politique de l'éducation
Question de :
M. Yves Durand
Nord (11e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 13 octobre 2004
ÉDUCATION NATIONALE
M. le président. La parole est à M. Yves Durand, pour le groupe socialiste.M. Yves Durand. Monsieur le ministre de l'éducation nationale, la réponse que vous avez faite tout à l'heure à notre collègue M. Geoffroy ne peut nous satisfaire. (Murmures sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
En effet, si les conclusions du rapport Thélot ont été rendues ce matin à M. le Premier ministre, elles étaient connues depuis plusieurs mois. Vous avez donc eu largement le temps d'y réfléchir. Or vous n'avez rien dit. Il est vrai que vous ne dites pas grand-chose depuis votre arrivée rue de Grenelle ! (Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) La seule décision ferme que vous ayez prise depuis lors est la suppression de plus de 5 000 postes d'enseignant dans le projet de budget pour 2005, portant à plus de 60 000 le nombre total de suppressions d'emplois dans l'éducation nationale sous votre responsabilité.
M. Lucien Degauchy et M. Jean Auclair. Très bien !
M. Yves Durand. Certes, bon nombre des orientations contenues dans le rapport Thélot divergent fortement, lorsqu'elles ne sont pas en contradiction, avec votre jugement sur l'avenir de l'école, si l'on en croit toutefois les quelques déclarations que vous avez bien voulu faire depuis votre prise de fonctions.
Monsieur le ministre, l'hémorragie de moyens que vous organisez (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) entraîne une surcharge inacceptable des classes, comme l'ont d'ailleurs dénoncé l'ensemble des enseignants et des parents à cette rentrée. Mais surtout, vous êtes en train d'organiser, de façon totalement irresponsable, une véritable pénurie d'enseignants pour la rentrée 2005. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Monsieur le ministre, je voudrais vous poser deux questions précises, et j'attends de votre part deux réponses aussi précises.
Première question, qu'allez-vous faire réellement du rapport de M. Thélot ? Ne sera-t-il, pour vous, qu'un énième rapport supplémentaire, auquel vous pourriez éventuellement tourner le dos ? Ou bien constituera-t-il le socle de votre futur projet de loi sur l'école, comme l'a d'ailleurs souhaité M. Thélot lui-même ce matin en remettant son rapport à M. le Premier ministre ?
Seconde question, en attendant cette nouvelle loi, acceptez-vous de maintenir les 5 000 postes que vous vous apprêtez à supprimer dans le projet de budget pour 2005 ?
M. Richard Mallié. La question !
M. Yves Durand. Cette mesure coûterait 250 millions d'euros.
M. le président. Merci, monsieur Durand.
M. Yves Durand. Êtes-vous prêt à réduire d'autant les 650 millions de cadeaux fiscaux que vous prévoyez d'offrir aux catégories les plus riches de la population française ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - " Hou ! " sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
M. François Fillon, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur Durand, je constate avec plaisir que vous portez un jugement somme toute positif sur le rapport Thélot. Il aurait été préférable que vous participiez aux travaux de cette commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Cela aurait permis à votre très grande compétence de s'exercer pleinement dans le cadre d'une réflexion que j'ai qualifiée tout à l'heure de très riche et sur laquelle le Gouvernement compte s'appuyer pour proposer une loi d'orientation dont les objectifs seront bien à la fois d'élever le niveau d'éducation de la jeunesse de notre pays tout en luttant contre l'échec scolaire que personne ne peut nier.
Mme Chantal Robin-Rodrigo. Il n'y a pas de crédits !
M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Je ne commenterai pas tout de suite les propositions de ce rapport. J'attends que les partenaires sociaux et les formations politiques, la vôtre notamment, se prononcent sur le rapport avant de formuler les propositions qui seront celles du Gouvernement et que j'assumerai avec le Gouvernement et avec le soutien naturellement de la majorité, comme j'ai montré dans le passé que j'avais l'habitude de le faire.
Pour le reste, monsieur Durand, tant que le Parti socialiste voudra résumer la question éducative à la question des moyens, il participera aux difficultés de notre système. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
Aujourd'hui, le budget de l'éducation nationale représente 23 % du budget de l'État, il a augmenté de plus de 25 % depuis dix ans (" C'est faux ! " sur les plusieurs bancs du groupe socialiste), alors que 500 000 élèves ont quitté le système scolaire en raison de la démographie. (" Très juste ! " sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Nous avons recruté 20 000 enseignants supplémentaires depuis dix ans.
M. Yves Durand. Pas vous !
M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Il est donc tout à fait faux de dire, comme vous venez de le faire, que les classes sont plus surchargées aujourd'hui qu'elles ne l'étaient hier.
M. Julien Dray. Si, c'est vrai !
M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. La vérité, c'est que la question des moyens, domaine dans lequel d'ailleurs la France fait beaucoup mieux que ses voisins, n'est pas suffisante pour régler les difficultés de notre système éducatif.
M. Christian Bataille. Vous supprimez des postes !
M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. L'école, c'est une question d'organisation, c'est une question de valeurs, c'est une question de choix d'objectifs. (" Très bien ! " sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Nous voulons faire ces choix.
M. Georges Tron. Très bien !
M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. J'espère que vous nous y aiderez.
M. Georges Tron. Parfait !
M. Lucien Degauchy. C'est trop leur demander !
M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. En tout cas, l'histoire jugera de votre attitude sur cette question. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
Auteur : M. Yves Durand
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Enseignement
Ministère interrogé : éducation nationale
Ministère répondant : éducation nationale
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 13 octobre 2004