Question au Gouvernement n° 2995 :
La Poste

12e Législature

Question de : M. Jacques Desallangre
Aisne (4e circonscription) - Député-e-s Communistes et Républicains

Question posée en séance, et publiée le 15 novembre 2006

SERVICE PUBLIC POSTAL

M. le président. La parole est à M. Jacques Desallangre, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.
M. Jacques Desallangre. Monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, en mai dernier le président de La Poste a annoncé, pour son entreprise, des bénéfices en hausse de 50 % pour 2005. La mission que lui avait confiée le gouvernement Raffarin - améliorer la rentabilité de l'entreprise La Poste - est donc remplie, mais, pour cela, il y a un prix à payer : la dégradation significative du service public. Ainsi, La Poste a créé de nombreuses filiales, qui sont autant de sociétés de droit privé, elle a rationalisé son organisation, ce qui a entraîné un dégraissage des effectifs et une augmentation des charges de travail, et elle a supprimé des bureaux de poste, notamment en secteur rural, priorité étant donnée à l'amélioration des résultats, et non pas à la préservation du service public. Enfin, elle augmentera le prix du timbre chaque année.
Toutefois, la menace ultime qui pèse sur le service public de La Poste, c'est le grand rendez-vous de 2009, qui verra la libéralisation totale du marché et la suppression du dernier morceau de secteur réservé, lequel est censé financer les sujétions de service public supportées par La Poste.
Qui paiera désormais la charge de ce service public et comment le financement en sera-t-il assuré ? Compte-t-on sur de nouveaux gains de productivité de l'entreprise ? Ce serait l'assurance d'une dégradation supplémentaire du service public. Cherchera-t-on à recourir à des subventions publiques ? La Commission européenne, en raison de son libéralisme, les refusera. Quant à l'instauration de nouvelles taxe, ce serait au consommateur d'en supporter le poids. Appartiendra-t-il alors aux nouveaux entrants d'assumer cette charge ? Et, dans ce cas, s'agira-t-il d'une contribution assise sur leur chiffre d'affaires ? Ou bien y aura-t-il partage des obligations de service public entre les opérateurs privés et La Poste ?
C'est cette dernière solution que vous avez choisie, monsieur le ministre. Elle a, il est vrai, le mérite de la simplicité : se débarrasser du service public en le faisant assurer pour partie par les nouveaux entrants. La stratégie que vous adoptez vise donc bien à décharger La Poste des sujétions de service public qui lui coûtent. Son président, M. Bailly, n'a-t-il pas déclaré : " Nous défendons un dispositif dans lequel les nouveaux entrants prennent en charge une partie des missions de service public " ? À quand la réalisation de ce grand projet libéral : la mise aux enchères des missions de service public ?
Monsieur le ministre, face à Bruxelles, défendrez-vous la solution permettant à La Poste de conserver sa mission de service public et de disposer des moyens de l'accomplir ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, je vous remercie de votre question parce qu'elle me permet de rappeler que La Poste est une des entreprises préférées des Français. Elle est l'un des symboles de notre service public, ce qui ne lui a pas interdit d'engager une action résolue de modernisation, que le Gouvernement tient à saluer.
Les postiers peuvent être fiers de leur groupe. Du reste, je ne veux voir dans leur mobilisation actuelle que leur attachement à leur entreprise. Je souhaite toutefois les rassurer quant à certaines de leurs préoccupations.
M. Jacques Desallangre. Ils en ont bien besoin !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Comme vous l'avez rappelé, monsieur le député, la Commission européenne a récemment adopté un projet de nouvelle directive postale, qui doit être soumis à l'examen du Parlement européen et du Conseil européen.
Je tiens à vous réaffirmer ici solennellement la volonté de la France de maintenir un service public postal de très grande qualité. Le projet de directive tient du reste largement compte des préoccupations du Gouvernement français. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
Premièrement, le champ et les obligations du service universel restent inchangés. Deuxièmement, la péréquation tarifaire sur les prix individuels est maintenue. Troisièmement, le droit des consommateurs est renforcé. Quatrièmement enfin, le projet de directive ne restreint pas les missions de service public complémentaires, telles que l'aménagement du territoire ou le transport de presse. Je le répète très clairement : la France est et restera attachée au maintien d'un service universel postal de haute qualité à un prix abordable sur l'ensemble du territoire. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)
M. Michel Lefait. Quelle réponse ! C'est n'importe quoi !

Données clés

Auteur : M. Jacques Desallangre

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Postes

Ministère interrogé : économie

Ministère répondant : économie

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 15 novembre 2006

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