dans la rue pour un différend absurde, une balle perdue mettait fin à la vie de Laura Bertolino. Ses obsèques ont eu lieu lundi matin.
Ce drame pose à nouveau la question des jeunes délinquants, de plus en plus jeunes, de plus en plus violents, et des atteintes aux personnes qui ne cessent d'augmenter. Mais mon propos portera sur la circulation et le trafic des armes. On estime que de 15 à 25 millions d'armes circulent en France, importées légalement ou illégalement de pays en guerre ou de l'est de l'Europe par des réseaux criminels et mafieux.
Après le drame de Nanterre, en mars 2002, Daniel Vaillant avait créé un office pour la répression du trafic des armes et des munitions,...
M. Yves Deniaud. Il aurait pu se réveiller plus tôt !
M. Manuel Valls. ...mais il manque cruellement de moyens...
M. Jean-Michel Ferrand. Que ne lui en avez-vous donné ?
M. Yves Deniaud. Ils n'ont rien fait pendant cinq ans !
M. Manuel Valls. ...notamment pour centraliser les données et rechercher les détenteurs sans permis. Délinquance, criminalité et trafic d'armes s'entretiennent mutuellement et forment un redoutable cercle vicieux qu'il convient de briser. L'arme du drame d'Evry, un neuf millimètres, c'est-à-dire un gros calibre, a probablement été facilement achetée avec l'argent de stupéfiants ou avec le produit du vol d'un scooter vendu sur un marché aux puces de la région parisienne.
Je me suis engagé auprès de mes concitoyens et de la famille de la victime à ne pas laisser l'indifférence et l'oubli l'emporter. Aussi, monsieur le ministre délégué, je vous poserai trois questions précises qui appellent trois réponses précises. Elles peuvent intéresser tous les parlementaires...
M. Jean-Michel Ferrand. Vous auriez dû vous y intéresser avant !
M. Manuel Valls. ...car, monsieur le Premier ministre, ce qui prévaut en économie comme dans la lutte contre l'insécurité, ce sont les faits et non les discours. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Jean-Michel Ferrand. Quel est votre bilan ?
M. François Vannson. Ils n'ont rien fait contre l'insécurité !
M. Manuel Valls. La France pourrait-elle lancer une initiative en direction de ses partenaires européens pour construire une véritable coopération policière ? Dans ce domaine, elle n'existe pas.
M. Richard Cazenave. Qu'avez-vous fait ?
M. Manuel Valls. Envisagez-vous d'augmenter de manière significative les moyens de l'Office pour la répression du trafic des armes ? Tous les professionnels l'attendent.
M. Jean-Michel Ferrand. Que ne l'avez-vous fait plus tôt ?
M. le président. Monsieur Ferrand !
M. Manuel Valls. Mes chers collègues, l'évocation de la mémoire d'une personne morte devrait vous inciter à plus de retenue et à éviter de chercher à rejeter les responsabilités des uns sur les autres.
M. Jean-Michel Ferrand. C'est trop facile !
M. Manuel Valls. Enfin, envisagez-vous de durcir la législation afin de mieux encadrer la possession d'armes et de réprimer plus sévèrement le trafic et la détention illégale ?
M. Richard Cazenave. Amnésique !
M. Manuel Valls. Monsieur le ministre, nos concitoyens le réclament. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'intérieur, porte-parole du Gouvernement.
M. Jean-François Copé, ministre délégué à l'intérieur, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le député, je vous prie d'excuser l'absence de Dominique de Villepin, retenu en Corrèze. Il m'a prié de vous dire sa détermination totale à renforcer le contrôle de la circulation des armes, sujet qui ne souffre d'ailleurs pas la polémique...
M. François Brottes. Dites-le à M. Ferrand !
M. le ministre délégué à l'intérieur. ...car nul ne saurait contester au Gouvernement la détermination qui est la sienne.
La loi du 18 mars 2003 a représenté une grande avancée. Elle responsabilise davantage les armuriers, notamment pour la vente des armes de cinquième et septième catégories. Elle exige la production d'un certificat médical de la part des acheteurs de certaines armes et elle renforce le pouvoir des préfets, habilités à procéder à des saisies d'armes en cas d'atteinte à l'ordre public.
M. Richard Cazenave. Les socialistes n'ont rien fait avant !
M. le ministre délégué à l'intérieur. Une autre avancée tient à la création d'un fichier national informatisé,...
M. Richard Cazenave. Les socialistes étaient contre !
M. le ministre délégué à l'intérieur. ...dont je suis heureux de constater qu'elle ne suscite plus de polémique, alors que nous avons eu bien du mal à convaincre qu'il fallait changer de dispositif, lequel était nominatif et régional. Ce fichier garantira la traçabilité des données, et Dieu sait si cette évolution était indispensable !
Enfin le Gouvernement a renforcé la coopération internationale dans ce domaine, tant par des accords bilatéraux avec plusieurs pays européens qu'au sein des instances de l'Union européenne et des Nations unies.
Comme vous, monsieur Valls, nous avons douloureusement ressenti le drame d'Évry et, sans aucun esprit polémique, je tiens à vous assurer de la détermination avec laquelle Dominique de Villepin entend traiter ce problème. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
Auteur : M. Manuel Valls
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Sécurité publique
Ministère interrogé : intérieur (MD)
Ministère répondant : intérieur (MD)
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 10 juin 2004