gouvernement
Question de :
M. Christophe Caresche
Paris (18e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 3 mai 2006
AFFAIRE CLEARSTREAM
M. le président. La parole est à M. Christophe Caresche, pour le groupe socialiste.M. Christophe Caresche. Monsieur le Premier ministre, ni vos déclarations ni les réponses que vous venez de faire à l'instant n'ont dissipé les interrogations des Français sur votre rôle dans l'affaire Clearstream - loin s'en faut ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Comme l'a justement indiqué le garde des sceaux, la justice devra établir clairement les responsabilités des uns et des autres...
Un député du groupe UMP. Démago !
M. Christophe Caresche. ...et elle devra faire la lumière sur ce dossier de dénonciation calomnieuse, dans lequel toutes les manipulations semblent possibles. Votre réponse, monsieur le Premier ministre, au lieu de clarifier la situation, ne fait que la rendre plus confuse !
Mais votre responsabilité politique est aussi engagée, car vous êtes le Premier ministre du Gouvernement de la République. À ce titre, vous devez être le garant d'un État impartial, dont la seule mission est d'agir au service de l'intérêt général, et non au service d'intérêts partisans ou personnels. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Ce que nous exigeons, c'est que la vérité, toute la vérité, soit faite sur cette affaire qui est bien autre chose qu'un " pétard mouillé ", mais sans doute une affaire d'État. C'est pourquoi vous devez à la représentation nationale des réponses aussi précises que possible.
Tout d'abord, pourquoi le ministre des affaires étrangères que vous étiez en janvier 2004 s'est-il mêlé de cette affaire, alors qu'elle ne relevait à l'évidence que des ministres de l'intérieur et de la défense ? Vos explications sont peu convaincantes, comme demeure surprenante la présence constante de ce personnage à multiples facettes qu'est votre ami Jean-Louis Gergorin.
Pouvez-vous en outre nous assurer que vous avez alerté la justice en temps et en heure alors que vous disposiez, semble-t-il, d'éléments d'information qui attestaient d'une manipulation ?
Enfin, pouvez-vous affirmer en conscience que les moyens de l'État, en particulier les services de renseignement, n'ont pas été détournés de leur objet pour évaluer l'implication de personnalités de droite et de gauche dans cette affaire ?
Monsieur le Premier ministre, alors que la situation du pays a rarement été aussi dégradée (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), cette affaire donne le sentiment que ce gouvernement n'a d'autre boussole que la rivalité qui vous oppose au ministre de l'intérieur. Le pays n'en peut plus de votre affrontement fratricide ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux. (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Pascal Clément, garde des sceaux, ministre de la justice. Je voudrais dire à M. Caresche, qui est membre de la commission d'enquête sur l'affaire d'Outreau, que ce qui inquiète le plus les juristes, c'est qu'une affaire reçoive une sanction médiatique avant d'être jugée et que l'opinion publique prenne pour la vérité des faits qui ne sont pas établis par la justice ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Vous, monsieur Caresche, qui avez réfléchi pendant près de deux cents heures, avec vos collègues de la commission d'enquête, sur les raisons de l'emballement médiatique qui a conduit, certes en première instance, à une erreur judiciaire...
M. Patrick Lemasle. Vous ne répondez pas aux questions !
M. le garde des sceaux. ...vous commettez strictement la même erreur sur le plan politique, fonçant tête baissée dans une affaire dont vous ignorez tout ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Par ailleurs, monsieur Caresche, comme l'a rappelé le Premier ministre, vous avez la mémoire un peu courte. Puis-je vous rappeler l'affaire des " paillotes ", dans laquelle les conseillers du Premier ministre de l'époque avaient été interrogés, ou celle d'un député trésorier, dans laquelle M. Jospin lui-même, alors Premier ministre, avait été entendu ? Faisons tous preuve de prudence dans cet hémicycle ! Aujourd'hui, c'est une affaire qui semble concerner la droite ; hier, c'était une affaire qui semblait concerner la gauche. En tout cas, n'affaiblissons pas l'État, ses services, n'affaiblissons pas la France ! Pour un petit gain politicien, ne mettez pas en péril nos institutions ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Auteur : M. Christophe Caresche
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : État
Ministère interrogé : justice
Ministère répondant : justice
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 3 mai 2006