Question au Gouvernement n° 2985 :
élargissement

12e Législature

Question de : M. Hervé de Charette
Maine-et-Loire (6e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

Question posée en séance, et publiée le 9 novembre 2006

TURQUIE

M. le président. La parole est à M. Hervé de Charette, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
M. Hervé de Charette. Monsieur le président, ma question, qui s'adresse à Mme la ministre déléguée aux affaires européennes, porte sur les rapports entre l'Union européenne et la Turquie.
D'abord, la Turquie va-t-elle se décider à appliquer à Chypre l'accord douanier qui la lie à l'Union européenne ?
En septembre 2005, les Vingt-cinq avaient fixé un ultimatum à Ankara, lui intimant d'ouvrir ses ports et aéroports aux navires et avions chypriotes grecs avant la fin de 2006, faute de quoi la poursuite des pourparlers d'adhésion serait compromise. Madame la ministre déléguée, quel est le point de vue du Gouvernement français à quelques semaines de l'échéance ?
Ensuite, la publication par la Commission européenne de son rapport d'étape sur l'état des négociations et sur la situation en Turquie a de quoi inquiéter. Monsieur le président, tout en étant bref, je citerai quelques points importants de ce rapport.
À propos de la liberté d'expression, le rapport de la Commission précise que l'article 301 du code pénal turc qui réprime, comme vous le savez, les atteintes à l'identité nationale turque, a été utilisé de manière répétée soixante-sept fois pendant l'année 2006.
Le rapport indique que les droits des femmes ne sont pas respectés dans les régions les plus pauvres du pays, que les crimes d'honneur continuent et que, dans la région du sud-est, il arrive que les filles ne soient même pas enregistrées à la naissance.
À propos des minorités, peu de progrès sont signalés. Quant aux cas de torture et de mauvais traitements, certes leur nombre a baissé, mais ils sont toujours signalés notamment dans les prisons et au Kurdistan.
Les forces armées continuent quant à elles d'exercer une influence politique majeure. La corruption est généralisée, dans le secteur public comme dans le monde judiciaire. Le système judiciaire ne fonctionne toujours pas de manière indépendante, impartiale et efficace.
Enfin, la situation des droits de l'homme est préoccupante au Kurdistan, surtout depuis les émeutes de mars et avril dernier. Plus de 550 personnes ont été emprisonnées, dont 200 enfants.
Madame la ministre déléguée, que pense le Gouvernement français de cette situation ? Quelles conclusions en tire-t-il et comment sera préparée la réunion des chefs d'État et de gouvernement du 15 décembre où cette question sera au coeur des débats de l'Union européenne ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.
M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères. Monsieur le député, la Commission européenne a en effet présenté ce matin son rapport annuel faisant le point sur l'élargissement de l'Union européenne. Concernant la Turquie, je formulerai deux remarques.
Premièrement, la Commission estime manifestement que le rythme des réformes qui permettraient à la Turquie d'adhérer à l'Union s'est beaucoup ralenti et que le pays est en train de prendre beaucoup de retard. Qu'il s'agisse de l'article 301 du code pénal turc relatif à la liberté d'expression, des libertés religieuses ou encore de ce que l'on appelle le droit des minorités, aujourd'hui, les réformes marquent le pas.
Deuxièmement, en septembre 2005, le conseil européen des ministres des affaires étrangères avait déclaré à l'unanimité que l'adhésion de la Turquie passait par la reconnaissance par ce pays des vingt-cinq États membres, donc, en particulier, de Chypre.
Aujourd'hui, force est de constater que la Turquie n'accepte toujours pas d'ouvrir ses ports et ses aéroports aux navires et avions, non seulement chypriotes, mais encore à ceux en provenance de Chypre. Il est donc évident que la Turquie ne satisfait pas pour le moment à ses obligations. Il reste deux mois, c'est-à-dire jusqu'au 31 décembre, et la présidence finlandaise fera tout pour que la Turquie respecte ses engagements.
Je souligne clairement devant la représentation nationale que, si, à la fin de l'année, la Turquie ne reconnaît toujours pas les vingt-cinq États membres, dont évidemment Chypre, il sera alors nécessaire de revoir le calendrier de l'adhésion de ce pays à l'Union européenne. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Données clés

Auteur : M. Hervé de Charette

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Union européenne

Ministère interrogé : affaires étrangères

Ministère répondant : affaires étrangères

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 9 novembre 2006

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