grande distribution
Question de :
M. Henri Emmanuelli
Landes (3e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 20 octobre 2004
PRATIQUE DES PRIX DANS LA GRANDE DISTRIBUTION
M. le président. La parole est à Henri Emmanuelli, pour le groupe socialiste.M. Henri Emmanuelli. Monsieur Sarkozy, il est au moins un point sur lequel nous pourrions nous entendre, c'est de ne pas faire dire aux gens le contraire de ce qu'ils ont dit : M. Hollande a trouvé les baisses catégorielles légitimes ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vous lui avez fait dire le contraire, et de tels agissements n'ont pas leur place dans une démocratie. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Yves Nicolin. Quel culot !
M. Henri Emmanuelli. Monsieur le Premier ministre, malgré le retour de la croissance, le chômage continue à augmenter. Cette croissance est aujourd'hui menacée par la hausse du prix de l'énergie, pour laquelle les Français paient un lourd tribut.
Au printemps, votre ministre de l'économie et des finances a redécouvert l'importance de la demande intérieure et, partant, du pouvoir d'achat des Français, ce qui l'a conduit à imposer une baisse de 2 % dans le secteur de la grande distribution. Il est un peu tôt pour juger cette opération, d'autant plus que les intéressés l'ont transformée en opération marketing, mais nous croyons que les marges commerciales pratiquées dans ce secteur sont très supérieures à celles qui avaient justifié, au départ, l'essor de ce type de distribution.
Nous connaissons le mécanisme des marges arrière. Le rapport Canivet révèle même qu'en modifiant la loi Galland, il serait possible d'obtenir des baisses de 15 à 60 % ! De surcroît, il y a eu, dans certains secteurs de services, depuis la mise en place de l'euro - alors que ce n'était pas l'objectif - des évolutions de prix dont les statistiques officielles ne rendent pas compte. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Pour ces raisons, nous souhaiterions que le Parlement se saisisse de cette affaire et que l'on constitue une commission d'enquête (" Encore ! " sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) pour contrôler les marges commerciales dans les grandes surfaces ainsi que l'évolution des prix dans certains secteurs de services. Monsieur le Premier ministre, allez-vous encourager cette initiative ou vous y opposer ?
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Le Gouvernement a bien noté que la demande intérieure était l'un des moteurs principaux de notre croissance, laquelle, je vous le rappelle, est de un point supérieure à celle des pays de la zone euro. Je suis fier d'être à la tête du Gouvernement qui a augmenté le SMIC - ce qui n'avait pas été fait depuis trente ans - d'un montant équivalent d'un treizième mois, et la prime pour l'emploi de 4 %.
J'ai noté, monsieur Emmanuelli, que vous aviez lu le rapport Canivet et que vous y aviez trouvé nombre d'analyses objectives. Il n'y a, dans ce rapport, aucun tabou.
C'est vrai, il nous faut corriger certains dispositifs,...
M. François Hollande. Les vôtres !
M. le Premier ministre. ...décidés il y a dix ans. À cette fin, nous devons nous appuyer sur trois critères.
Tout d'abord, le consommateur. Les baisses de prix le servent. Vous avez raison de souligner que, du fait du système antérieur, un même produit peut coûter en France 20 à 25 % plus cher qu'en Allemagne, en Italie ou en Espagne, ce qui signifie que les consommateurs n'ont pas profité d'un certain nombre de dispositifs. Ils doivent être les premiers bénéficiaires de l'évolution de notre réglementation. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Deuxième critère : l'emploi. Il est évident que les grandes surfaces doivent accueillir avec davantage de dynamisme les productions des producteurs agricoles et des petites et moyennes entreprises dans le cadre de contrats pluriannuels permettant de soutenir l'emploi.
M. François Hollande. Que des mots !
M. le Premier ministre. Nous avons vu trop souvent des grandes surfaces fragiliser des PME faute de savoir construire des relations conventionnelles durables.
M. François Hollande. Vous êtes au pouvoir depuis combien de temps ?
M. le Premier ministre. C'est précisément parce que nous voulons soutenir l'emploi dans les PME que le ministre de l'économie parlait d'" amortisseurs " et de " régulateurs ". Dans le nouveau système, les producteurs agricoles et les petites et moyennes entreprises seront protégées.
M. François Hollande. À qui allez-vous faire croire cela ?
M. le Premier ministre. Troisième critère : la logique de proximité. J'en vois certains lever les yeux au ciel.
M. François Hollande. Effectivement !
M. le Premier ministre. Nous avons trop encouragé, par le passé - je suis bien obligé de le dire - le développement des grandes surfaces. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Nous avons laissé déstructurer nos villes et le commerce de proximité en a été affaibli. (Mêmes mouvements.)
Le temps est venu de travailler à l'instauration d'un meilleur équilibre, sans boucs émissaires, dans le respect des règles établies selon les trois critères que j'ai énumérés - le consommateur, l'emploi, la proximité - qui deviendront les nouvelles donnes de la nouvelle politique commerciale de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Henri Emmanuelli. Vous n'avez pas répondu à ma question !
Auteur : M. Henri Emmanuelli
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Commerce et artisanat
Ministère interrogé : Premier ministre
Ministère répondant : Premier ministre
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 20 octobre 2004