Côte d'Ivoire
Question de :
M. Paul Quilès
Tarn (1re circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 18 décembre 2002
RÔLE DE LA FRANCE EN CÔTE D'IVOIRE
M. le président. La parole est à M. Paul Quilès, pour le groupe socialiste.
M. Paul Quilès. La situation en Côte d'Ivoire se dégrade sérieusement : on vient de découvrir récemment deux charniers et le ministre des affaires étrangères lui-même considère que toutes les conditions sont réunies pour qu'une catastrophe se produise. Depuis le 19 septembre, la présence militaire française s'est renforcée à plusieurs reprises dans le cadre de ce qu'on appelle l'opération Licorne. Il y a quelques jours encore, un nouveau contingent de 500 hommes est venu renforcer les 1 200 militaires en place. Initialement, l'objectif de la France était - ce qui se comprend parfaitement - d'assurer la sécurité de nos 20 000 ressortissants. Ensuite, il s'est agi d'observer le respect de la trêve intervenue le 17 octobre entre les forces gouvernementales et les rebelles. Aujourd'hui, d'après le colonel porte-parole de l'opération Licorne, les militaires français doivent « prendre une part plus active à la stabilisation du cessez-le-feu, et ils peuvent donc ouvrir le feu sur toute personne les empêchant d'accomplir leur mission ».
Compte tenu de la gravité du sujet, monsieur le Premier ministre, je pense que vous aurez le souci de répondre, sans polémique cette fois-ci. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
M. le président. S'il vous plaît, ne réagissez pas !
M. Patrick Ollier. Il nous provoque !
M. Paul Quilès. Pouvez-vous dire à la représentation nationale, très exactement, l'étendue et les limites de la mission des troupes françaises qui agissent, je le rappelle, dans le cadre des sept accords de défense et de coopération militaire signés entre la France et la Côte d'Ivoire sur une période de quarante ans, de 1961 à 1980. Je pense que le rôle de notre pays dans cette affaire doit être clair et sans ambiguïté. Mais, comme l'a indiqué justement M. de Villepin, « Aucun pays ne peut agir seul pour recréer les bases de la stabilité politique en Côte d'Ivoire ». « La solution », dit-il, « ne peut être que politique ». Nous souhaitons donc savoir, monsieur le Premier ministre, quelle action la France compte mener, de façon urgente et publique, en direction des Nations unies, pour que la communauté internationale prenne ses responsabilités et n'abandonne pas ce pays à une catastrophe programmée, comme cela s'est trop souvent produit ces dix dernières années en Afrique. Je crois qu'il serait à l'honneur de la France d'agir fermement et rapidement dans ce sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.
M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie. Monsieur Quilès, je l'ai indiqué tout à l'heure, et je vous le confirme : les missions des forces françaises qui sont présentes en Côte d'Ivoire et de celles qui s'y rendront bientôt, sont tout à fait claires. Elles n'ont pas varié. Il s'agit de veiller à la sécurité de nos compatriotes, vous l'avez vous-même rappelé, et d'assurer le respect du cessez-le-feu pour permettre la négociation. Celle-ci se déroulera sous l'égide africaine de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest, la CEDEAO, conformément à notre souhait, car nous sommes convaincus que la solution de cette crise n'est pas de nature militaire, mais politique.
Puisqu'on s'interroge sur la présence des forces françaises, je voudrais rappeler que, si l'armée française n'avait pas été sur place au début et si elle n'y était pas aujourd'hui, nous aurions assisté à un bain de sang. Voilà qui suffit à justifier notre présence sur le terrain. Pour répondre à ces missions et compte tenu de l'évolution de la situation, il est apparu nécessaire de renforcer les effectifs. Au final, le contingent devrait comprendre de 2 300 à 2 500 hommes. On peut apprécier diversement les notions d'efficacité et de sécurité. Mais, encore une fois, la mission elle-même n'a pas changé.
De même, on peut interpréter de diverses manières le rôle des Nations unies dans cette affaire. Pour le moment, les Nations unies se sont intéressées de près à la Côte d'Ivoire, mais par l'intermédiaire des négociations menées sous l'égide de la CEDEAO. Le Président de la République, M. Chirac, a été à maintes reprises en contact avec le secrétaire général de l'ONU. Les négociations engagées, qui doivent aboutir normalement à la réunion, à Paris, des différents protagonistes, associeront la représentation de l'ONU. Les Nations unies, les Etats africains, tout comme l'Union africaine elle-même, sont, vous le constatez, directement associés à la recherche d'une solution. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
Auteur : M. Paul Quilès
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : coopération et francophonie
Ministère répondant : coopération et francophonie
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 18 décembre 2002