Question au Gouvernement n° 2263 :
immigration

12e Législature

Question de : M. Pierre Cohen
Haute-Garonne (3e circonscription) - Socialiste

Question posée en séance, et publiée le 27 octobre 2005

VOTE DES ETRANGERS

M. le président. La parole est à M. Pierre Cohen, pour le groupe socialiste.
M. Pierre Cohen. Monsieur le Premier ministre, le 3 mai 2000, l'Assemblée nationale adoptait une proposition de loi sur le droit de vote et l'éligibilité aux élections municipales des étrangers non ressortissants de l'Union européenne résidant en France.
À l'heure où notre pays se doit de revisiter son passé colonial et de reconnaître ce que nous avons fait subir à ces peuples (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), à l'heure où la mondialisation crée des situations inadmissibles pour des populations candidates à vivre et à travailler dans nos pays riches en instaurant sur nos propres territoires une nouvelle version du colonialisme...
M. Jean-Michel Ferrand. Caricature !
M. Thierry Mariani. Tournez la page !
M. le président. Monsieur Ferrand ! Monsieur Mariani !
M. Pierre Cohen. ...à l'heure où la lutte contre la discrimination devrait constituer le pilier d'une véritable cohésion sociale, il est temps de se poser sérieusement la question du statut et de la place des étrangers non européens dans notre société. Cela vaut pour vous comme pour nous. Aussi, par l'intermédiaire de Jean-Pierre Bel, président du groupe socialiste au Sénat, a été déposée une proposition de loi qui a été votée majoritairement par la gauche le 3 mai 2000 à l'Assemblée nationale.
Nous avons entendu un membre du Gouvernement, en la personne même du ministre de l'intérieur proposer...
M. Charles Cova. À titre personnel !
M. Pierre Cohen. ...des avancées significatives dans ce sens. Prise de conscience ou instrumentalisation ? Nous devons en avoir le coeur net.
Monsieur le Premier ministre, allez-vous faire passer ces intentions dans les actes ? Comptez-vous inscrire à l'ordre du jour prioritaire du Sénat cette proposition de loi ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Monsieur le député, nous tous qui sommes ici, nous avons un point commun :...
M. Jean-Marc Ayrault. Vous avez surtout un problème dans votre Gouvernement ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le Premier ministre. ...nous sommes tous des démocrates.
C'est dire que, quelles que soient nos opinions, nous sommes capables de nous parler, de nous écouter avec respect et tolérance. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Jean-Marc Ayrault. Qui est le chef ?
M. le Premier ministre. Qu'il y ait un débat de fond dans notre démocratie, quoi de plus normal ? Nicolas Sarkozy s'est exprimé sur le droit de vote des immigrés aux élections locales.
M. Bernard Derosier. Il est président de l'UMP !
M. le Premier ministre. Je rappelle qu'il l'a fait, comme il l'a dit lui-même, à titre personnel. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. Jean-Paul Bacquet. Et vous, à titre personnel, qu'en pensez-vous ?
M. le Premier ministre. Vous connaissez la position du Gouvernement et la mienne.
Pour l'unité de notre pays, le lien entre citoyenneté et nationalité est essentiel. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Seule la pleine appartenance à notre nation peut donner au droit de vote toute sa portée...
M. Jean-Marie Le Guen et M. Bruno Le Roux. Et l'Europe ?
M. le Premier ministre. ...car l'appartenance à la nation l'emporte sur toute autre forme d'appartenance...
M. Julien Dray. Non !
M. le Premier ministre. ...à une communauté, d'origine ou encore de religion. (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. Jean-Marie Le Guen et M. Bruno Le Roux. Et l'Europe ?
M. le président. Taisez-vous !
M. le Premier ministre. La République, monsieur le député, ne reconnaît qu'un seul peuple, qui exerce la citoyenneté : tel est le fondement même de notre Constitution.
M. Patrick Bloche. C'est faux !
M. le Premier ministre. La République est généreuse et accueillante. (" Trop ! " sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Le peuple français s'est enrichi constamment des apports de l'immigration. Oui, la France est riche de sa diversité. Oui, la France est généreuse. Je rappelle que l'accès à la nationalité française fait de notre pays l'un des plus ouverts au monde. Ils sont ainsi 140 000 à devenir français chaque année.
M. Jean-Christophe Lagarde. Il suffit d'attendre cinq ans !
M. le Premier ministre. Acquérir la nationalité relève d'une démarche volontaire qui est au coeur de notre pacte républicain. C'est un choix partagé, et c'est l'honneur de notre République ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

Données clés

Auteur : M. Pierre Cohen

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Étrangers

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 27 octobre 2005

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