Question au Gouvernement n° 2938 :
POM : Polynésie française

12e Législature

Question de : M. Victorin Lurel
Guadeloupe (4e circonscription) - Socialiste

Question posée en séance, et publiée le 25 octobre 2006

SITUATION EN POLYNESIE FRANÇAISE

M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour le groupe socialiste.
M. Victorin Lurel. Monsieur le Premier ministre, en tant que serviteur de la République, votre premier devoir est de faire respecter l'ordre public, les institutions et la démocratie, et singulièrement les verdicts populaires.
À deux reprises, nos concitoyens ont massivement choisi le changement après des années de règne UMP en Polynésie française. Le Gouvernement doit respecter ce choix, qu'il lui plaise ou non. La République et la démocratie ne s'arrêtent pas à l'Hexagone !
Rappelons qu'en Polynésie l'État n'a pas hésité à soutenir, après les élections de 2004, des motions de censure politiciennes en fermant les yeux sur l'achat de votes, qu'il n'a pas hésité non plus à cautionner récemment la remise en cause de l'indépendance de la justice, à planifier au plus haut niveau l'étranglement financier de la collectivité par une remise en cause des modalités d'affectation de la dotation globale de développement économique, et maintenant à laisser prospérer, voire à soutenir, des mouvements proprement insurrectionnels.
La passivité coupable, et donc complice, de l'État est avérée dans les barrages mis en place depuis le 12 octobre par les membres de l'ancien service d'ordre de Gaston Flosse.
M. Éric Raoult. Et Oscar Temaru, que fait-il ? Vous dites n'importe quoi !
M. le président. Taisez-vous, monsieur Raoult !
M. Victorin Lurel. Prévenues, les forces de l'ordre ont pourtant laissé bloquer Papeete, comme elles sont restées passives lorsque les locaux de la présidence, de la vice-présidence, du Conseil économique et social et de l'Assemblée territoriale ont été pris d'assaut ce week-end. Si, depuis cinq heures ce matin, les locaux sont enfin libérés et les barrages levés sous la pression des Polynésiens excédés par douze jours de blocage, c'est bien la rue que vous laissez gouverner outre-mer lorsque les élus ne vous conviennent pas.
M. Hervé de Charette et M. Jean-Michel Ferrand. Quelle est votre question ?
M. Victorin Lurel. Monsieur le Premier ministre, quand accepterez-vous enfin le verdict populaire en Polynésie française ?
Mme Sylvia Bassot. Vous voulez y mettre des " jurys populaires " ?
M. Victorin Lurel. Quand vous déciderez-vous à faire respecter l'ordre public et à laisser la justice fonctionner et sanctionner les délinquants ?
M. Éric Raoult. Et dans les banlieues ?
M. Victorin Lurel. Quand comprendrez-vous que l'État de droit doit également prévaloir outre-mer ? En un mot, quand rétablirez-vous la République dans le Pacifique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'outre-mer.
M. François Baroin, ministre de l'outre-mer. L'addition de vos mensonges, monsieur Lurel, ne fera jamais une vérité. (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
L'État de droit, c'est d'abord le respect du fonctionnement de nos institutions, de notre Constitution et du statut d'autonomie de la Polynésie française.
M. Christian Paul. Vous n'y croyez pas un instant !
M. le ministre de l'outre-mer. De quoi parlons-nous ? De l'intervention de l'État pour faire respecter l'ordre public, et ce à la demande des institutions locales, de la présidence, de l'Assemblée territoriale et du Comité économique et social. Elle s'est faite cette nuit dans des conditions parfaitement républicaines et maîtrisées, sans aucune algarade.
M. Christian Paul. C'est bien tard !
M. Bernard Roman. Il aura fallu dix jours !
M. le ministre de l'outre-mer. Deuxième réflexion à votre attention sur l'État de droit, monsieur Lurel : quel est le sujet en cause ? Un conflit opposant une organisation syndicale...
M. François Hollande. Payée par qui ?
M. le ministre de l'outre-mer. ...et la présidence de l'Assemblée territoriale, dans le cadre du statut d'autonomie de la Polynésie. L'État est dans son rôle quand il fait respecter l'ordre public. Il ne le serait pas s'il intervenait comme interlocuteur autour de la table des négociations, car celles-ci ne concernent que deux partenaires.
Ce qui s'est passé vendredi est à l'origine de la situation de blocage que vous évoquez : la fin des négociations et l'absence de perspective pour une solution rapide. Après deux jours de libres manifestations dans le respect de l'ordre public,...
M. Christian Paul. " Libres manifestations ", c'est vous qui le dites !
M. le ministre de l'outre-mer. ...la décision a été prise. Le rôle de l'État et, sur place, du Haut commissaire, est d'inciter les parties à renouer le dialogue - en l'occurrence, le dialogue social -, et non, je le répète, d'être un partenaire de la négociation. À chacun son métier, et les vaches seront bien gardées !
M. François Hollande. Vos vaches à vous sont des vaches politiciennes !
M. le ministre de l'outre-mer. L'État de droit, c'est le respect du vote, le respect des responsabilités de chacun, et donc l'organisation de la négociation syndicale, pour laquelle nous souhaitons tous une issue favorable. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Données clés

Auteur : M. Victorin Lurel

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Outre-mer

Ministère interrogé : outre-mer

Ministère répondant : outre-mer

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 octobre 2006

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