Question au Gouvernement n° 3068 :
GDF

12e Législature

Question de : M. Jean-Marc Ayrault
Loire-Atlantique (3e circonscription) - Socialiste

Question posée en séance, et publiée le 6 décembre 2006

PRIVATISATION DE GDF

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault.
M. Jean-Marc Ayrault. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
La privatisation de Gaz de France doit être tranchée par le peuple français lui-même : telle est l'exigence démocratique que le groupe socialiste n'a cessé de défendre durant le débat parlementaire sur le projet de loi relatif au secteur de l'énergie, et telle est aussi la conséquence de la décision du Conseil constitutionnel sur ce texte. En reconnaissant que la privatisation ne peut entrer en vigueur avant l'ouverture du marché du gaz le 1er juillet 2007, le Conseil met votre stratégie du fait accompli en échec.
Il revient donc aux Français, lors des élections présidentielle et législatives, de décider s'il convient d'arrêter ou de poursuivre le processus de privatisation et de fusion.
Voilà pourquoi nous demandons solennellement à M. le Premier ministre de désavouer son ministre de l'économie et des finances (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), qui veut imposer immédiatement le décret de privatisation, et d'interdire à Gaz de France de signer tout protocole avec Suez qui ouvrirait droit à indemnisation des actionnaires en cas d'échec de la privatisation et de la fusion. Cette prise en otage de l'État et des contribuables serait un scandale démocratique aux conséquences incalculables.
M. Alain Gest. Qu'en pense Mme Royal ?
M. Jean-Marc Ayrault. Ni les Français ni vos successeurs n'ont à payer vos échecs industriels, pas plus qu'ils n'ont à payer la disparition du service public et des tarifs réglementés qu'impose votre privatisation.
Si les Français le décident en mai 2007, les socialistes prennent ici l'engagement public d'annuler tout décret de privatisation de Gaz de France.
Ma question est claire et simple et je n'accepterai pas de réponse dilatoire (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire - Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste) comme en font trop souvent vos ministres : renoncez-vous à signer le décret de privatisation avant l'élection présidentielle ?
M. Roland Chassain. Non !
M. Jean-Marc Ayrault. Empêcherez-vous Gaz de France d'établir un protocole d'indemnisation avec Suez ? Sur ces deux points, j'attends une réponse claire.
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Plusieurs députés du groupe socialiste. Où est le Premier ministre ?
M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Vous et vos amis, monsieur le député, avez jugé utile de déférer devant le Conseil constitutionnel le projet de loi relatif au secteur de l'énergie voté de façon démocratique par les deux assemblées. (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste.) C'est votre droit. Pour ma part, je vous dis trois fois " bravo " car, comme votre question le démontre, vous êtes pris à votre propre piège !
Bravo parce que, pendant les quarante-cinq jours qu'a duré le débat, vous n'avez cessé d'affirmer qu'il ne se passerait rien au 1er juillet 2007 : tout allait continuer comme avant... Eh bien, le Conseil constitutionnel vient de vous démentir de façon cinglante ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Pierre Ducout et M. Patrick Lemasle. Au contraire !
M. Christian Bataille. Mensonge !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Le 1er juillet 2007 marque bien l'ouverture des marchés de l'énergie. Il convenait donc de s'y préparer
M. Christian Bataille. En faisant cadeau de cinq milliards d'euros à Suez ?
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Bravo parce que, pendant quarante-cinq jours, vous n'avez cessé de mentir aux Français en soutenant que le préambule de la Constitution de 1946 et la loi de 1948 protégeaient le monopole de l'énergie. Là encore, le Conseil constitutionnel vous oppose un démenti cinglant en affirmant que Gaz de France peut être privatisée pour aller de l'avant.
M. Jean Glavany. Le Conseil constitutionnel a censuré les socialistes, c'est bien connu !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Un bravo attristé, enfin, parce que le Conseil constitutionnel a validé le fait qu'il fallait une loi pour pouvoir maintenir les tarifs réglementés, si bien que votre saisine interdit aux Français qui déménagent de garder le privilège de ces tarifs.
Oui, trois fois bravo, monsieur le président Ayrault !
Le Gouvernement et la majorité assument quant à eux leurs responsabilités. Il fallait bien aller de l'avant et donner à Gaz de France les moyens de nouer des alliances.
Il est encore un point sur lequel je ne vous suis pas du tout, monsieur Ayrault. Cette loi ayant été votée démocratiquement par les deux chambres et venant d'être validée par le Conseil constitutionnel, il convient de la mettre en application sans tarder pour que les Français puissent bénéficier des tarifs réglementés. Selon vous, au contraire, parce qu'il y a des échéances électorales, une loi dûment votée et validée ne devrait pas être appliquée ? Ce serait un déni de démocratie !
M. le président. Merci, monsieur le ministre.
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Gaz de France a désormais les moyens d'aller de l'avant. (" Mensonge ! " sur les bancs du groupe socialiste.) Il lui appartient de présenter un nouveau calendrier...
M. Christian Bataille. Et les cinq milliards donnés à Suez ?
M. le président. Nous allons nous arrêter là, monsieur le ministre.
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ...pour tenir compte de ce nouveau cadre réglementaire, dans l'intérêt des Français. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Données clés

Auteur : M. Jean-Marc Ayrault

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Énergie et carburants

Ministère interrogé : économie

Ministère répondant : économie

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 6 décembre 2006

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