Question au Gouvernement n° 1707 :
politique de l'éducation

12e Législature

Question de : M. Bruno Le Roux
Seine-Saint-Denis (1re circonscription) - Socialiste

Question posée en séance, et publiée le 25 novembre 2004

POLITIQUE DE L'ÉDUCATION

M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux, pour le groupe socialiste.
M. Bruno Le Roux. Monsieur le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, nous avions, comme de nombreux citoyens, la crainte que votre débat sur l'éducation ne soit qu'un leurre. Cette crainte semble aujourd'hui fondée à en juger par l'incohérence des slogans que vous tentez d'habiller en réforme et le cadre d'austérité budgétaire dans lequel vous vous apprêtez à maintenir l'éducation nationale.
Trois exemples pris au hasard de vos déclarations témoignent de cette incohérence.
Comment pouvez-vous parler d'un projet pour l'école alors qu'il n'est question ni de la petite enfance ni de l'enseignement supérieur, c'est-à-dire des deux extrémités de la chaîne éducative ?
Comment pouvez-vous, pour justifier cette réforme, parler d'aide aux enfants en difficulté en oubliant le travail important mené par les réseaux d'aide spécialisée ?
Enfin, monsieur le ministre, vous n'avez procédé à aucune véritable concertation et vous avez développé une conception archaïque dans laquelle le rôle des parents au sein de la communauté éducative est complètement ignoré.
M. Yves Deniaud. L'archaïsme, vous connaissez !
M. Bruno Le Roux. Ces trois dernières années, votre désengagement budgétaire a été constant : 60 000 postes ont été supprimés dans l'Éducation nationale et le rythme des recrutements est désormais inférieur à celui des départs à la retraite.
Vous expliquez souvent que les moyens ne sont pas tout mais, dans mon département de Seine-Saint-Denis, comme dans de nombreux autres départements, les postes vacants ne sont plus remplacés et des élèves peuvent se retrouver pendant de longues semaines sans personne devant eux. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste.)
M. Jacques-Alain Bénisti. Comment était-ce avant ?
M. Bruno Le Roux. Le 14 juillet dernier, le Président de la République promettait une loi de programmation. Votre projet ne serait, quant à lui, qu'une simple loi d'orientation, qui n'apporterait ni les moyens ni la mobilisation nécessaire pour améliorer notre système éducatif.
Vos collègues et vous-même, monsieur le ministre, avez l'habitude de vous complaire dans la rhétorique de l'héritage. Quant à nous, nous sommes fiers d'avoir fait du budget de l'éducation le premier budget de la nation quand nous étions aux responsabilités. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste .- Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Monsieur le ministre, êtes-vous à ce point pessimiste sur les prochains arbitrages budgétaires pour ne pas avoir l'ambition d'une réelle politique de l'éducation en faveur de tous les enfants ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
M. François Fillon, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Vous auriez pu être fier, monsieur Le Roux, si les résultats de cette politique avaient été au rendez-vous. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Vous pouvez, c'est votre droit, caricaturer les propositions du Gouvernement. Cette attitude emportera deux conséquences.
Premièrement, vous vous privez, d'une certaine manière, de la possibilité de peser sur l'écriture du projet de loi d'orientation, alors même que celle-ci doit être l'affaire de la nation tout entière.
Deuxièmement, vous mettez en évidence le manque de cohérence des positions du parti socialiste, puisque plusieurs des innovations proposées correspondent à des propositions que vous avez défendues. Je lis, par exemple, dans un document du parti socialiste intitulé Le droit à l'excellence pour tous : " Il faut amener tous les jeunes de six à seize ans à l'acquisition d'un socle commun de connaissances ". Or c'est le coeur du projet que nous proposons aujourd'hui. " (Protestations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Nous avons choisi, avec le Premier ministre et le Président de la République, de rendre l'école à la fois plus juste et plus efficace : ...
M. Bruno Le Roux. Avec quels moyens ?
M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. ...plus juste car, comme vous le savez, tous les objectifs fixés par la loi de 1989 en matière de réduction des injustices et des inégalités n'ont pas été atteints, loin s'en faut ; plus efficace, notamment dans le domaine prioritaire de l'apprentissage des langues pour lequel nous occupons aujourd'hui la dernière place des pays européens.
Nous avons choisi, pour relever ces deux défis, de reprendre la proposition phare du rapport Thélot, qui est l'engagement de la nation de transmettre à tous ses enfants un socle de connaissances et de compétences fondamentales, au moyen notamment d'une pédagogie personnalisée s'appuyant sur des moyens supplémentaires importants.
M. Alain Néri. Lesquels ?
M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Ils seront caractérisés par trois heures de soutien supplémentaires, organisées dans le cadre d'un contrat individuel de réussite éducative, préparé par les enseignants, naturellement, par l'élève et par ses parents, ce qui permet de balayer la critique sur l'absence des parents dans le système éducatif.
En ce qui concerne l'efficacité, je veux citer l'exemple de la rénovation de l'enseignement des langues. Nous voulons en effet à la fois rendre l'apprentissage des langues vivantes plus précoce et mettre en place une pédagogie faisant plus appel à l'expression orale, avec le dédoublement des classes de langue.
M. Bruno Le Roux et M. Alain Néri. Avec quels moyens ?
M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Cela nécessitera évidemment des moyens supplémentaires importants et nous metttrons aussi en place des groupes de niveaux, qui s'affranchiront du cadre des classes. Il s'agira d'une innovation pédagogique que vous ne pouvez contester.
Monsieur Le Roux, l'école a besoin d'être modernisée. Je le ferai avec tous ceux qui en ont la volonté et j'aimerais vous compter parmi ceux-là. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

Données clés

Auteur : M. Bruno Le Roux

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Enseignement

Ministère interrogé : éducation nationale

Ministère répondant : éducation nationale

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 novembre 2004

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