Côte d'Ivoire
Question de :
M. Jean-Marc Ayrault
Loire-Atlantique (3e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 20 octobre 2005
MISSION DE LA FRANCE EN COTE D'IVOIRE
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe socialiste.M. Jean-Marc Ayrault. Chacun jugera de l'efficacité du garde des sceaux...
Par ailleurs, je voudrais rappeler à M. le ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche que le gouvernement Jospin avait nommé une femme directrice générale du CNRS. Je me demande pourquoi vous l'avez démissionnée avant la fin de son mandat (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste.)
Monsieur le Premier ministre, hier votre majorité a une nouvelle fois refusé notre proposition d'une commission d'enquête sur la libération de nos otages en Irak et sur l'interférence des fameux réseaux Julia. Elle nous avait opposé le même veto concernant l'action de la France en Côte d'Ivoire. Cette marginalisation du Parlement dans des domaines comme celui des affaires étrangères et de la défense est inadmissible ; elle serait inimaginable n'importe quelle grande démocratie. Elle constitue surtout un grave déni de démocratie qui n'aide pas nos concitoyens et nos partenaires internationaux à comprendre nos initiatives diplomatiques et internationales.
Hier, le ministère de la défense a annoncé la suspension du général Poncet, ancien chef d'état-major de l'opération Licorne en Côte d'Ivoire. Cette décision grave et exceptionnelle n'ayant fait l'objet d'aucune explication devant la représentation nationale, nous souhaitons que Mme la ministre vienne informer les commissions des affaires étrangères et de la défense. Si des manquements ont eu lieu, rien ne peut les excuser, et des sanctions s'imposent. Cependant, mes chers collègues, ne faisons pas pour autant d'amalgame en jetant l'opprobre sur l'ensemble de notre armée (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Jean-Pierre Soisson. Nous ne l'avons jamais fait !
M. Jean-Marc Ayrault. Car la vraie question est politique. Nos soldats font face à une situation extrêmement difficile en Côte d'Ivoire. D'un côté, ils mènent une action courageuse pour éviter une sanglante guerre civile. De l'autre, ils restent dans l'incertitude concernant la nature, la durée et l'issue de leur mission.
Monsieur le Premier ministre, cette situation est la résultante des ambiguïtés de votre politique. (Protestations sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vous le savez bien, vous qui avez été ministre des affaires étrangères. La France est depuis trois ans au coeur du conflit sans que vous ayez réussi à définir son rôle, des perspectives de sortie de la crise et les modalités d'un règlement politique.
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. C'est faux !
M. Jean Leonetti. Lamentable !
M. Jean-Marc Ayrault. C'est pourquoi nous vous demandons aujourd'hui de lever ces incertitudes et de répondre à trois questions cruciales devant la représentation nationale.
M. Richard Mallié. Il n'a droit qu'à une seule question !
M. Jean-Marc Ayrault. Que veut la France en Côte d'Ivoire ? À quelles solutions politiques travaille-t-elle pour sortir de cette crise ? Allez-vous enfin associer le Parlement, et en particulier l'Assemblée nationale, en acceptant notre proposition de création d'une commission d'enquête parlementaire sur la mission de la France en Côte d'Ivoire que nous réitérons ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la défense.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense. Monsieur Ayrault, je ne me suis jamais dérobée à la moindre demande d'explication venant de vos commissions de la défense ou des affaires étrangères. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.) C'est l'honneur du Gouvernement que de répondre à toute demande en la matière.
M. Lucien Degauchy. Ce n'était pas le cas des socialistes !
Mme la ministre de la défense. S'agissant de la décision prise au sujet du général Poncet, et d'une façon générale de la chaîne de commandement, si j'ai pris une telle mesure conservatoire c'est que celle-ci apparaissait nécessaire au vu des premiers éléments résultant de l'enquête de commandement que j'avais demandée. Quelle serait notre crédibilité lorsque nous sommes amenés à défendre nos militaires contre des accusations mensongères si, quand des comportements non conformes au droit ou à nos traditions sont avérés, nous n'avions pas le courage de prendre des mesures et de le faire publiquement ?
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Eh oui !
Mme la ministre de la défense. Lorsque j'ai été informée d'un certain nombre de circonstances qui n'étaient pas très nettes sur la mort d'un Ivoirien, j'ai demandé une enquête de commandement et, dans le même temps, saisi le procureur. L'enquête de commandement a fait apparaître un manque d'information et des informations erronées. Et le procureur a ouvert une instruction pour homicide volontaire. Les mesures conservatoires sont donc tout à fait normales.
Ces mesures sont également importantes pour l'image de nos armées et pour l'action de notre pays en Côte d'Ivoire. La France s'est efforcée depuis le début de protéger ses ressortissants et les populations civiles contre des exactions et des massacres. Elle s'est employée, avec les forces de l'ONU, à faire appliquer des accords qui ont été d'abord passés à Marcoussis, puis à Accra, et qui ont été confirmés par la communauté internationale. Ces accords impliquent un désarmement des belligérants et la mise en oeuvre d'une solution politique se traduisant par des élections présidentielles claires et démocratiques.
M. François Loncle. Quand ? Cela ne semble pas bien parti !
Mme la ministre de la défense. Si nous n'étions pas là, si nos forces n'étaient pas là, l'ONUCI ne serait pas là non plus et, comme le souhaitent les extrémistes des deux bords, les affrontements et les massacres dont seraient victimes en premier lieu les civils, qu'ils soient étrangers ou ivoiriens, continueraient de se produire.
Plusieurs députés du groupe socialiste. Ce n'est pas la question !
M. Jean-Marc Ayrault et M. Jean Glavany. Répondez sur la commission d'enquête !
Mme la ministre de la défense. Alors, oui, monsieur le président Ayrault, ce que nous faisons est utile. Et ce que font nos soldats dans des conditions difficiles est indispensable. Je tiens aujourd'hui à leur affirmer publiquement mon soutien. J'espère que vous aurez à coeur de les assurer du vôtre ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
Plusieurs députés du groupe socialiste. Vous n'avez pas répondu à la question !
Auteur : M. Jean-Marc Ayrault
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : défense
Ministère répondant : défense
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 20 octobre 2005