Question au Gouvernement n° 1646 :
POM : Polynésie française

12e Législature

Question de : M. René Dosière
Aisne (1re circonscription) - Socialiste

Question posée en séance, et publiée le 10 novembre 2004

POLYNÉSIE FRANÇAISE

M. le président. La parole est à M. René Dosière, pour le groupe socialiste.
M. René Dosière. Monsieur le Premier ministre, en Polynésie française (" Ah ! " sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), chaque jour qui passe aggrave la crise politique et les risques de trouble à l'ordre public. Les administrations sont bloquées et les fonctionnaires ne savent pas auquel des deux présidents il convient d'obéir. (Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Éric Raoult. À cause de vous !
M. René Dosière. L'économie tourne au ralenti. Un ordre de grève a été lancé. Les gros bras du GIP se comportent de plus en plus en milice privée et la violence, longtemps contenue, commence à apparaître. Le ministre de l'intérieur a d'ailleurs dû vous en informer. Au sein des États du Pacifique, le spectre d'Ouvéa resurgit, ainsi que l'image d'une France coloniale (Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) : le ministre des affaires étrangères a dû vous le dire.
À cette crise qui s'aggrave, il n'y a qu'une issue : le retour général devant le corps électoral. C'est ce que réclament la majorité des Polynésiens, ainsi que leur députée Béatrice Vernaudon.
M. Pascal Terrasse. Même Debré le demande !
M. René Dosière. C'est aussi la position que le président de l'Assemblée nationale a exprimé publiquement ce matin. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
Or il semble que seule l'organisation d'élections partielles, à la suite d'une annulation que pourrait prononcer le Conseil d'État, soit envisagée par votre ministre de l'outre-mer. Cela ne mettrait pas fin à la crise polynésienne, mais déclencherait au contraire une véritable tempête politique. Le Gouvernement doit donc assumer toute sa responsabilité : la dissolution de l'Assemblée territoriale est désormais inéluctable.
Monsieur le Premier ministre, votre responsabilité est d'éviter que la Polynésie ne sombre dans le chaos et la violence.
M. Éric Raoult. Pyromane !
M. René Dosière. Quand allez-vous annoncer des élections générales en Polynésie ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'outre-mer. (Protestations sur plusieurs bancs du groupe socialiste.- Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - " Démission ! Démission ! " sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
Ça suffit ! Un peu de tenue !
Mme Brigitte Girardin, ministre de l'outre-mer. Monsieur le député, contrairement à ce que vous semblez insinuer, le Gouvernement n'a jamais eu la moindre objection à ce que les Polynésiens retournent aux urnes. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste.) Mais j'ai toujours dit qu'ils ne le pouvaient que sur une base légale et qu'il fallait attendre la décision du Conseil d'État sur une éventuelle annulation du scrutin du 23 mai.
Je n'ai pas l'intention de commenter une décision de justice, d'autant qu'elle n'a pas encore été rendue à ce jour. Nous verrons bien si ce vote, que vous avez qualifié d'historique et de légitime, était ou non entaché d'irrégularités graves, et si des élections doivent s'ensuivre.
Monsieur Dosière, cessez de faire croire que le Gouvernement a, dans cette affaire, une attitude irresponsable. ((Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Vous ne cessez de dire des contrevérités et de tirer des interprétations abusives de notre attitude. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Il n'y a pas d'assimilation à faire entre une assemblée locale comme celle de Polynésie et l'Assemblée nationale, qui est l'expression de la souveraineté nationale. Il n'y a pas, pour dissoudre l'assemblée de Polynésie, de prérogative exclusive du chef de l'État. Encore une fois, nous ne sommes pas dans un schéma national. De même n'y a-t-il pas de pratique républicaine qui veut que, après l'adoption d'une motion de censure, on procède à la dissolution de l'assemblée de Polynésie. Vous le savez très bien. Il y a eu un précédent avec Alexandre Léontieff. Vous étiez au pouvoir et vous n'avez pas procédé à une dissolution. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur divers bancs du groupe Union pour la démocratie française .)
M. René Dosière. Oui, mais aujourd'hui il y a blocage des institutions !
Mme la ministre de l'outre-mer. Arrêtez donc de faire cette assimilation permanente, qui entretient un climat de confusion entre une assemblée locale et l'Assemblée nationale. De cette façon, vous faites croire à M. Temaru et à ses amis que leur rêve d'indépendance est devenu réalité. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Eh bien non : la Polynésie n'est pas un État indépendant, c'est toujours une collectivité de la République dans laquelle la loi s'applique. (Mêmes mouvements.)
Moi aussi, monsieur Dosière, je finis par rêver lorsque j'entends M. Temaru nous dire qu'il faut que l'État reprenne tous les pouvoirs et gère directement ce territoire jusqu'à l'organisation d'éventuelles nouvelles élections. Je crois rêver quand ces propos sont tenus par un leader indépendantiste qui dénonce en permanence une logique coloniale ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Données clés

Auteur : M. René Dosière

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Outre-mer

Ministère interrogé : outre-mer

Ministère répondant : outre-mer

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 10 novembre 2004

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