Iraq
Question de :
M. Jean-Marc Ayrault
Loire-Atlantique (3e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 12 décembre 2002
GUERRE EN IRAK
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault.
M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le Premier ministre, le 12 novembre dernier je vous avais posé trois questions claires concernant le danger de guerre en Irak. Le recours à la force doit-il faire l'objet d'une nouvelle résolution de l'ONU ? La France refusera-t-elle sa participation militaire à une telle aventure ? Le Parlement se prononcera-t-il par un vote ? Vous n'avez pas répondu à ces questions.
Depuis cette date, les inspecteurs de l'ONU ont commencé leur travail de contrôle et le gouvernement irakien a remis au Conseil de sécurité la déclaration attendue sur ses programmes d'armement, mais, par un troublant tour de passe-passe, les Etats-Unis ont été dans un premier temps les seuls destinataires de ce document, escamotage qui permet toutes les manipulations. On s'aperçoit d'ailleurs que la mobilisation militaire américaine s'amplifie autour de l'Irak. Il nous revient également que l'armée française serait en train de se préparer.
De votre côté, monsieur le Premier ministre, à aucun moment vous n'avez donné d'informations au Parlement et à l'opinion sur l'état réel de la situation. Or vous avez déclaré hier, à l'occasion d'un dîner-débat, que cette guerre était probable, même si vous avez ajouté qu'elle n'était pas inéluctable. Sur quelles informations, dont nous n'avons pas connaissance, vous fondez-vous ? En tout état de cause, il est indispensable que vous en informiez la représentation nationale lors d'un nouveau débat. Je vous pose donc à nouveau mes questions.
Exigez-vous, oui ou non, une nouvelle résolution de l'ONU pour décider du recours à la force ? Etes-vous prêt à dire solennellement que la France ne s'engagera pas dans cette guerre et, dans le cas contraire, demanderez-vous au Parlement de se prononcer par un vote ? Monsieur le Premier ministre, après vos déclarations d'hier soir, les Français doivent savoir où vous voulez les conduire. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères. (Exclamations sur divers bancs du groupe socialiste.)
M. Gaëtan Gorce. Où est passé M. Raffarin ?
M. Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères. Le Gouvernement comprend votre inquiétude, monsieur le président, mais sachez que la France est pleinement mobilisée (« Ah ! » sur divers bancs du groupe socialiste) par la mise en oeuvre de la résolution 1441.
L'Irak a remis sa déclaration sur ses programmes d'armes de destruction massive le 7 décembre. Ce document fait l'objet d'une évaluation par la commission de contrôle ainsi que par l'Agence internationale de l'énergie atomique et nous procédons à notre propre analyse. Nous apportons un appui concret et important aux inspections par des contributions en moyens humains et matériels aux travaux de la commission de contrôle - plus de trente experts - et nous sommes prêts à faire davantage. Nous avons envoyé une mission à New York pour répondre aux besoins en ce sens.
A ce stade, il faut le rappeler, les inspections se déroulent dans des conditions satisfaisantes. Comme vous le voyez, nous continuons à donner une chance à la paix. La responsabilité première, il ne faut pas l'oublier, incombe à l'Irak, qui doit appliquer la résolution dans son intégralité. C'est le sens des messages fermes que nous lui adressons. Il reviendra, bien sûr, au Conseil de sécurité d'examiner les conséquences à tirer d'éventuels manquements. La France y prendra toute sa part, mais il n'y aura pas automaticité du recours à la force, nous l'avons maintes fois rappelé. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
Mme Odile Saugues. Heureusement !
M. le ministre des affaires étrangères. S'agissant du rôle du Parlement, vous connaissez les précédents : la guerre du Golfe, le Kosovo et l'Afghanistan. Le Gouvernement fera face à toutes ses obligations. Il le fera en fonction des circonstances et, à chaque étape, en étroite relation avec la représentation nationale.
Mme Martine David. Comment ?
M. le ministre des affaires étrangères. Mais, je le réaffirme ici solennellement, la guerre n'est pas une fatalité. Notre action est fondée sur la primauté du droit et de la morale sur la force. Elle reste guidée par la conviction qu'une solution politique et pacifique est possible. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
Auteur : M. Jean-Marc Ayrault
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : affaires étrangères
Ministère répondant : affaires étrangères
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 12 décembre 2002