lois de finances
Question de :
M. François Hollande
Corrèze (1re circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 18 décembre 2002
HYPOTHÈSES BUDGÉTAIRES POUR 2003
M. le président. La parole est à M. François Hollande, pour le groupe socialiste.
M. François Hollande. Monsieur le Premier ministre, vous avez prétendu fonder votre action sur la sincérité et sur la transparence. (« Mais oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Convenez que, pour ce qui concerne le principal texte de notre session, à savoir le budget pour 2003, ces principes ont été mis à mal.
M. Charles de Courson. Vous êtes expert !
M. François Hollande. Chacun le sait, les hypothèses de croissance sur lesquelles vous avez fondé votre projet de loi de finance - 2,5 % pour 2003 - ont aujourd'hui perdu une large part de leur crédibilité.
Plutôt que de corriger vos prévisions, pendant qu'il en est encore temps, vous soumettrez demain, au Parlement, un budget dont on sait que, tant du point de vue des masses que pour ce qui est du déficit, il a perdu une grande part de sa réalité.
M. Pierre Lellouche. Et vos budgets ?
M. François Hollande. Votre ministre des finances en a lui-même fait l'aveu en annonçant un gel de crédits, à hauteur de 5 milliards d'euros. Jamais depuis au moins une décennie n'a été annoncé un gel de crédits d'un montant aussi important dès le mois de janvier. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Marc-Philippe Daubresse. Pourtant, il y avait de quoi !
M. Richard Mallié. Quel culot ! Quel donneur de leçons !
M. François Hollande. Cette méthode, qui consiste à faire voter demain, par le Parlement, un budget dont on sait qu'il sera bouleversé dans quinze jours par un plan de gel des crédits budgétaires, est à bien des égards un mauvais procédé vis-à-vis de la représentation nationale. (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) M. Pierre Lellouche. Vous avez fait pire !
M. le président. Monsieur Lellouche !
M. François Hollande. Le président de la commission des finances a parlé à juste raison d'hypocrisie. Cette méthode révèle en effet une intention, car, lorsqu'on annule 6 milliards de crédits budgétaires...
M. René André. Parole d'expert !
M. François Hollande. ... il ne s'agit plus simplement d'une régulation ou d'un mode de gestion, il s'agit d'un plan de rigueur qui n'ose pas dire son nom. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
C'est la raison pour laquelle, monsieur le Premier ministre, je vous demande de confirmer devant l'Assemblée nationale l'ampleur des crédits qui seraient gelés dès le début du mois de janvier.
M. Yves Nicolin. Il faut payer vos erreurs !
M. Jean Leonetti. Et les dégâts que vous avez causés !
M. François Hollande. Je vous demande aussi de nous soumettre le plus vite possible une loi de finances rectificative qui permettra au Parlement et aux Français de connaître la situation des finances publiques. (« La question ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) En cette période d'incertitude, les Français ont droit à la vérité (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française)...
M. le président. S'il vous plaît !
M. François Hollande. ... et le Gouvernement a le devoir de la leur dire. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains).
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je souhaite d'abord la bienvenue aux deux nouveaux députés. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
M. Jean-Pierre Brard. Vous allez avoir besoin d'eux !
M. le Premier ministre. Monsieur le député, quelle assurance dans vos propos ! (« Oui ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Quelle aisance pour dénoncer votre propre bilan ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Figurez-vous, monsieur le Premier secrétaire, que, depuis que nous sommes arrivés aux responsabilités, nous découvrons d'excellents dossiers, des dossiers importants pour la France...
M. Gilbert Biessy. La modernisation sociale ?
M. le Premier ministre. ... mais des dossiers au sujet desquels il y a eu beaucoup d'imprévoyance financière.
Nous devons aujourd'hui faire en sorte de sauver l'industrie des télécoms françaises (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), endettée à plus de 70 milliards d'euros. Nous devons sauver le système d'assistance aux personnes âgées, qui n'a pas été financé, le ministre des affaires sociales l'a dit tout à l'heure. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
Mme Martine David. Ce n'est pas la question !
M. François Hollande. Cela n'a rien à voir avec ma question !
M. le Premier ministre. Nous sommes aujourd'hui devant la nécessité de sauver le système social français mis en cause par l'imprévoyance au sujet des retraites et de la sécurité sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations et huées sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. le président. Laissez le Premier ministre terminer. Faites preuve d'un peu de tolérance !
M. le Premier ministre. Restons calmes et détendus : c'est bientôt Noël ! (Sourires.) Nous parlons de sujets sérieux, et nous pouvons le faire calmement, sans nervosité. (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Quant à moi, je parle sans aucune nervosité. Je vous dis simplement que notre budget pour 2003 est un budget de transition.
M. Jean-Marc Ayrault. Mais non !
M. le Premier ministre. Ce n'est pas, en effet, le budget que nous aurions souhaité présenter, parce qu'il assume l'héritage de cinq ans de socialisme (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - Huées sur les bancs du groupe socialiste), cinq ans de mauvaise gestion que nous devons corriger.
Vous parlez du taux de croissance. (« Ce sont des sophistes », sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Il est évident qu'une hypothèse de taux de croissance est une perspective économique, mais c'est aussi une ambition politique. (« Ben voyons ! » sur quelques bancs du groupe socialiste.) Et nous voulons clairement dire aux entreprises de France, à tous les acteurs économiques et sociaux, que la crise n'est pas inéluctable et qu'en se mobilisant notre pays a toutes les chances pour réussir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) C'est pourquoi nous mettons en place divers dispositifs - je pense à l'allégement des charges, à l'allégement fiscal, à la prime pour l'emploi. Savez-vous, par exemple, que, pour les jeunes, l'allégement des charges est sur le point d'atteindre des résultats meilleurs que ceux que nous avions prévus, puisque nous en serons à 30 000 contrats emplois jeunes sans charges d'ici à la fin de l'année. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Voilà des réponses très concrètes !
Monsieur le Premier secrétaire (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste)...
Plusieurs députés du groupe socialiste. Dites : « Monsieur le député » !
M. le président. Mes chers collègues, calmez-vous !
M. le Premier ministre. Bien sûr qu'il est député ! Mais je croyais que c'était pour lui un honneur d'être Premier secrétaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Mme Martine David. Ici, il est député !
M. le Premier ministre. Monsieur le député, le Gouvernement tiendra les engagements qu'il a pris devant l'Assemblée nationale. (Mmes et MM. les députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et quelques députés du groupe Union pour la démocratie française se lèvent et applaudissent. - Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. le président. S'il vous plaît ! Tenez-vous correctement, quand même !
M. Christian Bataille. C'est honteux !
M. le président. Monsieur Bataille, c'est terminé !
Auteur : M. François Hollande
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Finances publiques
Ministère interrogé : Premier ministre
Ministère répondant : Premier ministre
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 18 décembre 2002