réfugiés
Question de :
M. Gilles Cocquempot
Pas-de-Calais (7e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 13 novembre 2002
FERMETURE DU CENTRE DE SANGATTE
M. le président. La parole est à M. Gilles Cocquempot, pour le groupe socialiste.
M. Gilles Cocquempot. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
Monsieur le ministre, la décision de fermer centre de Sangatte a des conséquences que chacun connaît. (« Vous n'aviez qu'à vous en occuper ! » sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Ce matin, à l'occasion de la table ronde dont j'ai pris l'initiative, vous nous avez reçus avec les élus locaux et les parlementaires du littoral, et je vous en remercie.
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Ah !
M. Gilles Cocquempot. Sensible à l'hommage rendu aux élus socialistes, je regrette toutefois que cette réunion n'ait pu avoir lieu avant la décision de fermeture du centre (Murmures sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
Il faut rappeler que celui-ci avait été créé dans l'urgence afin d'éviter que des familles venues dans le Calaisis dans l'espoir de trouver un avenir en Grande-Bretagne ne soient laissées à la rue, situation qui, dans le pays des droits de l'homme, était insupportable. Pour autant, chacun comprend bien que le centre ne pouvait perdurer. Je tiens d'ailleurs à rendre hommage aux populations locales pour l'extrême patience dont elles ont fait preuve ainsi qu'aux associations de défense des droits de l'homme pour l'action qu'elles ont menée.
M. Jean Leonetti. C'est long, cinq ans !
M. Gilles Cocquempot. Toutefois, la fermeture ne réglera rien si des mesures d'accompagnement ne sont pas prises au niveau national et européen. Il faut que l'Etat donne une plus grande lisibilité à son action. La Grande-Bretagne doit également montrer très clairement sa détermination à enrayer le phénomène migratoire. Enfin, l'ensemble des pays membres de l'Union européenne doivent prendre conscience de la nécessité d'une action collective. Sans cette politique globale, nous risquons de constater une multiplication de nouveaux « Sangatte » et d'entorses aux libertés publiques, le dernier exemple en date étant celui des Bulgares à Bordeaux. Ces situations humaines sont intolérables.
Aussi, je souhaite, monsieur le ministre, que vous puissiez donner la position du Gouvernement sur un problème que la France, et encore moins le Calaisis, ne peut gérer seule.
Vous vous êtes engagé - et je pense que vous l'avez fait sincèrement - à traiter humainement les réfugiés. Cependant les moyens d'accueil et d'hébergement dont disposent les préfets sont, me dit-on, en diminution. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Alors, que comptez-vous faire ? Ceux qui souhaitent demander l'asile en France doivent pouvoir le faire. Le Président de la République a annoncé une réforme, visant notamment à l'accélération des procédures d'examen des demandes.
M. le président. Veuillez conclure.
M. Gilles Cocquempot. Qu'en est-il ? Par ailleurs, une harmonisation européenne en matière de gestion des flux migratoires s'impose dans une Europe où il importe plus que jamais de maîtriser la mondialisation libérale. Où en est le Gouvernement sur ce sujet ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le député, j'ai beaucoup apprécié la façon dont vous avez posé votre question. Je puis vous dire que le Gouvernement de Jean-Pierre Raffarin ne vous décevra pas. Nous agirons davantage et nous vous écouterons davantage que ne l'a fait le gouvernement Jospin lorsque vous disiez les mêmes choses. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Vous ne serez pas déçu !
Premièrement, le Pas-de-Calais n'a pas à être le réceptacle de tous les miséreux du monde. Et il n'y a aucune raison que l'Etat abandonne ses élus du Pas-de-Calais, quels qu'ils soient, face à une réalité qui concerne la France dans son ensemble.
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Très bien !
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Deuxièmement, monsieur le député, il va de soi qu'une politique européenne de l'immigration est incontournable et indispensable (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.), ...
M. Daniel Vaillant. Eh oui !
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... notamment pour se mettre d'accord à bref délai sur une liste des pays sûrs, ce qui permettra d'avoir recours à une procédure allégée d'instruction des demandes d'asile politique. En effet, quand les demandeurs viennent d'une démocratie, on n'a pas à passer des années à s'interroger sur une situation qui constitue manifestement un détournement de procédure. Et cela doit faire l'objet d'un accord entre nous. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
Troisièmement, je suis persuadé que la notion d'« immigration zéro » n'a aucun sens.
M. Daniel Vaillant. En effet !
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Et le Premier ministre l'a d'ailleurs affirmé avec force.
En revanche, j'aimerais que l'on ne conteste pas à la France le droit de choisir ceux qu'elle veut accueillir ou qu'elle veut refuser. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
M. Jean-Paul Charié. Comme le font tous les autres pays !
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. C'est un droit qui est reconnu à toutes les démocraties.
Vous avez évoqué, monsieur le député, la décision relative aux Bulgares. Je n'ai pas à porter de jugement sur une décision de justice. Mais il s'agissait de trente-neuf Bulgares en situation irrégulière. Les Néerlandais ont affrété dix-sept charters pour reconduire des étrangers. Qui prétend que la Hollande n'est pas une démocratie ? Au nom de quoi la France serait-elle le seul pays à n'avoir pas le droit d'expulser des étrangers...
M. Lucien Degauchy. Très bien !
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... qui n'ont aucun titre à rester sur son territoire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
On peut dire cela sans se montrer inhumain.
M. Bernard Roman. Donnez la parole à M. le garde des sceaux !
M. le président. Monsieur Roman !
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. D'ici au début de l'année 2003, nous aurons l'occasion de vous proposer des réformes que vous nous conseillez, à juste titre, mais dont nous ne comprenons toujours pas pourquoi, en cinq ans, vous n'avez pas trouvé une minute pour les mettre en oeuvre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
Auteur : M. Gilles Cocquempot
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Étrangers
Ministère interrogé : intérieur
Ministère répondant : intérieur
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 13 novembre 2002